Des représentants d'agents hospitaliers ont déploré jeudi la "mauvaise foi" et le "déni" du ministre délégué à la Santé, selon qui la situation aux urgences est, cet été, légèrement meilleure qu'en 2023, et ont de leur côté dénoncé "l'effondrement" croissant du système.
Temps d'attente interminables sur des brancards, fermetures perlées : comme chaque été, des services d'urgence font les frais d'un manque d'effectifs chronique, criant en période de vacances. Mardi, le ministre délégué à la Santé Frédéric Valletoux a estimé qu'une "cinquantaine d'hôpitaux" français "sont actuellement en tension". "C'est un peu mieux que l'été dernier" et mieux qu'en 2022, a-t-il estimé.
"Les professionnels observent non plus une dégradation, mais un effondrement de notre système de santé"
"Peut-être monsieur le ministre est-il encore sous l'effet euphorisant de l'ambiance des Jeux Olympiques", ironise jeudi, dans un communiqué, la coalition Action praticiens hôpital (APH, 14 syndicats de praticiens), lui décernant la "médaille d'or de la mauvaise foi". "La situation sanitaire de notre pays poursuit sa dégradation programmée" et cela ne concerne "pas seulement les urgences", poursuit APH, évoquant des "lignes de Smur (service mobile d'urgence et de réanimation) fermées, avec des retards de prise en charge pour des urgences vitales" ou encore de nombreuses fermetures de lits dans les services.
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La situation est devenue "endémique, sauf sur un site : celui de la clinique des Jeux Olympiques", fustige-t-elle. "Si certains politiques affichent un satisfecit béat, les professionnels (...) observent non plus une dégradation, mais un effondrement de notre système de santé", conclut APH. Dans une interview à Libération, le président du syndicat Samu Urgences de France (SUDF) Marc Noizet conteste aussi le chiffre donné par le ministre, selon lui "largement sous-estimé", et dénonce "l'habituelle communication ministérielle destinée à rassurer l'opinion".
Selon une enquête du syndicat, "durant l'été 2023, un service sur deux avait dû fermer au moins une ligne d'urgence" et "70% des Smur" avaient tourné en mode dégradé. "La situation n'a pas été meilleure cet été", et des CHU ont été affectés, "comme au Havre, à Caen, Rennes, Bordeaux et Grenoble. Laval, un gros service d'urgences, va même devoir fermer la nuit en septembre. Cela n'était jamais arrivé. Les difficultés sont généralisées et plus importantes que jamais", assure M. Noizet.
SUDF publiera mi-septembre son enquête annuelle sur ces fermetures estivales. Selon une récente étude (Inserm, APHP, Universités de Rouen et de la Sorbonne), passer une nuit sur un brancard augmente de près de 40% le risque de mortalité hospitalière pour les patients de plus de 75 ans.