La gauche perd une de ses grandes figures. Michel Rocard, l'ancien Premier ministre socialiste, est mort samedi à l'âge de 85 ans. Il est décédé dans un hôpital parisien, a précisé son fils.
Chef du gouvernement de François Mitterrand entre 1988 et 1991, on lui doit notamment le RMI (Revenu minimum d'insertion) et la CSG (Contribution sociale généralisée). Sous son mandat, il a également signé les accords de Matignon, mettant fin à des années de violences en Nouvelle-Calédonie, en 1988. Militant socialiste dès la fin des années 40, Michel Rocard a également été le théoricien de la "deuxième gauche", réformiste et décentralisatrice.
Passé à côté d'un destin présidentiel. Michel Rocard est cependant passé à côté d'un destin présidentiel, son rêve. Il a longtemps été convaincu d'entrer un jour à l'Elysée, précisant toutefois, en 1988, qu'"il y a un doute sur le quand". Mais François Mitterrand, son grand rival, l'en a empêché. On a même parlé de "haine tranquille" entre les deux hommes, qui ont entretenu des relations très difficiles, notamment lors du passage de Michel Rocard à Matignon. "Le mépris profond que je porte à son absence d'éthique est compatible avec l'admiration totale que j'ai pour sa puissance tactique", disait l'ancien Premier ministre.
"J'ai influencé la culture de la gauche", assurait-il. L'ancien énarque, fils d'un des scientifiques à l'origine de la bombe atomique française, affirmait pourtant n'avoir aucun regret et préférait retenir l'empreinte laissée au sein de la gauche. "J'ai influencé la culture de la gauche. J'ai été un Premier ministre porteur de tout un courant qui dépassait le PS, mais qui ne prenait pas l'ensemble du parti, sur le plan de la modernisation de la pensée économique de la gauche", avait-il soutenu au micro d'Europe 1, en février 2009. "J'ai contribué à des tâches qui dépassent largement la dimension d'un Premier ministre. Je ne suis pas sûr qu'être Président y aurait changé grand chose".
Un européen convaincu. S'il fut un esprit rassembleur, Michel Rocard a aussi divisé, notamment sur la question de l'immigration. Il avait ainsi affirmé à plusieurs reprises que la France ne pouvait "pas héberger toute la misère du monde". Une phrase qui reste. Mais l'ancien Premier ministre restera également comme un des plus grands défenseurs de la construction européenne. Député européen pendant 14 ans, entre 1994 et 2009, il a également été un éphémère Premier secrétaire du PS (1993-1994).
L'ancien député et sénateur avait cependant pris du recul ces dernières années. Consulté aussi bien par Nicolas Sarkozy que par François Hollande, Michel Rocard n'a pas hésité, fin juin, a vivement critiqué Emmanuel Macron et Manuel Valls. "Macron comme Valls ont été formés dans un parti amputé. Ils sont loin de l'Histoire", avait-il déclaré dans un long entretien à l'hebdomadaire Le Point. La dernière saillie d'une figure de la gauche française.