Avant son geste héroïque, le colonel Arnaud Beltrame était en poste en Irak. A l'occasion de l'hommage national qui lui est rendu, Bernard Bajolet, ancien Directeur général de la sécurité extérieure (DGSE) et ancien ambassadeur de France en Irak, qui a connu le gendarme, s'est confié au micro d'Europe 1 matin, mercredi.
Vous avez rencontré Arnaud Beltrame en 2005, en Irak, alors que vous étiez ambassadeur de France. Quels souvenirs avez-vous de lui ?
J'ai le souvenir d'un homme très maître de lui, calme, sympathique, ouvert et surtout très engagé. Arnaud Beltrame est arrivé à Bagdad le 17 juillet 2005, et c'est sur place que nous avons appris sa promotion au grade de capitaine, il était arrivé comme lieutenant. Ses camarades font une fête, je fais un discours, et après cette cérémonie, il est venu me voir et m'a dit combien il était enthousiaste pour cette mission qui était assez périlleuse. A la fin de la journée, j'ai noté dans mon journal de bord son sens du sacrifice.
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Arnaud Beltrame a participé à la mise à l'abri d'une ressortissante française dans des conditions particulièrement périlleuses à Bagdad alors que des groupes terroristes pouvaient frapper à tous moments.
C'est une période où il y avait en moyenne une soixantaine d'attaques par jours, avec des pics à cent attaques, quand on se déplaçait dans Bagdad. Et c'était tous les jours. Le 7 septembre 2005, Arnaud Beltrame a participé à la mise à l'abri d'une humanitaire française dont on avait appris qu'elle était sur le point d'être enlevée. Il a fallu aller la chercher à son hôtel, la convaincre de se rendre à l'ambassade, lui expliquer la menace qui pesait sur elle, et l'inciter à partir, ce qu'elle a fini par faire.
Le gendarme Beltrame connaissait-il les risques qu'il prenait ?
Ce n'était pas du tout une tête brûlée, c'était quelqu'un qui était toujours en pleine maîtrise de lui-même. C'est aussi dans cette période que le 23 juillet 2005, nos services ont mis à jour un projet d'enlèvement suivi du'un assassinat à mon encontre. Quelques jours après, le 27 juillet, deux diplomates algériens ont été assassinés par Al-Qaïda. On savait très bien que si on était enlevé, on n'avait aucune chance de s'en sortir. Je demandais donc aux gendarmes de faire en sorte que nous ne soyons jamais pris vivants, ce qui impliquait un certain nombre de choses. Si la fuite était impossible, il fallait combattre jusqu'au dernier. Arnaud Beltrame le savait, et c'est pour ça qu'il m'avait fait part de son sens du sacrifice