Marine Le Pen retente sa chance dans le Pas-de-Calais, Jean-Luc Mélenchon en mission à Marseille, le ténor PS Jean-Christophe Cambadélis face au jeune secrétaire d'Etat Mounir Mahjoubi à Paris, des ministres-candidats qui jouent gros... Dans certaines circonscriptions, le combat va être rude et les poids-lourds de la politique auront fort à faire pour entrer ou rester à l'Assemblée.
Ces ministres qui jouent gros
- Marielle de Sarnez (MoDem-LREM) contre Pascal Cherki (PS), à Paris (11ème circonscription) :
Marielle de Sarnez, numéro 2 du MoDem et ministre chargée des Affaires européennes, affronte le sortant socialiste Pascal Cherki, ancien frondeur, proche de Benoît Hamon et élu avec 56,47% des voix en 2012. Un duel qui promet d'être serré, sans qu'un favori ne se dégage pour l'instant de l'opposition entre ces deux apparatchiks.
- Bruno Le Maire (LR-LREM) dans l'Eure (1ère circonscription) :
Bruno Le Maire arrivera-t-il à conserver son siège de député, et donc rester dans un gouvernement qui pourrait s'ouvrir davantage à la droite après les législatives ? Sa circonscription a plus voté pour Marine Le Pen que pour Emmanuel Macron au premier tour de l'élection présidentielle et Les Républicains ont placé un candidat face à lui après son entrée au gouvernement. Mais il bénéficie d'un bon ancrage local, élu avec 58% des voix face aux socialistes en 2012. Emmanuel Macron y a récolté 54,7% des suffrages le 7 mai dernier et, surtout, un sondage Ifop-Fiducial paru dans le JDD le place en tête au premier tour avec 48% des voix (76% des suffrages au second tour).
- Mounir Mahjoubi (LREM) contre Jean-Christophe Cambadélis (PS) à Paris (16ème circonscription) :
Scrutin à haut risque pour le premier secrétaire du Parti socialiste, Jean-Christophe Cambadélis, qui affronte le jeune secrétaire d'Etat macroniste Mounir Mahjoubi, dans une circonscription du Nord-Est de Paris tenue par la gauche depuis 1997, où "Camba" avait été confortablement élu avec 70% des voix il y a cinq ans. Si Mounir Mahjoubi, à peine 33 ans, venait à l'emporter, il ferait coup double : rester au Numérique dans le gouvernement Philippe, et précipiter la fin du PS tel qu'il existe aujourd'hui en battant son chef de file.
Trois autres ministres se présentent à ces législatives, dans des circonscriptions où ils semblent davantage en mesure de l'emporter que leurs collègues : Annick Girardin à Saint-Pierre-et-Miquelon, Richard Ferrand dans le Finistère et Christophe Castaner dans les Alpes de Haute-Provence. Pour ce dernier, la percée de Jean-Luc Mélenchon dans sa circonscription complique toutefois un peu les choses.
Ces poids-lourds partis au combat
- Marine Le Pen (FN) à Hénin-Beaumont dans le Pas-de-Calais (11ème circonscription) :
Elle a finalement décidé d'y aller après avoir longuement hésité : Marine Le Pen se présente dans une circonscription gagnable pour le Front national dans le Pas-de-Calais, qui comprend le fief frontiste de Hénin-Beaumont. Un territoire frappé par le déclin de l'industrie et des mines, dans laquelle elle avait perdu de très peu en 2012 : elle y avait récolté 49,89% des suffrages, à 118 voix du socialiste Philippe Kemel, qui se représente. Et bénéficie d'une bonne dynamique dans une circonscription où 58% des votants l'ont choisie au second tour de la présidentielle.
- Jean-Luc Mélenchon (LFI) contre Corinne Versini (LREM) et Patrick Mennucci (PS) dans les Bouches-du-Rhône (4ème circonscription) :
Il n'a pas véritablement d'attaches locales mais pourrait s'imposer sans trop de difficultés, comme le montrent les enquêtes d'opinion qui le créditent pour l'instant de 38% des suffrages. Jean-Luc Mélenchon, leader de la France insoumise, pourrait enfin décrocher un siège de député. Mais face à lui se dressent la candidate LREM Corinne Versini, créditée de 24% des suffrages, et le sortant socialiste Patrick Mennucci (13%). Ce dernier lui oppose la carte locale et lui reproche de faire preuve de "calculs politiciens". Au second tour, Jean-Luc Mélenchon serait élu avec 53% des suffrages contre 47% pour son adversaire macroniste.
- Najat Vallaud-Belkacem (PS) contre Bruno Bonnell (LREM) dans le Rhône (6ème circonscription) :
L'ancienne ministre Najat Vallaud-Belkacem est en difficulté face à l'entrepreneur Bruno Bonnell, macroniste de la première heure : il récolterait selon un sondage Ifop-Fiducial 30% des voix au premier tour contre 19% pour "NVB". L'homme d'affaires est donc favori à Villeurbanne, ville de gauche qui a largement voté pour Emmanuel Macron lors de l'élection présidentielle (27,7% au premier tour, 79,5% au second).
- Myriam El Khomri (PS) contre Caroline de Haas (DVG) à Paris (18ème circonscription) :
Aucun candidat En Marche! dans cette circonscription, mais un duel de gauche entre la socialiste tendance Macron Myriam El-Khomri et la militante féministe Caroline de Haas, notamment soutenue par EELV et Ensemble. Le candidat LR Pierre-Yves Bournazel pourrait jouer le rôle d'arbitre dans cette circonscription jusqu'à présent tenue par le socialiste Christophe Caresche.
- Manuel Valls (ex-PS) contre Francis Lalanne (suppléant SE) et Dieudonné (SE) dans l'Essonne (1ère circonscription) :
Comment Manuel Valls, ancien Premier ministre, va-t-il se sortir d'un match face à deux adversaires inattendus ? Le chanteur et écrivain Francis Lalanne, suppléant sans étiquette, tout comme l'humoriste controversé Dieudonné, veulent lui barrer la route, lui qui a remporté sa première élection législative en 2002 et qui s'appuie sur la période où il a été maire d'Evry (2001-2012). D'après un dernier sondage, l'ex-maire d'Evry est en ballottage avec la candidate de la France insoumise, avec 30% d'intentions de vote pour lui au premier tour contre 26% pour Farida Amrani, et un duel a priori extrêmement serré une semaine plus tard : le sondage Ifop-Fiducial dans le JDD évoque une possibilité égalité entre eux. Le perdant de la primaire de gauche bénéficie pourtant d'une absence de candidats LR et LREM face à lui. Ce qui le conduit à ne pas mener une véritable campagne dans l'Essonne.
Ces affrontements à droite...et à gauche
- Nathalie Kosciusko-Morizet (LR) face à Henri Guaino (dissident LR) et Jean-Pierre Lecoq (dissident LR) à Paris (2ème circonscription) :
Trois candidats de droite dans l'ancienne circonscription de François Fillon, remportée par LR avec 56,5% des voix en 2012. D'un côté, Nathalie Kosciusko-Morizet, officiellement investie par Les Républicains. La quatrième de la primaire de droite voit deux candidats dissidents de la droite s'opposer à elle : le député des Yvelines et ancien conseiller de Nicolas Sarkozy Henri Guaino, ainsi que Jean-Pierre Lecoq, maire du cossu 6ème arrondissement de Paris.
- Razzy Hammadi (PS) contre Alexis Corbière (LFI) en Seine-Saint-Denis (7ème circonscription) :
Un duel de "proches de" dans une circonscription marquée à gauche. D'un côté, le bras droit de Mélenchon et figure de la France insoumise, Alexis Corbière. De l'autre, le socialiste et fidèle hollandais Razzy Hammadi, qui espère conserver son siège en résistant à la "vague Mélenchon" dans le département (34% des voix au premier tour de l'élection présidentielle).
- Christophe Borgel (PS) contre Manuel Bompard (LFI) en Haute-Garonne (9ème circonscription) :
À 30 ans, le directeur de campagne de Jean-Luc Mélenchon, Manuel Bompard, espère ravir au Parti socialiste la circonscription toulousaine de Christophe Borgel, le "Monsieur élections" de Solférino. Au premier tour de l'élection présidentielle, la circonscription avait placé Jean-Luc Mélenchon en première position (27,58%).
Deux matches à trois explosifs
- Pascale Boistard (PS) contre François Ruffin (LFI) et Franck de Lapersonne (FN) dans la Somme (1ère circonscription) :
Deux candidats issus de la société civile à l'assaut d'un siège occupé par une ancienne secrétaire d'Etat. C'est le tableau de la première circonscription de la Somme, où Pascale Boistard affronte le comédien frontiste Franck de Lapersonne et le journaliste et réalisateur engagé de la France insoumise, François Ruffin. A l'élection présidentielle, Marine Le Pen était arrivée largement en tête au premier tour avec 28,8% devant En Marche! (22,9%) et la France insoumise (21,7%). Mais au second tour, Emmanuel Macron avait récolté 57,5% des voix.
- Cécile Duflot (EELV-PS) contre Nawel Oumer (dissidente PS) et Danielle Simonnet (LFI) à Paris (6ème circonscription) :
Bataille de gauche à l'Est de Paris. Sortante et officiellement soutenue par le Parti socialiste, l'écologiste Cécile Duflot se mesure à la dissidente socialiste Nawel Oumer, qui n'a pas digéré le choix de la fédération PS de Paris d'accorder l'investiture à l'ancienne ministre du Logement. Cécile Duflot trouvera également sur sa route Danielle Simonnet, cadre de la France insoumise.
Les circonscriptions de Macron et Philippe
- L'ancienne circonscription d'Edouard Philippe (LREM) au Havre, en Seine-Maritime (7ème circonscription) :
La circonscription du Havre penche plutôt à gauche (Mélenchon y est arrivé en tête le 23 avril, avec 23,8%, devant En Marche! à 23,6%, LR à 19,9% et le FN à 19,3%), mais elle pourrait rester dans le giron de son ancien député et nouveau Premier ministre issu des Républicains, Edouard Philippe. Aucun sondage n'est disponible pour cette circonscription, mais une triangulaire devrait favoriser le candidat de la majorité présidentielle.
- Le fief d'Emmanuel Macron au Touquet dans le Pas-de-Calais (4ème circonscription) :
Il avait failli se présenter sous l'étiquette socialiste aux législatives en 2007. Emmanuel Macron s'était finalement ravisé mais, dix ans plus tard, pourrait voir cette circonscription tenue par le trésorier de LR, Daniel Fasquelle, basculer dans l'escarcelle de La République en marche : le FN (27,2%) a devancé En Marche! (23,4%) et Les Républicains (22,1%) au premier tour de l'élection présidentielle, avant une inversion des tendances au profit d'Emmanuel Macron le 7 mai (57,2%). Là aussi, une triangulaire pourrait permettre au candidat macroniste de battre Daniel Fasquelle.