Discours contre la radicalisation, formation des imams... Le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb puis le chef du gouvernement Edouard Philippe ont pressé mardi soir les responsables musulmans d'agir face aux défis qui se posent à la deuxième religion de France. Le ministre d'Etat s'est exprimé lors du repas annuel de rupture du jeûne du ramadan (iftar) organisé par le Conseil français du culte musulman (CFCM), d'abord sans la présence d'Edouard Philippe, une absence annoncée qui avait suscité incompréhension et critiques.
"De grands défis à relever ensemble". "Retenu avec le président de la République pour préparer une réunion importante", selon Gérard Collomb, le chef du gouvernement est arrivé au Pavillon Dauphine peu avant 23h15, saluant ses hôtes et s'installant à leur table sans prononcer d'allocution. Mais contre toute attente, environ une heure plus tard, après s'être prêté à quelques selfies dans la salle, Edouard Philippe a brièvement pris la parole. "Nous avons de grands défis à relever ensemble, pas sûr que ce soit la peine de les détailler tellement ils sont évidents", a improvisé le Premier ministre devant une assistance plus clairsemée après minuit. "Tout le monde sent bien combien nous vivons un moment crucial pour notre pays, pour la qualité de notre vie en commun", a-t-il ajouté, en concluant sa courte intervention par la formule "merci pour votre invitation, et au travail !"
Pour un "islam républicain". C'est son ministre chargé des Cultes qui, plus tôt dans la soirée, s'était fendu d'un discours plus développé, à la tonalité exigeante à l'égard des responsables musulmans. "C'est à vous d'abord qu'il appartient de mener" le combat contre l'islam radical et "les messages de fermeture et de repli" sur "le terrain théologique", que "vous seuls pouvez investir", leur a lancé Gérard Collomb. "Et il faut aller encore plus loin si nous voulons que ce discours d'un islam pleinement républicain soit audible et efficace, car les thèses du repli sont puissamment relayées sur internet et sur les réseaux sociaux", a-t-il relevé.
Renforcer la formation des imams. Soulignant que l'Etat avait agi afin que "de plus en plus d'imams" soient "formés sur notre sol", Gérard Collomb a dit aux responsables du CFCM qu'il leur appartenait de s'"approprier cette dynamique" par des formations renforcées. Il faut encourager "les imams et les cadres religieux à suivre effectivement ces cursus : c'est d'ailleurs ce que prévoyait le projet de 'charte de l'imam' à un moment donné envisagé par le CFCM" mais jamais sorti des cartons, a remarqué le ministre. Il faut "redonner une impulsion" à certains chantiers, a-t-il ajouté, citant le financement du culte musulman, ou encore son organisation, qui "reste aujourd'hui encore en suspens".
L'Etat investi. "Ces questions, c'est aux musulmans de France de les prendre en charge dans la durée. Mais l'Etat, qui a contribué depuis l'origine à la mise en place du CFCM (en 2003, ndlr), ne peut s'en désintéresser", a estimé le ministre, confirmant qu'"une grande concertation" serait lancée dans chaque département. Le président du CFCM, Ahmet Ogras, a lui aussi dit son intérêt pour une vaste consultation des musulmans. "Il est temps (...) qu'en partant de la base, du terrain, on puisse faire converger des propositions, à partir desquelles le président de la République serait en mesure de prendre des initiatives fortes", a poursuivi Gérard Collomb, sans préciser ni les contours, ni le calendrier des annonces présidentielles