La révocation du droit à l'avortement par la Cour suprême des États-Unis est un "signal dangereux" et menace les droits des femmes "dans le reste du monde et même en France", ont estimé vendredi les associations françaises de défense du droit à l'IVG. Cette décision aura des conséquences "désastreuses pour les Américaines", mais envoie également "un signal dangereux qui conforte les partisans des mouvements anti-IVG" ailleurs dans le monde, a ainsi jugé le Haut Conseil à l'égalité (HCE) dans un communiqué. "Ce droit fondamental demeure menacé par les courants réactionnaires, qui déploient un travail constant de lobby liberticide y compris au sein de l'Union européenne", poursuit le HCE.
"Pour se prémunir de toute tentative d'entrave des droits des femmes", il est urgent "d'inscrire le droit à l'avortement dans notre Constitution française", ainsi que dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, a préconisé le Haut Conseil, instance consultative indépendante placée auprès du Premier ministre. Le Planning familial a lui déploré sur Twitter "un effort mondial concerté et calculé par les extrémistes conservateurs".
La décision de la Cour suprême est un énorme recul pour toutes les femmes. Chaque fois que le droit à l’avortement est attaqué quelque part, l’onde de choc se propage dans d’autres pays. Plus que jamais il faut défendre le droit à l’avortement! #MonCorpsMesChoix#RoeVsWadepic.twitter.com/XYjfLCDq4H
— Le Planning Familial (@leplanning) June 24, 2022
Appel à la manifestation samedi prochain
Vendredi en fin d'après-midi, une cinquantaine de personnes se sont rassemblées place de la République à Paris pour défendre le droit à l'avortement. La manifestation, à l'appel de plusieurs organisations féministes et de gauche, avait été prévue avant l'annonce de la décision de la Cour suprême. Les participants portaient des pancartes proclamant en anglais "Solidarité pour nos sœurs américaines" ou encore "USA : les armes ont plus de droits que nos vagins".
"Nous voulions marquer notre soutien aux femmes des États-Unis. Les États-Unis ont un poids important comme modèle de défense des droits fondamentaux. Or les droits fondamentaux des femmes sont remis en cause. Pour nous, c'est vraiment un retour en arrière qui est déjà effectif en Pologne et en Hongrie", a déclaré à l'AFP, Daniele Gaudry, militante du Planning familial et du "collectif avortement en Europe les femmes décident". Pour Suzy Rojtman, membre du même collectif : "Nous étions dans une période plutôt montante, car l'avortement a été autorisé en Colombie, en Argentine, en Irlande. Nous craignons un coup d'arrêt." Le collectif appelle à la mobilisation samedi prochain.
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Demande de constitutionnalisation de ce droit
"Il suffirait qu'en France on ait un parlement avec une majorité conservatrice, et l'avortement pourrait être interdit", a de son côté, dit à l'AFP la présidente de la Fondation des femmes, Anne-Cécile Mailfert. Pour remédier à cette "fragilité", "il faut constitutionnaliser ce droit, nous le demandons depuis longtemps", a-t-elle ajouté.
Pour sa part, le HCE s'inquiète également des "dangers d'une production monopolistique de la pilule abortive", en l'occurrence par le laboratoire Nordic Pharma, "dont une partie conséquente des capitaux est maintenant américaine". Cette entreprise "pourrait subir des intimidations importantes des mouvements anti-IVG" et il conviendrait donc de relocaliser en Europe, "et le plus vite possible en France" la fabrication de cette pilule, selon le HCE.