Jeudi, en cette Journée mondiale du droit à l'avortement, le collectif "Avortement : les femmes décident", qui regroupent les principales organisations féministes d'Europe, lance un appel : "nous exigeons que les droits des femmes, la liberté à disposer de son corps, le droit à l’avortement et à la santé soient respectés dans tous les pays européens". Car, si en Afrique, en Asie et en Amérique, nombreux sont les pays qui interdisent ou qui limitent drastiquement le droit à l'IVG, il en existe aussi sur le vieux continent. Europe 1 passe ici en revue ces pays qui refusent encore de légaliser pleinement l'IVG.
Irlande. La nouvelle est tombée mardi : le gouvernement irlandais organisera en 2018 un référendum sur le droit à l'avortement. Actuellement, et ce depuis 2013, l'IVG est autorisée seulement s'il existe un risque "réel et substantiel" pour la vie de la femme ou un risque de suicide. Le viol, l'inceste ou un fœtus malformé ne sont pas des raisons jugées valables pour interrompre une grossesse. Pratiquer illégalement une IVG peut ainsi être puni jusqu'à 14 ans de prison. Un projet de loi permettant la légalisation totale de cette pratique a été rejeté en 2016. En Irlande, l'interdiction de l'IVG est gravée dans la constitution, d'où la difficulté de revenir dessus. L'article 40 spécifie en effet le droit à la vie de l'enfant à naître.
Pologne. En 1956, la Pologne avait bien autorisé l'IVG en cas de "conditions de vie difficiles de la femme", rendant de fait légal l'avortement. Mais, après la chute de l'URSS, en 1993, l'Etat polonais passe un accord avec l'Eglise catholique afin de le limiter à trois cas : acte illégal (viol ou inceste), risque pour la vie ou la santé de la femme ou malformation grave du foetus. Moins de 2.000 IVG sont ainsi pratiquées par an en Pologne. Là encore le "tourisme abortif" est de mise pour les Polonaises qui se rendent à l'étranger ou bien au large, sur les bateaux de l'ONG Women on waves, stationnés dans les eaux internationales. Selon les organisations de défense de droits des femmes, 100.000 à 150.000 avortements clandestins sont pratiquées chaque année par les Polonaises. En 2016, une proposition de loi prévoyant l'interdiction pure et simple de l'IVG a été rejetée par le Parlement. Elle avait suscité la colère de la population descendue en masse dans la rue.
Chypre. La partie grecque de Chypre a une législation proche de celle de la Pologne. Une loi datant de 1974 autorise bien l'IVG mais juste en cas de viol ou si deux médecins affirment qu'il existe un risque pour l'enfant à naître ou pour la femme enceinte. Officieusement cependant, des cliniques privées proposent l'avortement en échange de 600 euros en moyenne. Une somme importante dans ce pays où le salaire minimum est de 920 euros. La question de plus reste taboue sur cette île où l'Eglise orthodoxe a une grande influence sur les esprits.
Malte. Entrée dans l'Union européenne en 2004, Malte continue à strictement interdire l'avortement. La petite île méditerranéenne l'a même criminalisé en infligeant jusqu'à trois ans de prison aux femmes et aux médecins qui le pratiquent. En réalité cependant, aucune femme n'a jamais été emprisonné sous ce prétexte. Par conséquent, les Maltaises, ne souhaitant pas poursuivre leur grossesse, pratiquent un "tourisme abortif" vers l'Italie ou vers le Royaume-Uni. Ce dernier a recensé de 2002 à 2011, 591 IVG pratiqués sur son sol auprès de Maltaises. Autre solution, pratiquer une IVG payante dans une des cliniques privées de l'île et en se couvrant sous le prétexte officiel d'une fausse-couche. Enfin, il est aussi possible pour les femmes désireuses d'avorter de se faire envoyer par la poste des médicaments abortifs. Seule avancée enregistrée récemment dans l'île de 436.000 habitants : la pilule du lendemain y est autorisée depuis décembre 2016. Mais en pratique, rares sont les pharmaciens qui la proposent.
En Italie, c'est autorisé par la loi mais… En 1978, l'Italie a légalisé l'avortement. Mais une faille judiciaire empêche en réalité l'application pleine et entière de ce droit. Les médecins peuvent en effet refuser de le pratiquer en faisant jouer leur clause de conscience, ce qui est le cas de 70% des gynécologues. Par conséquent, le nombre d'avortements illégaux est élevé dans le pays, de 15.000 par an selon le gouvernement à 50.000, selon des chiffres avancés par des sources non gouvernementales.