Le Nobel de médecine 2021 a sacré lundi l'Américain David Julius et l'Américain d'origine libano-arménienne Ardem Patapoutian, pour leurs découvertes sur la façon dont le système nerveux transmet la température et le toucher. Leurs "découvertes révolutionnaires" ont "permis de comprendre comment la chaleur, le froid et la force mécanique peuvent initier les impulsions nerveuses qui nous permettent de percevoir et de nous adapter au monde", a indiqué le jury Nobel à Stockholm.
Les vaccins à ARN messager étaient favoris
David Julius, 65 ans et professeur à l'Université de Californie, a utilisé la capsaïcine, un composant actif du piment qui provoque une sensation de brûlure, pour identifier un capteur dans les terminaisons nerveuses de la peau qui réagit à la chaleur. De douze ans son cadet, Ardem Patapoutian, professeur au Scripps Research en Californie né à Beyrouth, a lui utilisé des cellules sensibles à la pression pour découvrir une nouvelle classe de capteurs qui répondent aux stimuli mécaniques dans la peau et les organes internes.
"Dans nos vies quotidiennes nous prenons nos sens pour acquis, mais comment les impulsions nerveuses se déclenchent-elles pour que la température et la pression soient perçues ? C'est cette question qui a été résolue par les lauréats du prix Nobel cette année", a résumé le jury.
Ce prix a déjoué les pronostics des experts. Ces derniers avaient misé sur les vaccins à ARN messager, des experts de l'adhésion des cellules, des nouvelles voies pour des traitements en rhumatologie, des champions de l'épigénétique ou de la résistance aux antibiotiques qui auraient pu recueillir les lauriers pour le 120e anniversaire des prix.
L'Académie suédoise des Sciences veille jalousement au secret et aucune des centaines de nominations en lice chaque année n'est jamais confirmée. L'an dernier, déjà en pleine pandémie, le prix 2020 était allé à des virologues, trois découvreurs du virus responable de la redoutable hépatite C.
Nobel : 224 lauréats, dont 12 femmes
Le millésime se poursuit à Stockholm mardi avec la physique, mercredi avec la chimie, avant les très attendus prix de littérature jeudi et de la paix vendredi, seule récompense décernée à Oslo. Le plus récent prix d'économie clôt la saison lundi prochain. Avec ce 112e Nobel de médecine, ils sont désormais 224 à s'être vu décerner le prix "de physiologie ou de médecine" depuis sa création, dont seulement 12 femmes. Aucune organisation n'a jamais été récompensée, ce qu'interdisent les règles de l'Institut Karolinska qui décerne le prix. Si les Nobel 2021 sont bien annoncés comme prévu cette semaine, le coronavirus a entraîné pour la deuxième année consécutive l'annulation de la venue des lauréats pour la remise des prix le 10 décembre à Stockholm, du jamais vu en temps de paix depuis 1924.
Comme l'an passé, les prix seront remis dans les pays de résidence, même si un petit espoir demeure pour le prix de la paix à Oslo. Pour ce dernier, la liberté de la presse (Reporters sans frontières, Comité pour la protection des journalistes...), l'opposition bélarusse et sa cheffe de file Svetlana Tikhanovskaïa ou le climat, avec la Suédoise Greta Thunberg, 18 ans, et son mouvement des Fridays for Future, sont évoqués pour succéder au Programme alimentaire mondial. A moins que le Covid apporte son sceau à l'Organisation mondiale de la santé ou au programme de vaccins Covax pour les pays pauvres, mais leurs chances se sont réduites, selon les experts, du fait des controverses sur le rythme vaccinal.
Pour la littérature jeudi, des dizaines d'"usual suspects" ou d'hypothèses plus récentes sont considérés comme nobélisables. L'Académie suédoise, qui cherche à diversifier le profil de ses lauréats, choisira-t-elle un ou une non-Occidental(e)? Le Chinois Mo Yan en 2012 est le dernier non-Américain ou non-Européen à avoir remporté le titre. Les deux continents représentent 95 des 117 lauréats.