Des avis divergents. Dangereux ou pas le bisphénol A ? La question est à nouveau posée après la publication d'un rapport de l'Autorité européenne de sécurité des aliments. Dans cette note publiée mercredi, l'Efsa considère que l’exposition au bisphénol A aux niveaux actuels "ne présente pas de risque pour la santé des consommateurs", y compris les enfants à naître, les nourrissons et les adolescents.
Problème : les autorités sanitaires françaises pensent exactement le contraire. Aux avant-postes de la lutte contre cette substance considérée comme un perturbateur endocrinien, la France a généralisé depuis le 1er janvier 2015 l'interdiction à tous les contenants alimentaires de cet antioxydant et plastifiant, déjà banni des biberons européens depuis 2011.
Un rapport sorti du chapeau ? "Très surprise" par cet avis, la ministre de l'Ecologie Ségolène Royal a mis les pieds dans le plat, s'interrogeant sur le "poids des lobbies" après la publication de ce rapport blanchissant provisoirement le bisphénol A. "Le ministère va faire expertiser cet avis, pour voir si le poids des lobbies n'est pas intervenu dans sa publication", a-t-elle détaillé, notant que lors de la dernière réunion des ministres européens de l'Environnement, où il avait pourtant été question des perturbateurs endocriniens, la sortie d'un tel rapport n'avait pas été évoquée.
Le poids des lobbies."Cet avis va à l'encontre d'avis d'autres structures qui, depuis des années" pointent les risques liés à l'exposition au bisphénol A, a souligné la ministre de l'Ecologie, indiquant qu'elle allait demander à l'Agence française de sécurité sanitaire (Anses) de se pencher sur les conclusions de l'Efsa.
"Près de 1.000 études montrent la toxicité du bisphénol A, mais l'Efsa continue de nier l'évidence!", a réagi le Réseau Environnement Santé. "L'Efsa trahit la mission qui est celle d'une agence en charge de protéger la santé des Européens", estime André Cicolella, président de l'association, qui demande une réforme de l'organisme.
Le manque d'indépendance de l'Efsa est régulièrement pointé du doigt. Dans un rapport rendu en 2013, l'association Observatoire de l'Europe industrielle affirmait que 60 % des experts scientifiques de l’Efsa avaient des liens directs ou indirects avec des entreprises pourtant sous sa surveillance.