L'Assemblée nationale a largement rejeté jeudi une proposition de résolution communiste condamnant "l'institutionnalisation par Israël d'un régime d'apartheid", malgré les appels d'une partie de la gauche à soutenir un texte "du côté du droit international". Le député Jean-Paul Lecoq, auteur du texte, a insisté sur "l'attachement profond" de son groupe "à l'existence de l'État d'Israël", mais a critiqué une "dérive illibérale et coloniale de cet État".
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De vives critiques dans le camp présidentiel
Déposée dans le cadre de la journée réservée aux textes du groupe communiste, la résolution avait fait l'objet de vives critiques dans le camp présidentiel, de la droite et de l'extrême droite, mais aussi d'élus socialistes, ainsi que du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif). "Que les raisons soient politiques, sécuritaires ou religieuses, la politique de colonisation est contraire à la légalité internationale", a martelé Jean-Paul Lecoq, arguant que la situation des Palestiniens "relève juridiquement d'une situation d'apartheid".
"C'est un régime institutionnalisé, gravé dans le marbre de la loi (...), ayant pour but l'oppression d'un groupe sur un autre (et) institutionnellement maintenu en place", a-t-il énuméré, invoquant "les centaines de résolutions de l'ONU, (...) de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe", et "les enquêtes et rapports publiés par des ONG".
Soutien des députés insoumis et écologistes
Sa résolution, qui n'aurait pas été contraignante, demandait à l'exécutif la reconnaissance de "l'État de Palestine", le dépôt à l'ONU d'une résolution pour imposer à Israël "un embargo strict sur l'armement", et l'abrogation de "circulaires interdisant l'appel au boycott des produits issus des colonies". Il a reçu le soutien de députés insoumis et écologistes mais pas du groupe socialiste. La résolution a été rejetée par 199 voix contre 71.
"Je comprends votre légitime volonté de sortir de l'indifférence la question du conflit israélo-palestinien", a déclaré Jérôme Guedj (PS), rejetant toutefois le terme "d'apartheid", lui reprochant de "racialiser et d'essentialiser" un "conflit de territoire", le transformant en "conflit entre les Juifs et les Arabes". Le reste de l'Assemblée s'est aussi prononcé contre, la présidente du groupe Renaissance Aurore Bergé dénonçant un "geste de détestation de l'État d'Israël", "d'offense" et "de diffamation", et fustigeant une "obsession" contre Israël.
Un terme "largement excessif et déplacé", estime Laurence Boone
"La France est l'amie d'Israël", a martelé ensuite Laurence Boone, secrétaire d'État chargée de l'Europe, rejetant un terme "largement excessif et déplacé". "Aujourd'hui l'antisémitisme est principalement à gauche", a lancé le député apparenté LR, Meyer Habib, dont la circonscription des Français de l'étranger comprend Israël, et qui est proche du Premier ministre Benjamin Netanyahu.
"Ce sont des insultes profondes" et des "attaques diffamatoires qui nous éloignent d'un chemin de paix", a fustigé Elsa Faucillon (PCF) dans une fin de séance tendue. "L'antisémitisme nous le vomissons, nous le haïssons", avait aussi lancé l'insoumis Aymeric Caron. "Ne confondons pas la critique de la politique du gouvernement israélien (...) avec l'antisémitisme", a appelé dans un communiqué la vice-présidente Renaissance de la commission des Affaires étrangères Mireille Clapot, seule députée de son groupe à s'être abstenue sur le texte. "Je reconnais le mérite à cette résolution d'avoir remis le sujet dans le débat public", a-t-elle justifié sans pour autant "adhérer à un contenu susceptible d'attiser les antagonismes dramatiques".