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INTERVIEW - Exclusif : « En cas de non-respect de leurs engagements, les subventions aux bailleurs sociaux seront coupées », prévient Juliette Méadel

Alexis Delafontaine - Mis à jour le . 5 min
INTERVIEW - Exclusif : « En cas de non-respect de leurs engagements, les subventions aux bailleurs sociaux seront coupées », prévient Juliette Méadel
INTERVIEW - Exclusif : « En cas de non-respect de leurs engagements, les subventions aux bailleurs sociaux seront coupées », prévient Juliette Méadel © Matthieu Delaty / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

Ministre déléguée chargée de la Ville, Juliette Méadel est revenue au micro d'Europe 1 sur le contexte politique actuel ainsi que ses priorités à la tête de son ministère, parmi lesquelles l'insécurité ou l'accessibilité au logement. Cette dernière met particulièrement en garde les bailleurs sociaux.

Invitée de La Semaine Politique sur Europe 1, Juliette Méadel a présenté ses priorités à la tête du ministère en charge de la Ville : la lutte contre l’insécurité, l’accessibilité au logement et la propreté. La ministre prévient les bailleurs sociaux : en cas de non-respect de leurs engagements, elle coupera les subventions de l’État.

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Europe 1 : Depuis plusieurs semaines, Emmanuel Macron hausse le ton contre la Russie et Vladimir Poutine. Il endosse ainsi son costume de chef des armées et ouvre même le débat sur l'envoi de troupes en Ukraine. Est-ce que vous attendiez cela de la part du Président de la République, depuis le début de la guerre en Ukraine ?

Juliette Méadel : Depuis le début de la guerre en Ukraine, la France et l'Europe savent qu'elles ne pourront plus compter sur les États-Unis pour se défendre. Cette crise, bien que très inquiétante, représente une opportunité pour l'Europe et la France de renforcer leur position et de jouer un rôle de leadership. La France, seule puissance nucléaire de l'Union européenne, se doit d'endosser ce rôle.

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Autour d'Emmanuel Macron, on observe également l'émergence de leaders européens forts comme Donald Tusk en Pologne, Giorgia Meloni en Italie, Keir Starmer en Angleterre et Olaf Scholz en Allemagne. Nous assistons à un tournant historique pour l'Europe.

En France, on entend certaines divergences au sein du bloc central, notamment sur la dissuasion nucléaire ou la saisie des avoirs russes. Ne faudrait-il pas plutôt une concorde nationale derrière le Président de la République ?

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Pour moi, le chef de la majorité, après le Président, c'est François Bayrou. Le Premier ministre l'a rappelé : en matière de politique étrangère, le chef, c'est Emmanuel Macron. La France est à un moment décisif où elle doit jouer pleinement son rôle de moteur européen en matière de défense. Cependant, partager le commandement nucléaire n'est pas une option. Personne ne propose de commandement intégré, mais une coopération accrue en matière de défense, de renseignement et de soutien mutuel est essentielle.

Parlons maintenant de la sécurité dans les quartiers sensibles. Comment comptez-vous stopper l'escalade de la violence ?

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Je suis d'une gauche pour qui la sécurité n'est pas un gros mot. C’est la mienne, c’était celle de Clémenceau, de Mendès France ou encore de François Hollande au moment des attentats. J'ai toujours été engagée dans la protection des citoyens, notamment en aidant les victimes d'attentats. L'autorité de l'État est essentielle, surtout dans les quartiers populaires.

Je travaille en collaboration avec le ministre de l'Intérieur et le ministre de la Justice pour lutter contre le trafic de drogue et assurer la tranquillité publique. L'insécurité ne concerne pas uniquement les quartiers urbains, elle touche aussi les zones rurales.

Certains habitants se sentent abandonnés par l'État...

C'est précisément pourquoi nous avons besoin d'une action coordonnée. Je visite régulièrement ces quartiers pour identifier les problèmes concrets, et je vois des trafiquants de drogue qui rendent la vie de nos concitoyens insupportable.

C'est la raison pour laquelle, dans les quartiers les plus fragiles, j'ai besoin du ministre de l'Intérieur et du ministre de la Justice, et ils remplissent leurs missions. Moi, je m'occupe d'une chose : les conditions de vie de nos concitoyens, la tranquillité publique, la lutte contre les incivilités et le respect de la parole donnée. Je veux améliorer rapidement les conditions de vie des habitants. Ce n'est pas normal que des femmes seules croisent des trafiquants en bas de chez elles. Un état des lieux précis est en cours, et je prendrai des mesures fortes si les conditions ne s'améliorent pas.

La crise du logement touche particulièrement les classes moyennes et précaires. Que faire pour rendre le logement plus accessible ?

La question de l'accession au logement, dont s'occupe Valérie Létard, est un sujet qui touche toute la France et pas seulement les quartiers politiques de la ville. Dans ces quartiers, c'est principalement du logement social sur lequel nous travaillons. Je travaille avec les bailleurs sociaux, que nous aidons sur le plan financier. Le contribuable, vous et moi, donne une aide aux bailleurs sociaux pour qu'ils entretiennent mieux les logements sociaux. Cette aide, c'est 315 millions d'euros, et je souhaite que cet argent public soit bien employé.

Quand vous sortez de chez vous, vous avez bien le droit à ce que ce soit propre, que les poubelles soient bien rangées, que les boîtes aux lettres ferment, que les ascenseurs fonctionnent et que les locaux ne soient pas dégradés par des incivilités. C'est mon travail. Je veux que les bailleurs sociaux, en accord avec les élus locaux, œuvrent pour que vous puissiez vivre dans des conditions dignes. C'est à cela que sert l'engagement de l'État.

Mais concrètement, pour les logements sociaux, comment améliorer la situation et chasser les marchands de sommeil qui prospèrent dans les quartiers précaires ?

C'est un sujet majeur pour les quartiers prioritaires. Il y a ce qu'on appelle des copropriétés dégradées et, effectivement, des réseaux qui prennent le contrôle. Il faut, sous instruction judiciaire, les expulser et les sanctionner pénalement de façon parfaitement exigeante et dans le respect de la loi.

Je me mets à la place des six millions de personnes qui vivent dans ces quartiers pauvres, dont beaucoup sont des familles monoparentales. Le matin, quand leurs enfants partent pour aller à l'école, elles se retrouvent face à des squats avec des trafiquants et des marchands de sommeil qui logent des personnes en situation irrégulière.

Mon travail, c'est de faire en sorte que l’autorité de l'État soit respectée. C'est pour cela que je suis en train de travailler sur un diagnostic que j'ai demandé aux préfets de réaliser pour identifier les logements sociaux où les conditions de vie ne sont plus acceptables. Je viens de le recevoir et je suis en train d'y travailler.

Mardi, je pourrai donner une première vision de la situation et demander aux bailleurs sociaux d'améliorer les choses. Dans le cas contraire, d’ici quelques mois, je couperai l'aide publique, autrement dit, je procéderai à des sanctions par la suppression de l’abattement de la taxe professionnelle sur les propriétés bâties. Si les contribuables dépensent 315 millions d'euros chaque année pour que les logements sociaux soient bien entretenus, alors ils doivent être bien entretenus. Faute de quoi, nous prendrons des sanctions. C'est un mécanisme très simple : du donnant-donnant. On ne peut pas attendre.

Et pour les personnes handicapées vivant dans ces logements sociaux ?

Pour la première fois, nous avons établi une feuille de route spécifique au handicap dans les quartiers prioritaires. Nous menons un audit sur l'accessibilité des ascenseurs et lancerons des actions d'amélioration d'ici à la fin de l'année. Il est inacceptable qu'une personne en fauteuil roulant soit bloquée chez elle à cause d'un ascenseur en panne. Cela représente un coût élevé, donc ce ne sera pas réglé d'un coup de baguette magique, mais nous avancerons.

La majorité présidentielle semble fragilisée, le Parti socialiste a décidé dorénavant de voter les motions de censure. Pensez-vous que le gouvernement tiendra jusqu'en 2027 ?

Nous avons un devoir impérieux de stabilité et de responsabilité. Nos concitoyens attendent des actes, pas des querelles de chapelle. L'action politique doit être efficace et répondre aux urgences sociales et économiques du pays. Alors, je dis merci à mes collègues socialistes, car ils ont fait un bougé salutaire en ne votant pas la censure sur le budget.

Grâce à eux, il y a eu des vrais progrès sur le plan social et dans la situation internationale actuelle, je ne peux qu'espérer qu'ils continuent à jouer ce rôle constructif et qu'ils ne cherchent pas à tout prix à déstabiliser la République en raison de leurs propres agendas de partis.