Depuis le 19 janvier, les manifestations de masse contre la réforme des retraites s'enchaînent pendant que le texte est examiné par l'Assemblée nationale. Deux nouvelles dates sont prévues, ce samedi et le jeudi 16 février. Malgré la pression de la rue et de l'opposition, le gouvernement ne plie pas. Face à ce qui pourrait bientôt ressembler à une impasse, l'intersyndicale évoque de plus en plus ouvertement l'option d'un mouvement plus dur, avec des grèves reconductibles voire des blocages dans les semaines à venir. Une question se pose : Laurent Berger, qui semblait dicter le tempo syndical jusqu'ici, est-il vraiment prêt à embarquer la CFDT dans cette stratégie risquée ?
En tout cas, le discours de Laurent Berger a changé. Avant le 31 janvier, il tenait ce discours : "Le durcissement à tout crin, c'est perdre une partie de l'opinion. La CFDT, elle n'est pas pour appeler à la grève reconductible". Mardi, en tête de cortège, le leader de la CFDT était beaucoup moins catégorique : "Rien n'est exclu, sauf ce qui atteindrait les gens ou les biens. Nous, on restera dans la légalité, toujours. Il faut qu'on fasse une grosse mobilisation samedi, après on verra ce qu'il convient de faire".
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"Revirement culturel"
Si le gouvernement ne renonce pas, Laurent Berger pourrait donc appeler à des grèves reconductibles dans les transports ou l'énergie, par exemple, quitte à pénaliser les Français, ce à quoi il se refusait catégoriquement jusqu'ici. Selon le politologue Dominique Andolfatto, c'est un virage majeur pour le patron du syndicat réformiste". "Là, c'est comme un revirement culturel qui pourrait se dessiner, alors que la CFDT a patiemment sculpté son ADN réformiste depuis une trentaine d'années. C'est un crève coeur pour le gouvernement : non seulement il n'a pas retourné la CFDT qui n'a pas soutenu sa réforme, mais en plus elle pourrait évoluer vers un mouvement plus dur", souligne-t-il.
Reste à savoir quand ce virage pourrait s'opérer, avec le début de potentielles grèves reconductibles à l'appel des syndicats. Peut-être dès le 8 mars, le premier mercredi après la fin des vacances scolaires comme le propose le syndicat Solidaires. D'ici là, l'intersyndicale appelle à manifester samedi et jeudi prochains. Et pour rappel, la durée d'examen du texte par le parlement est limitée à 50 jours, du fait de l'utilisation de l'article 47.1 de la Constitution par le gouvernement. Après, l'Assemblée, ce sera au Sénat d'examiner le texte jusqu'au dimanche 12 mars. Le parlement a jusqu'au 26 mars, au plus tard, pour se prononcer sur la réforme des retraites.