Le Conseil des ministres extraordinaire, réuni ce mardi à 14h30 à la demande du président François Hollande, a autorisé Manuel Valls à recourir à l'arme constitutionnelle du 49.3 pour faire adopter sans vote le controversé projet de loi Travail. Le Premier ministre l'a utilisé dès mardi après-midi.
Les infos à retenir :
- Manuel Valls a obtenu l'accord des ministres pour recourir au 49.3
- Il l'a utilisée dès mardi, engageant la responsabilité de son gouvernement
- Une motion de censure a été déposée par LR et l'UDI
"Aujourd'hui, j'exprime et nous exprimons clairement une fronde contre la division", a lancé le chef du gouvernement, en visant les députés socialistes frondeurs opposés au texte. "Poursuivre le débat parlementaire fait courir le risque de revenir sur l'ambition du projet de loi, de renoncer à sa cohérence, d'abandonner le compromis que nous avons construit et d'offrir le spectacle désolant de la division et des postures politiciennes du à une minorité de blocage", a-t-il plaidé.
"Parce que le pays doit avancer". Le Premier ministre a donc engagé la responsabilité du gouvernement devant les députés "avec responsabilité et avec confiance", alors que la droite s'agitait dans l'hémicycle. L'exécutif a décidé de recourir à cette arme constitutionnelle "parce que la réforme doit aboutir, parce que le pays doit avancer, parce que les relations salariales et les droits des salariés doivent progresser", a argué le chef du gouvernement, qui sera l'invité du JT de TF1, mardi soir.
Passage en force. L'article 49.3 permet à l'exécutif d'adopter un texte sans vote avec engagement de la responsabilité du gouvernement. Il a été utilisé à trois reprises en 2015 sur le projet de loi Macron face aux blocages à gauche. Dénonçant "la conjonction des oppositions" qui "peuvent bloquer le texte" et le "spectacle" donné par les débats houleux lundi soir à l'Assemblée, le Premier ministre a une nouvelle fois défendu "un texte élaboré collectivement qui est un bon texte pour le pays, et surtout un acte de confiance dans le dialogue".
Inquiétudes à gauche. "Il est un pari dans la capacité des partenaires sociaux à le faire vivre et il est une affirmation tout simplement de notre vision de la démocratie sociale", a dit Manuel Valls au sujet de ce projet de loi qui suscite des manifestations menées par la CGT et FO, opposées au texte. Le Premier ministre a de nouveau dit "assumer" son désaccord avec ces deux centrales syndicales sur le rôle renforcé des accords d'entreprise que doit permettre la loi, qui suscite des inquiétudes à gauche et dans le camp syndical sur des reculs des droits des salariés.
Concessions de l’exécutif. Dans le projet de loi Travail soumis au 49.3, le gouvernement renonce à rétrécir le périmètre géographique d'appréciation des licenciements économiques et à surtaxer les CDD, selon l'entourage de Manuel Valls. En revanche, sur l'article 2 du texte, considéré comme son "cœur nucléaire", d'après ces mêmes sources, l'exécutif ne retient pas l'ultime "compromis" du rapporteur Christophe Sirugue sur les accords d'entreprise.
Une motion de censure LR et UDI. Les députés LR et UDI ont déposé une motion de censure contre le gouvernement, dénonçant "l'impasse dans laquelle François Hollande a mené (le) pays". La droite, qui avait annoncé par avance cette initiative, a usé de cette prérogative bien avant la fin des 24 heures imparties par l'article 49.3. Cette motion de censure sera débattue jeudi à l'Assemblée. "Tout est fait pour précipiter les choses dans l'affolement, la peur des manifestations", a dénoncé le chef de file des députés LR Christian Jacob, qui aurait préféré un débat mardi prochain, jour initialement prévu pour le vote solennel du texte, où les députés auraient sans doute été plus nombreux.
Mélenchon appelle à la voter. De son côté, le cofondateur du Parti de gauche Jean-Luc Mélenchon a également appelé à voter la motion de censure. "Fin de règne crépusculaire : le recours au 49-3 pour passer sans débat et sans majorité la loi El Khomri contre le droit du travail! Qui veut l'empêcher doit voter la censure!", a estimé le candidat à l'élection présidentielle dans un court communiqué. Les communistes, emmenés par Pierre Laurent et André Chassaigne, appellent aussi à censurer l'exécutif. De son côté, le secrétaire d'Etat aux Relations avec le parlement, Jean-Marie Le Guen, a jugé "inconcevable" que des députés PS votent la censure avec la droite.