"Marianne, elle a le sein nu, parce qu'elle nourrit le peuple. Elle n'est pas voilée, parce qu'elle est libre", affirmait fin août Manuel Valls. Une sortie qui, en pleine polémique sur le burkini, n’avait pas manqué de faire réagir. Un mois et demi plus tard, c’est au tour de François Hollande d’invoquer, après son Premier ministre, l’un des symboles de la République. Là encore, à propos de la religion musulmane.
Petite phrase. Dans un livre publié mercredi aux éditions Stock et écrit par deux journalistes du Monde, Un président de la République ne devrait pas dire ça... , et dont L’Express publie ce mardi les bonnes pages, le chef de l’État utilise une allégorie particulièrement forte : "La femme voilée d'aujourd'hui sera la Marianne de demain".
Début de polémique ? Cette petite phrase, largement relayée, parfois sortie de son contexte, n’a pas manqué de faire réagir sur les réseaux différents responsables, principalement de droite, la plupart condamnant une déclaration jugée communautariste. "On aimerait avoir mal lu !", s’est notamment indignée Brigitte Kuster, maire LR du 17ème arrondissement de Paris dans un communiqué. L’élue évoque une "indécente déclaration" qui "met à mal la République" et invite le chef de l’État à "expliciter le fond de sa pensée". Louis Aliot, vice-président du FN, a quant à lui dénoncé ce qu'il considère comme une "pêche" à "l’électorat religieux extrémiste".
Hollande à la pêche de l'électorat religieux extrémiste ! Le grand remplacement électoral pour la gauche. https://t.co/hBqVO18JVU
— Louis Aliot (@louis_aliot) 11 octobre 2016
Non M. @fhollande, la femme voilée ne sera pas la #Marianne de demain ! https://t.co/aD6nCSF0DR
— les Républicains (@lesRepublicains) 11 octobre 2016
►RT si vous voulez l'alternance ! pic.twitter.com/U4uz21CnRS
Qu’a voulu dire François Hollande ? En vérité, cette phrase prononcée par le chef de l’État résume un développement plus long, également rapporté par les journalistes Gérard Davet et Fabrice Lhomme dans leur livre, où François Hollande imagine un idéal de société où la femme musulmane accepte d’elle-même de se débarrasser du voile, sans avoir à renoncer à sa foi.
"Si on arrive à lui offrir les conditions pour son épanouissement, elle se libérera de son voile et deviendra une Française, tout en étant religieuse si elle veut l'être, capable de porter un idéal. Finalement, quel est le pari que l'on fait ? C'est que cette femme préférera la liberté à l'asservissement. Que le voile peut être pour elle une protection, mais que demain elle n'en aura pas besoin pour être rassurée sur sa présence dans la société", argue le président de la République.
Islam et République. Plus largement, François Hollande donne aux deux journalistes du Monde son analyse de la place de l’islam dans la République, et trahit ainsi un positionnement relativement proche des idées défendues par son Premier ministre. "Qu'il y ait un problème avec l'islam, c'est vrai. Nul n'en doute. [...] Il y a un problème avec l'islam, parce que l'islam demande des lieux, des reconnaissances", affirme-t-il, avant de nuancer : "Ce n'est pas l'islam qui pose un problème dans le sens où ce serait une religion qui serait dangereuse en elle-même mais parce qu'elle veut s'affirmer comme une religion dans la République". Mi-août, Manuel Valls avait appelé les musulmans a faire preuve de "discrétion dans la manifestation de leurs convictions religieuses".
"Trop d'immigration". "Je pense qu'il y a trop d'arrivées, d'immigration qui ne devrait pas être là", lâche encore le président de la République. Des paroles qui ne manquent pas de surprendre, tant elles pourraient être empruntées à un responsable de l'opposition, la majeure partie des candidats à la primaire de droite appelant à la mise en place de quotas d'immigration.
L'identité Française. François Hollande revient également sur le débat autour de l’identité française. Celui qui estime que la France est d’abord "une idée", juge la thématique identitaire artificielle. Pour lui, il s’agit d'abord d’un débat lancé par Nicolas Sarkozy en vue de glaner des voix à l’extrême droite. "J'ai trouvé que c'était une complaisance à l'égard de l'électorat du Front - ça, c'était un calcul électoral -, mais c'était surtout penser que les Français devaient se déterminer par rapport à ces questions-là", confie le chef de l’État. "Je pense que, le sujet, il est par rapport aux Français : qu'est-ce qui fait que nous sommes, en France, même si nous habitons des territoires différents, liés par quelque chose qui nous dépasse ?", interroge-t-il.