Au deuxième jour de son déplacement en Corse, Emmanuel Macron a poursuivi sur le même ton qu’au premier : la ligne de la fermeté face à la pression des nationalistes. Le chef de l’Etat a certes accepté de voir la Corse mentionnée dans la Constitution, dont la réforme sera soumise au Parlement au printemps. Mais comme mardi, lorsqu’il a refusé d’envisager l’amnistie des prisonniers de l’île, le chef de l’État a exclu toute perspective d’indépendance, mercredi, à Bastia. "La Corse est au cœur de la République", a-t-il ainsi affirmé dès les premières minutes de son allocution.
Un statut de résident, c’est "la flambée des prix". Dans un discours d’un peu plus d’une heure, le président de la République a multiplié les rappels aux lignes rouges qui sont les siennes en matière d’évolution de la collectivité unique de Corse, née le 1er janvier. "Elle n’existe depuis même pas un mois et demi" et "il vous faut déjà assumer vos responsabilités nouvelles", a-t-il quasiment ordonné à Jean-Guy Talamoni, président indépendantiste de l’Assemblée territoriale, et de Gilles Simeoni, le président autonomiste du Conseil exécutif, le "gouvernement corse".
Sur le statut de résident corse, destiné selon les nationalistes à freiner l’explosion du prix de l’immobilier, Emmanuel Macron a aussi opposé une fin de non-recevoir il n’y aura pas non plus de statut de résident corse. "La mise en oeuvre d’un statut de résident, ce n’est pas la bonne réponse", a-t-il avancé. "Cela créerait encore plus des effets de rente, (…) le rationnement, la flambée des loyers. (…) Ce serait contraire à notre Constitution et au droit européen."
Une fiscalité corse signifierait "moins de dotations". Avant la visite présidentielle, les dirigeants de la collectivité de Corse avaient insisté sur la nécessité d’une autonomie plus grande dans le fonctionnement de l’île, sur le plan des impôts, entre autres. "J’entends la demande de la refonte totale du modèle fiscal. Mais il faut être lucide : plus il y aura de fiscalité transférée, moins il y aura de dotations", a-t-il rappelé, défendant la "solidarité nationale" face aux velléités fiscales des deux têtes de l’exécutif local.
" Dans la République française, il y a une langue officielle, et c’est le français "
"Le bilinguisme, ce n’est pas la co-officialité de la langue corse", a-t-il également tonné. Là aussi, Jean-Guy Talamoni et Gilles Simeoni attendaient un geste de l’Élysée, eux qui avaient déjà été déçus par leur entrevue avec Édouard Philippe, en janvier. Paris ne bougera sans doute plus sur cette question, à en croire les propos définitifs d’Emmanuel Macron mercredi après-midi : "Dans la République française, il y a une langue officielle, et c’est le français."
Les nationalistes, des "ennemis" ? Reste malgré tout le souhait présidentiel de voir la Corse mentionnée dans la Constitution, via la réforme de l’article 72 qui traite des collectivités à statut particulier. Une main tendue, qui ressemble pourtant à une mise en garde d’Emmanuel Macron, pour qui vouloir aller plus loin que la reconnaissance des "spécificités corses" reviendrait à endosser les habits d’un "ennemi de la République". Un ennemi qui guiderait l’île et ses habitants "vers des vents mauvais" en menant le combat nationaliste. Gilles Simeoni et surtout Jean-Guy Talamoni sont prévenus : la réforme de la Constitution sera sûrement le premier et le dernier geste institutionnel d’Emmanuel Macron à destination de la Corse.