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avec AFP / Crédit photo : LUDOVIC MARIN / POOL / AFP , modifié à
Accusé d'avoir commis une atteinte inédite à la laïcité en célébrant à l'Élysée jeudi soir le début de la fête juive de Hanouka, Emmanuel Macron s'est défendu vendredi en invoquant "un esprit qui est celui de la République et de la concorde".

À deux jours de la date anniversaire du 9 décembre sur la loi de 1905 sur la séparation de l'Église et l'État, le chef de l'État a créé la polémique, y compris jusque dans une partie de la communauté juive, en laissant le grand rabbin de France, Haïm Korsia, allumer dans la salle des fêtes de l'Élysée la première bougie du candélabre pour Hanouka, la fête des lumières.

Cette célébration est intervenue lors de la remise à Emmanuel Macron du prix annuel Lord Jakobovits de la Conférence des rabbins européens qui récompense la lutte contre l'antisémitisme et la sauvegarde des libertés religieuses. Emmanuel Macron a affirmé vendredi ne pas regretter "du tout" la célébration à l'Élysée du début de la fête juive de Hanouka, assurant que cela avait été effectué "dans un esprit qui est celui de la République et de la concorde".

"La laïcité, ce n'est pas l'effacement des religions"

"Le pays, parfois, s'embrase. Hier, je recevais des rabbins de l'Europe entière qui me remettaient un prix reconnaissant la lutte de la France contre l'antisémitisme. À l'issue de cette cérémonie, j'ai allumé la bougie du souvenir qui revenait d'Auschwitz. Ensuite, c'est le grand rabbin qui a allumé la bougie de Hanouka. Tout ça a été fait d'ailleurs en présence de tous les autres cultes qui étaient invités, qui étaient là et dans un esprit qui est celui de la République et de la concorde. La laïcité, ce n'est pas l'effacement des religions. C'est le fait que chacun a le droit et la liberté de croire et de ne pas croire. Si le président de la République s'était prêté à un geste cultuel ou avait participé à une cérémonie, ce ne serait pas respectueux de la laïcité. Le président de la République, que je suis, est respectueux de la laïcité. Je considère que c'est une voie de liberté", a-t-il déclaré alors qu'il visitait le chantier de reconstruction de Notre-Dame de Paris.

Vives critiques à gauche

L'événement n'avait pas été annoncé par l'Élysée mais des vidéos, largement visionnées sur les réseaux sociaux, ont embrasé la controverse, principalement à gauche. "L'Élysée n'est pas un lieu de culte. On ne transige pas avec la laïcité. Ce commun est précieux mais fragile", a dénoncé la socialiste Carole Delga. "L'Élysée n'est ni une église, ni une mosquée, ni un temple, ni une synagogue", a renchéri Guillaume Lacroix, président du parti radical de gauche. "Une faute politique impardonnable" pour le coordonnateur de La France insoumise Manuel Bompard.

 

À gauche, des responsables y voient aussi le risque d'alimenter le sentiment d'un "deux poids, deux mesures" par rapport à la communauté musulmane. Dans le contexte de montée des tensions liées à la guerre entre Israël et le Hamas, c'est "de la vraie nitroglycérine", a renchéri Laurence Rossignol (PS).

"Rupture de la tradition républicaine"

Les réactions ont été moins vives à droite et à l'extrême droite, qui ont surtout critiqué, à l'instar de la porte-parole des députés RN Laure Lavalette, "une tentative de rattrapage" du chef de l'État après son absence à la marche contre l'antisémitisme du 12 novembre. "Comment peut-on refuser de participer à une marche civique contre l'antisémitisme au motif incongru et fallacieux de la sauvegarde de l'unité nationale et célébrer une fête religieuse au sein du palais présidentiel ?", s'est demandé David Lisnard (LR).

Au sein de la communauté juive même, le président du Crif, Yonathan Arfi a pris ses distances avec l'initiative du grand rabbin, parlant d'une "erreur". "Ce n'est pas la place au sein de l'Élysée d'allumer une bougie de Hanouka parce que l'ADN républicain, c'est de se tenir loin de tout ce qui est religieux", a reconnu M. Arfi.

Emmanuel Macron avait déjà créé la polémique sur la laïcité en allant assister à la messe du pape à Marseille. Mais "c'est la première fois que le président organise une cérémonie religieuse à l'Élysée, c'est une rupture de la tradition républicaine", a souligné l'historien Patrick Weil auprès de l'AFP.

Un "signal" de "soutien" à la "communauté juive" d'après Borne

Embarrassé par la polémique, l'exécutif s'est d'abord défendu à travers Elisabeth Borne qui, depuis Mayotte, a estimé qu'Emmanuel Macron avait voulu envoyer un "signal" de "soutien" à la "communauté juive" face à la "montée de l'antisémitisme".

Le ministre de l'Intérieur et des cultes Gérald Darmanin n'y a vu "nulle atteinte à la laïcité". Le ministre en a profité pour faire un lien avec les polémiques récurrentes sur les crèches en mairie au moment de Noël. Il a jugé "un peu absurde" les décisions de justice les interdisent "parce que ça fait partie de notre vie culturelle".