Adeline, 24 ans, a fait un déni de grossesse : "Je n'en voulais pas et je ne m'en rendais pas compte"

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Grégoire Duhourcau , modifié à
Adeline a fait un déni de grossesse à l'âge de 20 ans. "J'ai cru à une grosse, grosse blague", explique-t-elle au micro d'Olivier Delacroix sur Europe 1.
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Adeline, 24 ans, a découvert à l'âge de 20 ans qu'elle était enceinte de plus de huit mois alors qu'elle faisait un examen médical dans le cadre d'un suivi pour une maladie de Crohn. "J'ai cru à une grosse, grosse blague", confie-t-elle à Olivier Delacroix sur Europe 1. Si elle avoue avoir pensé à accoucher sous X, elle entretient aujourd'hui une relation très fusionnelle avec son fils.

"Ça a été compliqué. Je suis arrivée dans la salle, mon gastro-entérologue était là, accompagné de deux internes, une sage-femme, une gynécologue. Il y avait huit ou neuf personnes. Ils me font l'échographie et en rigolant je disais : 'Le matériel n'est pas si bien que ça, il faudrait peut-être renouveler. Si vous m'emmenez ici, c'est qu'il y a un problème.' Ils m'ont appuyé sur le ventre, ils ont fait l'échographie et là on tourne l'écran vers moi et on me dit : 'Vous auriez pu nous prévenir que vous étiez enceinte de plus de huit mois. C'est un petit garçon.' Sur le coup, je me suis mise à rire parce que j'ai cru à une grosse, grosse blague. J'ai commencé à rire en disant : 'Arrêtez de mettre l'échographie de la dame d'avant. Vous croyez que c'est drôle de parler d'une grossesse ?' Et là, on me dit : 'Si, si, c'est votre fils. Regardez, on entend son cœur.'

Pour moi, ça a été un choc donc je me suis rhabillée et j'ai dit : 'Puisque vous me prenez pour une idiote, je préfère partir.' Je suis partie avec mes affaires pour aller consulter dans un autre hôpital de ma région pour vérifier. J'étais tellement énervée qu'en arrivant à la maternité de l'autre hôpital j'ai dit : 'On m'a dit que j'étais enceinte de plus de huit mois. Je devrais le savoir, je devrais le voir. Je ne suis pas enceinte, je ne suis pas grosse. Je n'ai pas tout ce qu'une femme enceinte devrait avoir.' On m'a fait passer avec une psychologue et une sage-femme qui m'ont refait une échographie et m'ont dit : 'Si, vous êtes bien enceinte. Regardez, c'est un petit garçon, il vous reste peu de temps, préparez-vous.' Ça a été vraiment très, très dur.

 

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"Deux heures après, mon ventre est ressorti d'un coup"

Ça a été tellement vite. J'y vais pour ma maladie et on m'annonce que je suis enceinte de plus de huit mois, que j'accouche bientôt et que c'est un petit garçon alors que moi, je n'étais pas du tout prête à être maman parce que j'étais dans mes études. J'avais des rêves comme tout le monde et la situation ne me permettait pas d'avoir un enfant parce que j'étais encore chez mes parents. Je l'ai annoncé à ma mère et elle ne me croyait pas.

Deux heures après, mon ventre est ressorti d'un coup. Il s'est mis vraiment en ventre de femme enceinte, mais ce n'était pas non plus flagrant. Ma mère ne m'a pas cru mais je trouvais que c'était quand même gros. Le lendemain, je me suis levée et ça a été le choc pour moi et mes parents. D'un coup, je ne rentrais plus dans mes vêtements, j'avais vraiment le ventre très bien formé.

"On me poussait à accoucher sous X"

[Ensuite j'ai passé des examens parce que] j'avais une douleur à l'échographie. Je suis passée par un gynécologue qui a vérifié que le bébé allait bien. Ils m'ont posé des questions sur ma situation et m'ont demandé pourquoi j'avais mal. J'ai dit : 'Je ne sais pas, je me suis levée comme ça.' Et là, le gynécologue me dit : '20 ans et être enceinte c'est inadmissible. Vous devriez accoucher sous X. C'est incroyable de voir des mamans seules élever un enfant, vous n'en serez pas capable, vous n'avez pas de situation. Accouchez sous X, il y a des familles qui n'attendent que ça d'avoir un enfant.' En plus, il me faisait tellement mal à m'appuyer sur le ventre en me parlant. Il m'en faisait pleurer et il continuait à me dire : 'Pensez à accoucher sous X. 20 ans, ce n'est pas un âge pour avoir un enfant.' Ces phrases étaient dures parce que je ne voulais pas être enceinte, on m'apprend du jour au lendemain que je suis enceinte et en plus on me dit : 'Tu ne seras pas capable de l'élever.'

J'ai pensé [à accoucher sous X]. J'y ai pensé énormément. J'y ai pensé jusqu'à la dernière semaine avant d'accoucher. J'étais suivie tous les jours à l'hôpital pour faire tous les examens qu'il y a normalement sur une grossesse normale. J'étais suivie par un psychologue parce que pendant une semaine, le choc de l'apprendre a fait que je ne voulais plus manger. Je voulais le tuer parce que je n'en voulais pas et je ne m'en rendais pas compte.

"Je dormais avec mon fils dans les bras, tellement j'avais peur qu'on me l'enlève"

Au bout d'un moment, mon père m'a dit : 'Ecoute, tu as 20 ans. Il n'a pas voulu être là, maintenant il est là, on va l'assumer tous ensemble. Tu es capable de l'assumer tel que quelqu'un qui a voulu un enfant.' Donc j'ai pris conscience et le problème, c'est que l'hôpital me disait : 'A 20 ans, vous êtes toute seule, il n'y a pas de papa, accouchez sous X.' On me poussait à accoucher sous X.

Quand j'ai accouché, il y a une psychologue qui est venue pendant cinq jours. Elle voulait savoir, encore, si je ne voulais pas mettre mon fils sous X, si je me sentais capable, si je n'allais pas l'abandonner. J'avais tellement peur de cette dame-là. Je dormais avec mon fils dans les bras, tellement j'avais peur qu'on me l'enlève dans mon dos."

L'avis de Sophie Marinopoulos, psychologue et psychanalyste, spécialiste de l'enfance et de la famille :

"On est en train de plonger dans un drôle de monde qui est le monde du psychisme, le monde des pensées. La grossesse, c'est à la fois du corps et des pensées. Qu'est-ce qu'il se passe dans la tête des femmes qui font un déni de grossesse ? Quand on est face à une situation qui risque de nous déborder, qui risque de trop nous faire souffrir, on met en place un système de défense, qui s'appelle le déni. C'est-à-dire que l'on nie la réalité, on fait comme si la réalité n'existait pas. Le déni de grossesse c'est : 'Je nie le fait que je sois enceinte.' Ce ne sont pas des simulatrices. C'est très important. Ce ne sont pas des femmes qui mentent ou qui font semblant de ne pas savoir. Elles ne savent pas.

C'est un moment où le psychisme prend le pas sur le corps. Ce sont les pensées qui vont être le commandant de bord. Et vous voyez comment le corps va suivre l'état psychique. Il y a une non-modification du corps qui est extrêmement surprenante. On voit ces femmes qui ont un corps non-modifié et qui peuvent mettre au monde un enfant de 2 ou 3 kg, en pleine forme et en très bonne santé. Le bébé, lui, va s'installer confortablement, en général en dorsal. C'est-à-dire qu'il prend appui plutôt sur le dos de la mère et non du côté ventral avec une posture maternelle qui fait qu'elles ont une manière de se tenir qui pousse l'utérus vers l'arrière."