Elle a obtenu 20,32 sur 20 de moyenne générale au bac... mais elle a été refusée ou placée sur liste d'attente dans tous les établissements de métropole dans lesquels elle a postulé via la plateforme Parcoursup'. Ranitea Gobrait, en terminale S au lycée La Mennais de Papeete (Polynésie), est major du bac dans l'archipel, mais elle ne sait toujours pas où étudier à la rentrée.
"Je trouve ça aberrant". Avec 20 sur 20 en philo, 20 en histoire, 20 en maths, 20 en physique-chimie, 20 en anglais, 20 en mandarin, 20 en espagnol, et 20 en natation, Ranitea a presque fait un sans faute. Ses seuls petits écarts : un 15 en TPE, un 18 en sport. En français, elle a obtenu 18 à l'écrit et 19 à l'oral. Et pourtant, elle reste à la recherche d'un établissement pour l'accueillir à la rentrée : elle a été refusée dans tous les établissements parisiens dans lesquels elle a postulé, et reste en liste d'attente dans le lycée toulousain Pierre-de-Fermat pour une classe préparatoire d'ingénieurs.
"Je trouve ça aberrant. Je ne suis pas la seule dans ce cas : il y a beaucoup de bons élèves qui subissent le fait d'être à Tahiti. Les grandes prépas nous ont laissés de côté, nous les îles d'outre-mer (...) Je trouve que c'est dommage de nous fermer les portes comme ça, on devrait nous laisser notre chance", regrette Ranitea. Faute de classe préparatoire, elle ira le cas échéant à l'université de la Polynésie française. Plusieurs de ses amies qui n'ont pas été admises en métropole et ont obtenu des moyennes supérieures à 18 au bac ont choisi de partir à l'étranger.
" On se retrouve avec de futurs étudiants qui ont des moyennes entre 8 et 10, classés devant des étudiants avec des moyennes de 15 à 17 "
La Polynésie... et les banlieues ? Pour Valérie Faua, directrice du lycée privé La Mennais, "on est forcé de constater qu'être en Polynésie française, ça peut défavoriser les élèves qui demandent des formations bien particulières (..) cette année, avec Parcoursup, ça a été un peu plus flagrant : avec APB, il y avait moins de cas comme ceux-là", affirme-t-elle.
Il n'y a pas qu'en Polynésie où le nouveau logiciel d'admission post-bac fait polémique. Les élèves des lycées de banlieue seraient eux-aussi défavorisés dans l'accès aux facs parisiennes, alertait le 22 juin dernier le directeur de la fac de chimie de l'université Paris-Diderot. Le rectorat parisien a en effet appliqué un quota de 3% pour les étudiants venus de lycées en dehors de Paris. Résultat : les élèves parisiens ont eu la priorité et se sont retrouvés en haut du classement.
"On se retrouve avec de futurs étudiants qui ont des moyennes qui peuvent être assez médiocres, entre 8 et 10, classés devant des étudiants avec des moyennes de 15 à 17", déplore Rémi Losno, directeur de la fac de chimie. Fin mai, un lycée de Saint-Denis avait brièvement été bloqué pour protester contre des "discriminations", dixit les organisateurs du mouvements.