Ne pas travailler nuit gravement à la santé. Selon une étude parue la semaine dernière, le risque de suicide est plus élevé chez les chômeurs. Sans aller jusque-là, certains personnes ayant perdu leur emploi sombrent dans la dépression ou ont des accès de déprime. D'autres souffrent d'hypertension ou développent des maladies chroniques. Comment préserver sa santé lorsqu'on est au chômage ? Nous avons posé la question à Michel Debout, médecin et auteur du Traumatisme du chômage*.
Eviter le "syndrome de la robe de chambre". Paresser chez soi en jogging ou en pyjama n'est clairement pas une bonne stratégie pour Michel Debout. "Cette nonchalance, ce 'syndrome de la robe de chambre' est souvent le contrecoup de la cassure avec le quotidien d''avant' : la journée organisée, pleine de rendez-vous et d'obligations", explique-t-il. Mais si, en soi, ne rien faire une journée de temps en temps n'a rien de négatif, s'installer dans une telle routine au quotidien n'est pas sans risque de "perte d'élan", estime le médecin. "Cela peut annoncer un repli sur soi voire une dépression", met en garde l'auteur du Traumatisme du chômage.
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Consulter un médecin. Michel Debout regrette que la consultation d'un médecin dans les deux à trois mois suivant la perte d'un emploi ne soit pas institutionnalisée. A défaut, il recommande à tous les chômeurs d'effectuer cette démarche : "il n'est pas question de considérer la personne au chômage comme 'malade' mais de prendre en considération sa situation de personne qui traverse une période à risque pour sa santé", explique le médecin. Outre les risques pour la santé psychologique générés par le traumatisme du chômage, les risques pour la santé en général sont, en effet, bien réels (troubles cardiaques, hypertension…). "Il est important de confier à un médecin ce que l'on traverse : l'anxiété, la perte d'appétit, les troubles du sommeil, le cafard…", détaille le médecin.
Rythmer ses journées et provoquer les rencontres. "Il ne s'agit pas forcément de rechercher du travail 8 heures par jour mais de s'occuper par diverses activités", explique Michel Debout. "Etre actif permet de ne pas se dévaloriser. Il faut à tout prix éviter le 'je ne fais rien donc je ne sers à rien'", poursuit le médecin. Activités sportives ou associatives, course à pied, marche ou balade, pratique d'un sport collectif ou sortie culturel, le principe est de "maintenir son esprit dispo et en éveil". Le médecin recommande aussi de "provoquer des rencontres" : "si vous voulez prendre un café, par exemple, plutôt que de rester chez vous, sortez et allez le boire au café où vous aurez un échange relationnel".
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Ne pas se réfugier dans l'alcool ou le tabac. Les personnes au chômage ont plus de risques de développer des comportements addictifs. "L'alcool, le tabac et les autres substances addictives sont de faux amis", met en garde Michel Debout. Dans un premier temps, ces substances procurent, en effet, plaisir, confiance en soi, énergie, courage… mais "c'est une fausse réponse", insiste le médecin : "au-delà des ces apparents effets positifs à court terme, les besoins finissent par se renforcer et au final il y a des effets dépressogènes", avertit-il.
Etre à l'écoute de son entourage. Si certains entourages sont compréhensifs et même aidants, au bout d'un certain temps, la perte de revenus peut créer des difficultés dans les couples et les familles. Michel Debout conseille de ne pas laisser passer ces incompréhensions : "si on relève des petites réflexions, des petits signes de la part de ses proches, il ne faut pas hésiter à les reprendre et à s'expliquer. Il ne faut surtout pas ne rien dire".
Ne pas renoncer à sortir. Quelqu'un au chômage peut avoir tendance à s'isoler et à refuser les sollicitations de sortie : "on trouve un prétexte pour ne pas aller une soirée chez des amis car on a peur de rien n'avoir à raconter aux autres mais c'est une erreur, il faut faire tout le contraire!", recommande le médecin.
*Le traumatisme du chômage est paru aux Editions de l'Atelier avec le soutien de la Fondation Jean Jaurès.