Des soignants en blouse blanche, des représentants du Collectif Pédiatrie et des représentants d'associations de parents d'enfants malades sont partis ce mercredi matin de l'hôpital Necker, à pied jusqu'à l'Élysée, pour dénoncer la crise que traversent depuis quelques semaines les services pédiatriques hospitaliers. "On a l'impression d'avoir été écoutés", a dit le docteur Mélodie Aubart neuropédiatre à l'hôpital Necker-Enfants malades, à Paris, membre de cette délégation, après cette rencontre avec une conseillère du président de la République.
"Les soignants rentrent tous les jours en ayant l'impression d'avoir mal fait leur travail"
"Aujourd'hui, des dizaines d'enfants sont hospitalisés dans des box d'urgences, sont transférés à plusieurs centaines de kilomètres de chez eux, les soignants rentrent tous les jours en ayant l'impression d'avoir mal fait leur travail", avait-elle expliqué avant cette entrevue. Depuis début octobre, les urgences et services de réanimation pédiatriques des hôpitaux de tout le pays sont saturés, notamment du fait d'une épidémie de bronchiolite précoce. Mais elle "n'est que la face émergée de l'iceberg", selon le docteur Aubart.
Le collectif a dénoncé dans une lettre ouverte au chef de l'État datée du 22 octobre et signée par 7.000 soignants en pédiatrie "une inaction politique irresponsable". "Il faut que les pouvoirs publics entendent qu'aujourd'hui, en France, on soigne mal les enfants, faute de moyens, faute de soignants et faute d'une politique de santé digne de ce nom", explique Isabelle Desguerre, cheffe du service pédiatrique de l'hôpital Necker.
"Ce n'est pas des conditions qui permettent aux enfants d'être soignés correctement"
La dégradation structurelle des moyens alloués aux services pédiatriques conduit à "une véritable fuite des soignants", selon Mélodie Aubart. À l'image du docteur Hiba Trraf, qui vient de démissionner de son poste de cheffe du service pédiatrie de l'hôpital de Montluçon et qui s'est retrouvée seule médecin dans le service après le départ de ses six collègues. "Moralement et psychiquement épuisée", elle refuse de continuer "à mettre en danger les enfants".
"Le déclic, ça a été l'hiver dernier. Avec un sous-effectif très important, on a eu des semaines hyper chargées avec des conditions de travail qui nous ont amené, ma collègue et moi, à passer juste à côté, à quelques millimètres, d'une catastrophe. Il n'y en a pas eu, fort heureusement, mais je suis humaine et pas infaillible et je ne repasserai pas un hiver comme l'hiver dernier. Ce ne sont pas des conditions qui permettent aux enfants d'être soignés correctement", lance-t-elle au micro d'Europe 1.
Les 150 millions d'euros débloqués sont "de la rigolade"
Le ministre de la Santé, François Braun, a annoncé la mise en place d'un "plan d'action immédiat" et le déblocage de 150 millions d'euros pour "les services en tension de l'hôpital", et promis l'organisation au printemps d'"assises de la pédiatrie". "De la rigolade" pour la Pr Desguerre. François Braun doit recevoir ce mercredi après-midi des représentants du secteur de la pédiatrie. Le collectif dénonce le fait que "la même séquence a déjà été conduite par le ministre il y a 15 jours" et n'a "débouché sur aucune décision ni aucune communication".