Hypermarchés filtrés ou bloqués par des alignements de chariots : faire ses courses de Pâques dans certains magasins Carrefour samedi tenait de la gageure au vu de la forte mobilisation des salariés, décidés à défendre leurs emplois et leur pouvoir d'achat.
Au moins 300 magasins intégrés étaient impactés par le mouvement de grève lancé par FO et la CFDT, et relayé séparément par la CGT, au lendemain d'une mobilisation dans les entrepôts. Dans la matinée, la CFDT a recensé 170 hypermarchés (sur 220) mobilisés et 130 supermarchés (sur environ 470), avec un taux de grévistes avoisinant "50%". Il y en a "peut-être même plus", a estimé Michel Enguelz, représentant de FO, premier syndicat du groupe, qui s'est félicité d'un mouvement "d'envergure". "Du jamais vu", selon Philippe Allard (CGT).
Certains hypermarchés entièrement bloqués. Partout, la mobilisation se traduisait par des rassemblements devant les magasins, du "filtrage" aux entrées ou carrément des blocages, a expliqué Sylvain Macé (CFDT). Certains hypermarchés étaient complètement bloqués, selon les syndicats CFDT, FO et CGT, comme à Antibes, Ollioules, Toulon Grand Var, Nice Lingostière ou Port-de-Bouc dans le Sud, Vénissieux, Chambéry, Niort ou encore Toulouse-Labège.
Grève à Carrefour: l’hypermarché d’Antibes totalement bloqué par 80% des salariés pic.twitter.com/mdRBL1YACF
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Grève à Carrefour ce samedi, les accès des hypermarchés de Lingostière et Antibes bloquéshttps://t.co/S1R1fDaegspic.twitter.com/1uqOKAD0Si
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Grève nationale du 31 mars #Carrefour#FO #, les salariés en grève pour dire non au plan Bompard #Niort. pic.twitter.com/66LJ0HR4el
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La direction du groupe Carrefour a pour sa part fait état d'une "trentaine" d"hypermarchés "bloqués" à 10h30. À midi, "80% de nos hypermarchés sont ouverts" et "100% de nos supermarchés", a-t-elle souligné. Une source syndicale a estimé que 30% des hypermarchés resteraient fermés toute la journée.
"Les salariés ne sont pas des pions". Cette mobilisation est le point d'orgue de l'inquiétude et la colère qui montent depuis l'annonce le 23 janvier par Alexandre Bompard, PDG du groupe depuis l'été dernier, de son "plan de transformation" s'accompagnant de la suppression de milliers d'emplois. Ce mouvement "doit nous permettre de faire comprendre à Alexandre Bompard que les salariés ne sont pas des pions", a souligné Michel Enguelz. Il pourrait entraîner, avait indiqué vendredi Thierry Faraut (SNEC CFE-CGC) "entre 40 et 50 millions d'euros" de perte de chiffre d'affaires.
Inquiétudes autour du plan Bompard. Au-delà des suppressions de postes annoncées -2.400 dans les sièges via un plan de départs volontaires, 2.300 via un plan social dans les magasins de proximité (273 ex-Dia qui vont fermer)-, les syndicats protestent contre le passage en location gérance d'hypermarchés (cinq confirmés, une quarantaine visés selon eux). Ils s'inquiètent aussi de l'impact sur l'emploi d'autres mesures du plan Bompard (logistique, réduction de 100.000 m2 des surfaces des hypermarchés). "Nous comprenons que les projets de transformation puissent susciter de l'inquiétude chez certains de nos salariés", a admis Pascal Clouzard, directeur exécutif France Carrefour, dans une réaction. Mais, "si nous souhaitons pérenniser et développer notre activité économique, et donc nos emplois, nous devons impérativement nous transformer", a-t-il ajouté.
Ne plus "payer pour les actionnaires". Chez les salariés, l'annonce récente d'une participation moyenne de 57 euros, contre 610 l'an dernier, vue comme une "aumône" ou un "pourboire", a aussi catalysé la colère. "Bien consciente de l'impact sur le pouvoir d'achat" de cette baisse, la direction a proposé mi-mars de relever ce montant à 407 euros, via un complément forfaitaire d'intéressement de 350 euros. Sans désamorcer la fronde. Les actionnaires vont toucher, eux, 356 millions d'euros de dividendes, font valoir les syndicats qui anticipent aussi des négociations salariales au rabais. "Augmenter les salaires, pas les dividendes des actionnaires", proclamait une pancarte dans les rassemblements. "On s'est dit qu'on allait arrêter de payer pour les actionnaires, c'est un ras-le-bol général", a relevé Olivier Ginestar (CGT), devant l'hypermarché de Lomme, dans le Nord, fermé samedi.
Un dialogue social crispé. Côté syndicats, le mouvement traduit aussi la crispation du dialogue social, dont tous dénoncent unanimement la "dégradation". Il est "rompu, c'est marche ou crève", relevait à Marseille Smaïl Ait Atman (CFDT). Pour FO, qui a déjà annoncé qu'il ne signerait pas le projet d'accord sur le plan de départs volontaires, "la balle est dans le camp" de la direction. Si d'autres actions ne sont "pas exclues", "l'objectif est de revenir autour d'une table de négociations", souligne Michel Enguelz.