Accélérer sur la voiture électrique, rénover les logements, freiner sur les chaudières au gaz... : après plusieurs mois d'atermoiements, Élisabeth Borne a réuni lundi les chefs de partis politiques à Matignon pour présenter la "planification écologique" du gouvernement, sur laquelle la gauche s'est déjà montrée déçue. La Première ministre a souhaité en début de réunion, peu après 10H30, évoquer "les enjeux" de cette planification alors qu'Emmanuel Macron a fait de l'urgence climatique une priorité de son second mandat.
Ce rendez-vous à huis clos vise à débattre des solutions pour une transition écologique "juste" et non "punitive", explique-t-on à Matignon. Mais les principales annonces attendront et devraient être réservées à une prise de parole d'Emmanuel Macron, aux contours encore flous, prévue, selon l'Elysée, le 25 septembre. Les responsables de l'exécutif "ne sont pas partis pour avoir la moyenne" à leur "oral de rattrapage", a jugé à son arrivée la secrétaire nationale d'EELV Marine Tondelier, qui avait déploré que l'écologie n'avait pas assez été abordée lors de la rencontre de Saint-Denis autour d'Emmanuel Macron fin août.
"Le compte n'y est pas" d'après les documents reçus en amont du rendez-vous, a estimé le patron du Parti socialiste Olivier Faure, qui "craint (une) planification du vide", tandis que le chef du Parti communiste Fabien Roussel est arrivé "sans illusions", désireux aussi de "faire baisser la facture" d'électricité et de gaz.
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LFI absente des discussions
Étaient aussi présents Éric Ciotti (LR), Hervé Marseille (UDI), et Laurent Hénart (Parti radical). Les représentants des partis de la majorité François Bayrou (Modem), Édouard Philippe (Horizons), Stéphane Séjourné (Renaissance) étaient déjà à Matignon pour une bilatérale en début de matinée avec la Première ministre sur la rentrée parlementaire. Le Rassemblement national était représenté par la députée européenne Mathilde Androuët. Mais la France insoumise n'a pas envoyé de représentant, son coordinateur Manuel Bompard dénonçant "une nouvelle opération de communication sans effet" après la rencontre de Saint-Denis.
L'exécutif entend ouvrir une "séquence" d'une dizaine de jours sur le sujet: ce "débat politique" lundi à Matignon, un échange entre Elisabeth Borne et les membres du Conseil national de la refondation mardi, un "événement" autour d'Emmanuel Macron, et la présentation du projet de budget 2024 le 27 septembre en Conseil des ministres. En juillet, le gouvernement avait reporté la présentation de cette feuille de route, percutée par les émeutes puis le remaniement.
Il promet désormais un plan "très concret" et "très opérationnel" afin "d'être au rendez-vous européen" de la baisse de 55% des émissions nettes de gaz à effet de serre en 2030 par rapport à 1990, et de se "projeter vers la neutralité carbone en 2050". Dès le projet de budget 2024, l'exécutif devra expliquer comment il entend répartir les 7 milliards d'euros supplémentaires promis. Le gouvernement pourrait entre autres financer une hausse du bonus écologique pour l'achat de véhicules électriques, associée à un malus étendu lors de l'acquisition des voitures les plus polluantes.
Chaudières, RER et les logements
Il promet aussi des réponses sur le financement des RER métropolitains dans une dizaine de villes de France, objet d'une proposition de loi en cours d'examen au Parlement. Des mesures sont également attendues dans le secteur du logement, pour des rénovations énergétiques plus "performantes", a laissé entendre le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu dimanche. D'ici 2030, le gouvernement souhaite en outre parvenir "à supprimer 75% des chaudières au fioul", et "baisser d'environ 20% les chaudières au gaz (hors pompes à chaleur hybrides)", selon un document transmis à la presse daté de juillet. Industrie et agriculture sont également au menu.
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Les sujets de crispation ne manqueront pas, notamment sur l'articulation entre écologie et pouvoir d'achat, long et court terme, au moment où les prix de l'énergie et du carburant sont au cœur des débats. À droite, LR a déjà demandé au gouvernement l'organisation d'une "conférence sur les prix de l'énergie" qui flambent. Dimanche, les oppositions ont critiqué l'annonce d'Elisabeth Borne d'autoriser les distributeurs à vendre du carburant "à perte" pour "baisser davantage les prix". C'est une "plaisanterie", a grincé Manuel Bompard, réclamant un blocage des prix.
Le gouvernement pourrait aussi se prononcer sur l'avenir, incertain, du projet de loi de programmation sur l'énergie et le climat (LPEC), censé fixer les grands objectifs de la politique énergétique française. A priori, le texte n'est pas attendu avant Noël et la fin de l'examen du budget, selon une source ministérielle.