Accusé de dépenses excessives, François de Rugy a présenté sa démission du gouvernement

  • Copié
avec AFP , modifié à
"Les attaques et le lynchage médiatique dont ma famille fait l'objet me conduisent aujourd'hui à prendre le recul nécessaire - ce que chacun comprendra", justifie le ministre dans un communiqué. 

Le ministre de la Transition écologique François de Rugy, au centre d'une polémique sur des dépenses excessives, a annoncé avoir présenté sa démission mardi matin au Premier ministre, s'estimant victime d'un "lynchage médiatique" et précisant avoir déposé une plainte en diffamation contre Mediapart.

Les informations à retenir : 

  • François de Rugy a présenté sa démission à Edouard Philippe, mardi matin
  • Emmanuel Macron a accepté cette "décision personnelle", a indiqué l'Elysée
  • Onze mois après le départ de Nicolas Hulot, une nouvelle période de vacance s'ouvre au ministère de l'Écologie

"Les attaques et le lynchage médiatique me conduisent à prendre le recul nécessaire"

"Les attaques et le lynchage médiatique dont ma famille fait l'objet me conduisent aujourd'hui à prendre le recul nécessaire - ce que chacun comprendra. La mobilisation nécessaire pour me défendre fait que je ne suis pas en mesure d'assumer sereinement et efficacement la mission que m'ont confiée le Président de la République et le Premier ministre. Dès lors, j'ai présenté ma démission au Premier ministre ce matin", a écrit le ministre dans un communiqué. 

"Je suis trop attaché à l’écologie à laquelle j’ai consacré tout mon engagement militant, pour accepter que notre action écologique soit affaiblie par des mises en cause personnelles incessantes", ajoute François de Rugy, disant sa "fierté" des "actions entreprises" en dix mois passés à l'Hôtel de Roquelaure. "Je veux dire aussi à bientôt. Plus que jamais, c’est le combat pour la République et pour l’écologie qui m’anime".

 

Emmanuel Macron accepte sa démission

Le numéro deux du gouvernement, qui devait présenter mardi au Sénat le projet de loi énergie et climat, s'est entretenu mardi matin avec Edouard Philippe. Son passage devant les députés lors des questions au gouvernement, prévu à 15 heures, s'annonçait difficile. Les révélations par Mediapart de dîners fastueux organisés quand il présidait l'Assemblée nationale, de travaux dans son logement de fonction au ministère ou de son appartement près de Nantes, avaient sérieusement fragilisé le ministre, qui s'était défendu tout le week-end sur ces informations en cascade.

L'Elysée a indiqué que le chef de l'Etat acceptait une "décision personnelle", mardi après-midi. "Nous n'avons aucune indication que des règles aient été transgressées" ou que le ministre démissionnaire François de Rugy, au centre de révélations sur ses dépenses, ait "commis des actes (...) contraires à la justice", a cependant déclaré la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye.  

La démission de François de Rugy ouvre une nouvelle période de vacance au ministère de l'Ecologie, 11 mois après la démission fracassante de Nicolas Hulot et alors qu'Emmanuel Macron a fait de la préservation de l'environnement un des marqueurs forts de la suite de son quinquennat. "L'autre victime de cette situation, c'est l'écologie", estime ainsi le porte-parole d'EELV Julien Bayou sur Twitter : "qui pour succéder à De Rugy sur ce poste et cet enjeu si malmené par le gouvernement ?"

Mediapart salue une victoire de "l'information"

"L'information a été plus forte que la communication", a réagi auprès de l'AFP Fabrice Arfi, l'un des journalistes de Mediapart à l'origine des enquêtes visant le ministre. "Mediapart n'a fait que son travail et continuera de le faire", a souligné le journaliste. "La démission de Monsieur Rugy, qui n'appartient qu'à lui et au gouvernement, montre une chose: l'information a été plus forte que la communication".

Sur Twitter, le site d'information a publié dans la foulée une nouvelle enquête portant sur les frais de député du ministre. "Il a pris les devant et quitté le gouvernement", estiment les auteurs de l'article, établissant un lien direct entre ces nouvelles révélations et la démission de François de Rugy. "Nos questions lui ont été envoyées hier (lundi), nous attendions ses réponses pour 14 heures, et ce sera l'annonce de sa démission", a écrit le dirigeant du site Edwy Plenel, toujours sur le réseau social. 

François de Rugy a de son côté annoncé avoir "déposé (mardi) matin une plainte pénale en diffamation" contre Mediapart. "La volonté de nuire, de salir, de démolir, ne fait pas de doute. Je suis soumis à un feu roulant de questions nouvelles et contraint de parer sans cesse à de nouvelles attaques", estime-t-il dans son communiqué. 

De nouvelles révélations sur les frais de mandat de François de Rugy 

Selon la dernière enquête publiée par Mediapart mardi, François de Rugy aurait utilisé ses frais de mandat de député pour payer une partie de ses cotisations d'élu à son ancien parti EELV, tout en les déduisant du calcul de ses impôts. Paru quelques minutes après l'annonce du départ du ministre de l'Ecologie, l'article détaille deux versements pour un total de 9.200 euros qu'il avait effectués au profit du parti écologiste, en 2013 et 2014, depuis le compte sur lequel il percevait son indemnité représentative de frais de mandat (IRFM), en tant que député. François de Rugy aurait déduit ces versements du calcul de son impôt sur le revenu au titre de l'année 2015, selon son avis d'impôt consulté par Mediapart, qui indiquait qu'il n'avait pas réglé d'impôts cette année-là.

Jusqu'en 2015, en plus de leur rémunération, les 577 députés bénéficiaient d'une "avance" de frais pour faire face à certaines dépenses liées à leur mandat. Cette enveloppe de quelque 5.000 euros mensuels n'était pas contrôlée.
Après des abus (vacances, téléviseurs et autres dépenses payées avec l'IRFM), Assemblée nationale puis Sénat avaient édicté en 2015 une liste - très générale - des dépenses autorisées et interdites (dont l'acquisition d'un bien immobilier et les cotisations aux partis), et imposé le versement de l'indemnité sur un compte bancaire dédié. Les députés devaient aussi certifier sur l'honneur le bon usage des dépenses.