Alain Juppé va quitter la mairie de Bordeaux pour faire son entrée au Conseil constitutionnel. Avec lui, disparaît l'un de ceux qui avaient fixé une digue étanche entre la droite républicaine et l'extrême droite. Cette étanchéité absolue était l'un des fils à plomb de l'engagement politique d'Alain Juppé.
L'union de la droite et du centre. Il faut se souvenir qu'en 2002, c'est Alain Juppé qui crée l'UMP, dans la foulée du séisme du 21 avril qui a vu Jean-Marie Le Pen se hisser au second tour de l'élection présidentielle, face à Jacques Chirac. Cette réunification de la droite et du centre se voulait alors une réponse au danger du Front national.
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"Éviter à la France le malheur du FN". Et depuis, Alain Juppé n'a jamais dérogé ni à cette conviction, à savoir que les valeurs des deux camps étaient trop éloignées pour se rapprocher, ni à cette stratégie s'opposant à toute alliance possible avec le FN. D'ailleurs, quand son parti choisira au fil des élections le "ni-ni", c'est-à-dire le ni PS, ni FN, Alain Juppé sera celui qui, à plusieurs reprises, préférera appeler à faire battre le candidat frontiste. La dernière fois que ce cas de figure s'est présenté, c'était lors de la présidentielle de 2017. Il appelle alors sur son blog ses compatriotes à voter pour Emmanuel Macron, le seul selon lui "à pouvoir éviter à la France le malheur du FN", quand d'autres, comme Laurent Wauquiez, refuse de choisir.
Une famille politique qui a perdu ses valeurs ? C'est cela, qu'il considère comme une dérive des siens, sur les valeurs, mais aussi sur l'Europe également, qui a surtout poussé Alain Juppé à quitter Les Républicains. Il le rappelait encore le mois dernier lors de ses vœux, parlant de transfusion régulière "entre la droite et l'extrême droite". "Je me demande qui j'entends à la radio, un membre de LR ou un membre du RN", disait-il. De quoi jeter une pierre dans le jardin de Laurent Wauquiez qui, pour l'instant, n'a jamais franchi le Rubicon. "Pas d'alliance", répète-t-il à chaque élection. Mais avec la retraite politique d'Alain Juppé, c'est peut-être aussi le sac de sable qui tenait la digue qui part…