C'est la conclusion de trois semaines de débats acharnés et de compromis avec la droite : l'Assemblée nationale a adopté définitivement jeudi le second volet du paquet de mesures en faveur du pouvoir d'achat, avant le Sénat en fin de journée. Pour le ministre de l'Économie Bruno Le Maire, c'est "une victoire politique" et "la démonstration que nous avançons"... mais parfois dans la douleur.
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Un premier test pour la nouvelle méthode de l'exécutif
Le pouvoir d'achat était un sujet clé de la campagne présidentielle et a constitué le premier gros morceau de la mandature, en forme de test pour la "nouvelle méthode" de l'exécutif, privé de majorité absolue au Palais Bourbon et qui s'est tourné vers la droite pour faire l'appoint des voix.
Après un premier volet validé mercredi comprenant 20 milliards d'euros de dépenses, c'est au tour du projet de budget rectifié pour 2022 et son nouveau lot de mesures face à l'inflation d'être soumis au vote ultime. L'Assemblée nationale l'a approuvé par 292 voix pour, 120 contre et 98 abstentions. Outre la majorité, la plupart des députés LR se sont prononcés pour, en se proclamant "la seule opposition utile aux Français". Les élus RN se sont abstenus, arguant ne pas vouloir "entraver" les quelques "avancées" portées.
Les sénateurs ont approuvé le budget rectifié pour 2022 par 233 voix contre 97, avec le soutien notamment de LR, des centristes et du groupe RDPI à majorité En Marche. La gauche a voté contre.
La baroud d'honneur de la gauche qui a voté contre
Les députés de gauche ont voté contre, après un baroud d'honneur des socialistes via une ultime motion de rejet contre les "miettes" proposées. En référence à l'abolition des privilèges lors de la nuit du 4 août 1789, la patronne du groupe LFI Mathilde Panot a demandé en cette date anniversaire : "qu'en reste-t-il ?", dénonçant la "régénérescence d'une société de castes". Au cours de cette dernière séance à nouveau houleuse où les invectives ont fusé, le ministre des Comptes publics Gabriel Attal a lui critiqué une "dérive malheureuse d'une certaine gauche passée à l'extrême".
Le projet de budget ouvre 44 milliards d'euros de crédits, dont 9,7 pour financer la renationalisation à 100% d'EDF. Sont programmées la revalorisation du point d'indice des fonctionnaires, la suppression de la redevance audiovisuelle, la poursuite du bouclier tarifaire sur l'énergie et de la remise carburant à 30 centimes le litre en septembre-octobre puis 10 en novembre-décembre.
Un terrain d'entente entre la majorité et la droite
Entre la majorité présidentielle et la droite, un terrain d'entente a été trouvé mercredi soir en commission mixte paritaire, notamment sur le sujet polémique de monétisation des RTT, que le Sénat voulait pérenniser. Ce rachat par les entreprises volontaires des RTT des salariés, pour ceux prêts à travailler plus, sera finalement possible jusque fin 2025.
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Concernant la prime de rentrée exceptionnelle, que le Sénat voulait réserver aux travailleurs modestes et non aux minima sociaux, ce qui a suscité un tollé à gauche, là aussi un compromis a été acté. La prime sera versée aux bénéficiaires des minima et également à ceux touchant la prime d'activité.
"Le retour du travailler plus pour gagner plus"
Aux yeux de la députée LR Véronique Louwagie, "c'est le retour du travailler plus pour gagner plus", un slogan de Nicolas Sarkozy. Pour son vote favorable jeudi en fin de journée, le patron des sénateurs LR Bruno Retailleau avait posé comme condition le maintien d'un autre ajout du Sénat, sur la mise en place d'une carte Vitale biométrique. Cela a été le cas, pour lutter contre la fraude.
Mais il n'y aura pas de taxe sur les "superprofits" des grands groupes, comme réclamé à gauche, à l'extrême droite et par certains centristes. Bruno Le Maire a martelé son opposition au "réflexe pavlovien de la taxe". L'idée d'une supertaxe, déjà appliquée en Grande-Bretagne ou en Italie, et réclamée par le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, avait été relancée par le bénéfice net engrangé par TotalEnergies au deuxième trimestre, plus que doublé, à 5,7 milliards de dollars. Le débat devrait ressurgir à l'automne.
500 millions d'euros de dépenses ajoutés
Dans le projet de loi de finances rectificative pour 2022 figure en outre un soutien aux collectivités, avec une enveloppe totale chiffrée finalement à 600 millions d'euros. Bruno Le Maire a tenté de serrer les cordons des finances publiques, mais il a dû céder à plusieurs reprises après des couacs pour les macronistes à l'Assemblée, ou des votes contre son gré au Sénat. Quelque 500 millions d'euros de dépenses ont été ajoutés finalement.
Le premier volet en faveur du pouvoir d'achat, qui a obtenu le feu vert du Parlement mercredi, inclut lui le triplement du plafond de la prime Macron pouvant être versée par les employeurs, l'augmentation de 4% des retraites et de plusieurs allocations, ainsi que la "déconjugalisation" de l'allocation adultes handicapés - ajoutée dans un rare moment de consensus à l'Assemblée.
"C'est le quotidien de nombreux concitoyens qui va être amélioré", a applaudi Emmanuel Macron. "La culture du compromis se construit. C'est ce que les Français nous demandent", selon la Première ministre Elisabeth Borne. Ces derniers scrutins jeudi marquent la pause des travaux jusqu'à la rentrée. Il n'y aura pas de session extraordinaire en septembre pour la première fois depuis vingt ans, illustration de la volonté de mieux préparer les textes en amont.