Le ministre de l'Intérieur Gérard Darmanin a ordonné mercredi soir l'instauration pendant deux mois d'un couvre-feu pour les mineurs de moins de 18 ans à Point-à-Pitre afin de lutter contre une flambée de la délinquance. La mesure "va s'appliquer à partir du début de la semaine prochaine" afin de lutter contre "une délinquance qui (...) est de plus en plus jeune, et de plus en plus armée", a déclaré Gérald Darmanin lors d'une conférence de presse à Pointe-à-Pitre, où il est en déplacement.
Une mesure effective à partir de 20 heures
Cette mesure sera effective les soirs, à partir de 20 heures. "On ne peut pas laisser circuler des enfants de 12, 13, 14 ans, avec des armes, circuler à 22 heures dans la rue, s'en prendre à des policiers, s'en prendre à des touristes, s'en prendre à des passants", a-t-il ajouté.
Le maire de Pointe-à-Pitre Harry Durimel (EELV), qui avait qualifié la ville de "coupe-gorge" en "faillite totale" fin mars, s'est félicité de l'annonce du ministre de l'Intérieur. "Voilà quelque chose de concret", a-t-il réagi. "Avant c'était 12% de mineurs dans la commission des délits et maintenant c'est 38% des faits délictueux", a détaillé M. Durimel, élu depuis 2020. "Si les enfants sont chez leurs parents la nuit, ils ne vont pas brûler 70 poubelles comme ils l'ont fait à Pointe-à-Pitre la semaine dernière", a-t-il estimé.
Le maire de Pointe-à-Pitre avait menacé de démissionner
Le 24 mars, dans un contexte de violences urbaines et d'une série d'actes de violence armés, parfois mortels, il avait menacé de démissionner. "J'ai le sentiment que le cri que j'ai poussé il y a quelques semaines a été entendu", a-t-il déclaré à l'AFP, évoquant la possibilité de "faire de Pointe-à-Pitre, un petit territoire de 2,6 km2, un laboratoire de sécurité républicaine".
Le ministre de l'Intérieur a fait l'annonce du couvre-feu après une réunion avec la ministre déléguée chargée des Outre-mer Marie Guévenoux, le Préfet et le maire de Pointe-à-Pitre.
Des opérations "place nette"
Une série de mesures pour renforcer la lutte contre la délinquance accompagnera le couvre-feu. Gérald Darmanin a ainsi annoncé pour le mois prochain des "opérations place nette de lutte contre la drogue, contre des points de deal et la circulation des armes, qui est sans doute le problème principal que connaît la Guadeloupe aujourd'hui". Un "nouveau contrat de sécurité en Guadeloupe" sera aussi mis en place, à l'image de ce qui a été fait en Martinique et "qui marche bien, qui a fait baisser la délinquance", selon lui.
Le ministre a également évoqué "une coopération internationale" avec les îles voisines de Sainte-Lucie et la Dominique pour "lutter contre l'immigration irrégulière, la circulation des armes, le trafic de drogue". Il a également annoncé la présence de plus de "caméras de vidéo protection", connectées "aux centres de supervision de la police".
Selon la préfecture de Guadeloupe, l'archipel compte "six fois plus d'homicides, neuf fois plus de tentatives d'homicides - dont la moitié par armes à feu - et 20 fois plus de vols à main armée que la moyenne nationale". Ces derniers mois, Pointe-à-Pitre - 14.500 habitants en 2020 - a largement nourri la chronique des faits divers. En mars, une commerçante y a été tuée lors d'un braquage. Des touristes en croisière ont été blessés à l'arme blanche par une femme atteinte de troubles psychiatriques.