"Quand les femmes s'arrêtent, tout s'arrête" : une cinquantaine d'organisations appellent à la grève du travail et des tâches domestiques, le 8 mars, à l'occasion de la journée internationale des droits des femmes, pour réclamer des mesures en faveur de l'égalité entre les sexes. Le 8 mars, "c'est l'occasion de prendre la rue" pour donner de la visibilité et défendre les droits notamment des "salariées essentielles mal payées", des "premières de corvées" et des "femmes victimes de violence", a lancé lors d'une conférence de presse, Anne Leclerc, membre du collectif qui organise cette "grève féministe".
Une cinquantaine d'organisations appellent à participer à ce mouvement, dont des associations féministes et des syndicats (CGT, CFDT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, Solidaires, FSU). Des dizaines de milliers de manifestants sont ainsi attendus vendredi aux quatre coins de la France, dans plus de 150 villes, dont Bordeaux, Lyon et Marseille, mais aussi dans des agglomérations plus petites, comme Quimper ou Belfort. À Paris, le cortège partira à 14 heures de la place Gambetta en direction de la place de la Bastille.
Les femmes veulent "vivre et pas survivre" : les manifestants protesteront notamment contre les faibles revenus de ces dernières et leurs conséquences. Dans un contexte de forte inflation qui affecte le pouvoir d'achat des ménages, les femmes et les enfants sont les premières victimes de la pauvreté, ont alerté des associations cet hiver.
Revaloriser les métiers féminisés
En cause : les inégalités salariales qui existent "dans toutes les entreprises et dans toutes les administrations", a dénoncé Myriam Lebkiri, de la CGT. "Elles sont connues et portent plusieurs noms", comme le "plancher collant" ou le "plafond de verre", qui font référence aux difficultés des femmes pour obtenir des promotions. Les femmes salariées gagnaient en moyenne 23,5% de moins que les hommes dans le secteur privé en 2022, selon une étude de l'Insee, publiée mardi. Cet écart s'explique en partie par "le moindre volume de travail annuel des femmes", moins souvent en emploi et davantage à temps partiel.
Cependant, à temps de travail identique, le salaire moyen des femmes reste inférieur de 14,9% à celui des hommes car elles travaillent dans des secteurs et à des postes "moins rémunérateurs". Pour réduire ces différences de revenus, les organisations féministes et syndicales réclament une revalorisation des minimas sociaux, une hausse des salaires des métiers féminisés comme ceux de l'éducation, du soin ou du nettoyage et l'interdiction du temps partiel imposé.
Dans la sphère privée, les femmes sont "en première ligne" pour l'éducation des enfants et le soin aux proches, a pointé Julie Ferrua, de Solidaires. Elles sont donc "directement affectées" par l'absence ou la fermeture de services publics, tels que les Ehpad ou les crèches. "Il est urgent de créer de nouveaux droits, celui pour tout enfant de trouver un mode d'accueil collectif public et celui pour toute personne de voir sa perte d'autonomie prise en charge, sans que cela ne retombe sur les femmes", a détaillé Julie Ferrua.
Travail domestique "essentiel"
En ce qui concerne l'éducation des jeunes enfants, "quand les parents ne trouvent pas de solution d'accueil, ce sont surtout les mères qui se chargent d'une garde parentale non choisie", confirme une étude de la Drees publiée mardi. À l'heure actuelle, le gouvernement estime qu'il manque environ 200.000 places d'accueil pour les jeunes enfants et a promis de les créer d'ici 2030. Cet objectif est toutefois jugé "irréalisable" par une majorité des acteurs du secteur en raison de la pénurie de professionnel.
"Même si la situation évolue, la division du travail domestique reste fortement inégalitaire, y compris lorsque les deux conjoints travaillent, nous l'avons vu pendant la période du Covid", a regretté Soad Baba Aïssa, de l'association Femmes Solidaires. Se mettre en grève et "ne pas réaliser le travail domestique, permet aussi de démontrer combien tout ce que nous faisons est essentiel", a souligné la militante. Des grèves féministes d'ampleur ont déjà eu lieu dans plusieurs pays ces dernières années, comme en Espagne ou en Islande, soulignent les féministes.