Le secrétaire général de l'Élysée, Alexis Kohler, est visé par une plainte pour "prise illégale d'intérêt", "trafic d'influence" et "corruption passive" déposée vendredi au parquet national financier par l'association Anticor, a-t-on appris lundi auprès de l'avocat de l'association, confirmant une information de RTL et du Monde.
Poste d'administrateur contesté. L'association anticorruption, s'appuyant sur des articles de Médiapart, dénonce les liens familiaux et professionnels étroits qui existent entre le bras droit du président Emmanuel Macron et l'armateur italo-suisse MSC, client important des chantiers navals français de Saint-Nazaire. Client unique des chantiers certaines années, l'armateur a joué un rôle essentiel dans les discussions sur leur avenir menées avec l'Etat français.
Or dans sa plainte, Anticor reproche d'abord à Alexis Kohler d'avoir accepté de siéger comme représentant de l'État au conseil d'administration de STX France de 2010 à 2012 alors qu'il "ne pouvait ignorer qu'il existait un conflit d'intérêt", l'armateur MSC ayant été fondé et dirigé par les cousins de sa mère. Le parquet national financier a décidé d'ouvrir une enquête sur ces accusations.
Soupçon de conflit d'intérêt dans le dossier STX. Pour démontrer ces liens étroits, Anticor rappelle que ce haut fonctionnaire a voulu à deux reprises rejoindre l'armateur après avoir été directeur adjoint de cabinet au ministère de l'Économie. La première fois, en avril 2014, la commission de déontologie s'y était opposé. En août 2016, quand Emmanuel Macron avait quitté Bercy, Alexis Kohler avait finalement obtenu un feu vert et avait rejoint MSC Croisières au poste de directeur financier. Resté membre actif de la campagne d'Emmanuel Macron, il avait quitté l'armateur après l'élection présidentielle neuf mois plus tard pour devenir secrétaire général de l'Élysée.
Sur cette période, Anticor soupçonne Alexis Kohler d'être intervenu comme cadre de MSC dans une réunion à Bercy en mars 2017 sur la reprise de STX France, alors en faillite. STX France avait finalement fusionné avec son concurrent italien Fincantieri mais MSC n'était pas monté au capital du groupe comme envisagé. Interrogé par Médiapart, Alexis Kohler a déclaré qu'il a "toujours informé sa hiérarchie des situations dans lesquelles il aurait pu se trouver en conflit d'intérêts" et "s'est toujours déporté pour éviter lesdites situations".
Pas une "affaire". Lundi matin, Christophe Castaner a refusé de parler d'"affaire" Alexis Kohler. "Je ne qualifie pas d'affaire le fait qu'une structure, Anticor, qui est habituée à cela, multiplie les initiatives et les perde souvent", a répondu sur Public Sénat le délégué général de la République en Marche à la question de savoir s'il était au courant de cette "affaire". Christophe Castaner a cependant jugé "normal" qu'Anticor "puisse saisir la justice si elle a un doute".