Ce ne sera pas un "super groupe" comme Marine Le Pen l'avait envisagé, mais en doublant ses effectifs la nouvelle formation emmenée par la Ligue italienne et le Rassemblement national se revendique comme la "première force souverainiste" au Parlement européen.
Le 5e groupe... et bientôt le 4e ?
Marine Le Pen et l'Italien Matteo Salvini, nouvel homme fort de l'extrême droite, avaient préparé le terrain en amont des élections, multipliant les rencontres pendant la campagne. Jeudi à Bruxelles, la première était présente, le second excusé, pour lancer cette nouvelle entité baptisée "Identité et démocratie" (ID). Avec 73 membres issus de 9 pays de l'UE, ID est actuellement la cinquième force au Parlement européen, derrière le PPE (droite, 179 eurodéputés), les sociaux-démocrates (153), Renew Europe (nouveau nom du parti centriste où siègent les partisans du président français Emmanuel Macron, 106) et les Verts-ALE (75). Il pourrait passer devant les Verts à la faveur d'une redistribution des sièges après le Brexit.
"Ce groupe est d'ores et déjà la première force souverainiste du Parlement européen", s'est félicitée Marine Le Pen lors d'une conférence de presse. Constitué principalement autour des délégations italienne de la Ligue (28 élus) et française du Rassemblement national (22 élus), ID a rallié les 11 Allemands de l'AfD (dont les représentants siégeaient dans le Parlement sortant au sein du groupe Europe de la liberté et de la démocratie directe, EFDD), les 3 Autrichiens du FPÖ, ainsi que des eurodéputés venus du Vlaams Belang belge, de République tchèque, du Danemark, de Finlande et d'Estonie. Il supplante le groupe Europe des nations et des libertés (ENL), 36 élus au sein du Parlement sortant.
"C'est vrai, on n'a pas pu constituer ce groupe grand et uni"
Le groupe n'a en revanche pas réussi à convaincre les Polonais du PiS, qui restent avec les conservateurs de CRE, les Espagnols de Vox, qui pourraient rejoindre CRE, ou le Parti du Brexit de Nigel Farage, grand vainqueur des européennes en Grande-Bretagne (29 élus). "C'est vrai, on n'a pas pu constituer ce groupe grand et uni, pour différentes raisons", a reconnu le président de ID, l'Italien Marco Zanni, citant "la question du Brexit qui ne s'est pas encore matérialisé" et qui "a pesé". Mais, a-t-il insisté, les "portes restent ouvertes". Le groupe "a vocation à grandir au fur et à mesure du mandat", a expliqué Marco Zanni.
De plus, ID table sur des "coopérations" ponctuelles sur certaines thématiques. "On pourra faire valoir nos 73 voix en coopération avec les délégations avec qui nous pourrons partager des batailles politiques communes, même si on ne fait pas partie des mêmes groupes politiques. Je pense que ce sera une constante des cinq années à venir vu le paysage politique issu de ces élections", a prédit Marco Zanni.
Selon Marine Le Pen, un "bloc souverainiste" de 200 voix ou plus pourrait ainsi avoir "une influence majeure sur les futurs équilibres", sur des sujets tels que la migration, par exemple avec des élus hongrois. Autre exemple selon Marine Le Pen : les "blocs qui vont se constituer contre la politique ultra-libérale menée par l'Union européenne". "Demain nous pourrions nous retrouver avec les Verts à voter contre les accords de libre-échange, comme nous l'avons fait d'ailleurs lors du dernier mandat", a-t-elle noté.
Déjà des divisions au sein du groupe ?
ID s'est constitué principalement autour de trois grands thèmes, a expliqué Marco Zanni: la sécurité, la migration et l'économie, en particulier la souveraineté budgétaire. Au-delà, certaines divergences de points de vue pourraient vite se faire sentir. "Nous sommes très imprégnés de l'idée que nous sommes des nations différentes, sur des sujets nous pouvons avoir des sensibilités différentes", a reconnu Marine Le Pen, interrogée sur des divergences au sein du groupe sur des questions comme l'orthodoxie budgétaire ou le soutien à la Russie.
"Mais sur les grands sujets qui intéressent les peuples en Europe aujourd'hui, nous avons une vision commune", a assuré Marine Le Pen. Leur priorité au Parlement sera d'obtenir ce qu'ils estiment leur revenir au vu des résultats: des postes clés au sein de l'institution, soit à la vice-présidence, soit au sein des commissions parlementaires.