"Cette souffrance est ancrée en moi pour toujours", "non, ce n'est pas 'normal' de perdre un bébé", "je me sens anéantie"... Sur les réseaux sociaux, il suffit de quelques clics pour lire des dizaines de témoignages de femmes victimes de fausse couche. Des anonymes mais aussi des femmes connues, comme Georgina Rodriguez, Chrissy Teigen ou Meghan Markle, qui parlent de leur deuil périnatal. Une manière de libérer la parole autour de l'interruption spontanée de grossesse. Une situation qui survient dans les cinq premiers mois de grossesse, qui toucherait environ 200.000 femmes en France par an, et une femme sur dix au cours de sa vie. Une épreuve difficile psychologiquement, alors que le sujet reste tabou.
"Belle prise de conscience"
Pour ne plus minimiser la souffrance liée à une interruption spontanée de grossesse, une proposition de loi visant à favoriser l'accompagnement psychologique des femmes victimes de fausse couche va être examinée à l'Assemblée nationale ce mercredi. Déposée par la députée Modem Sandrine Josso, celle-ci a pour objectif de mieux "informer les femmes concernées" par la possibilité d'avoir un accompagnement psychologique et de "veiller à la prise en charge de cet accompagnement par l’Assurance maladie".
Une "belle prise de conscience", reconnaît Marie Pepin, déléguée générale de l'association Agapa, qui accompagne les femmes qui ont vécu une fausse couche. Car jusqu'à présent, "rien de précis n’est mis en place au niveau psychologique pour les fausses couches, c’est propre à chaque hôpital, à chaque fonctionnement des professionnels de santé. Les soignants orientent de plus en plus de patients vers des associations comme la nôtre pour qu’on puisse prendre en charge et accompagner ces femmes qui sont en grande souffrance", ajoute-t-elle.
Pour l'instant, seul un arrêt maladie est proposé après une fausse couche, et les femmes ne sont pas forcément orientées pour un suivi psychologique. "Le but n'est absolument pas d'accabler les soignants mais souvent, si une femme arrive aux urgences et fait une fausse couche, on ne lui donne pas beaucoup d'informations sur la suite, et c'est là où elle se sent démunie. D'ailleurs, la proposition de loi cherche aussi à développer la formation des soignants sur les conséquences psychologiques d'une fausse couche et la douleur que ça peut représenter", reprend la déléguée générale d'Agapa.
"Il faut que la souffrance ne soit plus un tabou"
Une souffrance encore trop peu reconnue, voire banalisée, avec un argument souvent repris : "ça arrive à beaucoup de femmes". "Il faut qu’on arrête de banaliser la fausse couche et de se dire que ce n’est pas grave. Il faut que la souffrance suite à une fausse couche ne soit plus un tabou, que les femmes osent dire 'oui, je souffre' et qu'elles comprennent que cette souffrance est normale", insiste Marie Pepin. "Il ne faut plus qu’elles se retrouvent dans des situations d’isolement. Parce que c’est souvent ce qui se passe : ces femmes s’isolent car elles ne vont pas bien, elles ne savent pas à qui en parler donc il faut qu’elles aient la possibilité d’avoir recours à un accompagnement."
Un accompagnement qui peut se faire sous forme d'entretiens individuels, des café-rencontre ou des groupes de parole auxquels les conjoints peuvent aussi participer, comme le propose différentes associations comme Agapa, ou en prenant rendez-vous avec un psychologue. "En France, nous avons de la chance car il y a une diversité d'accompagnements qui fait qu'on peut répondre aux besoins de chaque femme, mais il faut qu'elles aient connaissance de ces possibilités", conclut Marie Pepin.