C'est un soulagement pour les ONG de protection de l'environnement. Il sera bientôt impossible dans les 27 pays de l'Union européenne de trouver des cotons-tiges, des pailles, des gobelets, ou encore des couverts en plastique. Un texte européen, co-signé par le Parlement et la présidence du Conseil européen dans la nuit de mardi à mercredi, a entériné cette interdiction. Avec une ambition : réduire la pollution des océans. La dizaine de produits interdits représentent à eux seuls près de 70% des déchets marins. Le texte prévoit l'interdiction de ces produits dans deux ans, aucune chance, donc, de trouver des pailles en plastique à partir de 2021 dans vos supermarchés. Des alternatives existent et devraient rapidement s'imposer dans les grandes surfaces.
Les Etats européens sont de plus en plus engagés en matière de recyclage. AFP
Les enseignes se mobilisent. Certaines enseignes ont d'ores et déjà commencé à changer leurs habitudes. Le 1er janvier 2019, les gobelets, les assiettes et couverts, les cotons-tiges, les touillettes et les pailles auront totalement disparu des rayons des magasins Franprix. Des alternatives durables en bambou ou en bois pour leurs pique-niques et autres goûters d'anniversaire seront proposées aux clients de cette filiale du groupe Casino.
Chez Carrefour, on anticipe aussi cette interdiction. A partir de mi-janvier 2019, les clients de la marque ne trouveront plus aucune paille en plastique en magasin. "Nous avons décidé de les remplacer par des pailles en papier biodégradable ou en métal" explique à Europe 1 Bertrand Swiderski. Pour le directeur du développement durable de Carrefour, "c'est à nous, les grandes enseignes, d'impulser les changements d'habitudes des clients". Selon l'organisation de la COP24 qui s'est terminée la semaine dernière, une seule paille en inox lavable permet ainsi de remplacer environ 540 pailles en plastique jetées tous les ans.
Une plage de plastique à Lagos, au Nigeria. Stefan HEUNIS / AFP
Satisfaire le client en protégeant la planète. Pour Bertrand Swiderski, les enseignes de la grande distribution sont conscientes d'avoir créé des "modèles de consommation" depuis des décennies, basés sur l'omniprésence du plastique. L'engagement mondial de Carrefour consiste à impliquer les grandes marques comme Danone et Nestlé dans la recherche d'alternatives environnementales aux produits plastiques. "Prenez les petites briques de jus de fruits avec des pailles en plastique collées et emballées dans des sachets en plastique. Nous essayons de trouver une alternative qui puisse satisfaire les clients (en l'occurrence, les enfants) et réduire leur impact environnemental, un vrai casse-tête !"
Pour le directeur du développement durable, ce sont les clients qui ont le dernier mot : "même si nous essayons de réduire les déchets plastiques à usage unique, c'est eux qui font des choix de consommation. Si les pailles en papier ou en métal ne les satisfont pas, libre à eux de faire marcher la concurrence..." De nouvelles habitudes que les Français et les Européens devront adopter au plus vite.
D'autres alternatives existent. Sur internet, un véritable marché de petits produits alternatifs voit le jour : un gobelet en inox pour remplacer celui en plastique, des cotons-tiges en bambou réutilisables, des couverts en métal ou en carton pour les pique-niques…
L'association Bas les pailles s'active pour que les pailles en plastique deviennent un lointain souvenir. Mounia El Kotni, fondatrice de l'association, encourage les Français à préférer les pailles en inox, en verre, en sucre et même en pâtes, réutilisables ou biodégradables. Une alternative qui a un certes un coût, puisqu'un lot de quatre pailles en métal coûte environ 16€ sur le site boutiquezerodechet.com, mais est rapidement rentabilisé sur le long-terme. Sans compter que la paille peut aussi être tout simplement bannie de nos habitudes.
La boutique Lamazuna dans le 10e arrondissement de Paris. DR
Des articles zéro-déchets. De son côté, l'association Lamazuna propose des cotons-tiges en bambou, les oriculi. Ces petits morceaux de bois, réutilisables, à faire glisser dans l'oreille inspirés de pratiques asiatiques "fonctionnent comme une petite cuillère" explique leur créatrice Laëtitia Van de Walle à Europe 1, et coûtent moins d'un euro l'unité. "Nous n'avions pas anticipé cette interdiction, confie-t-elle, nous pensions que cela prendrait plus de temps, vu les enjeux. On ne le soupçonne pas mais la filière du coton-tige est très porteuse, les industriels n'avaient pas intérêt que leur produit soit interdit."
La marque propose des alternatives "zéro-déchets" à tous ces produits, et va même plus loin que l'interdiction européenne en proposant des lingettes de démaquillage en microfibre, des éponges en konjac (une racine qui ressemble à une pomme de terre), des cosmétiques solides à base de produits bio et des brosse-à-dents en bioplastique. Ces produits sont disponibles en ligne et en boutique dans le 10e arrondissement de Paris. Laëtitia Van de Walle admet que tous ces produits "représentent un petit investissement de départ entre 10 et 20€, mais font réaliser des économies dès la première année d'utilisation".
Toutes ces alternatives sont une façon de commencer dès maintenant à changer nos habitudes.
Les oriculis, alternatives aux cotons-tiges, sont faits de bambou et sont réutilisables. DR