Lundi après-midi, les étoiles vont briller pour les chefs. Le guide Michelin révèle son édition 2018, avec son lot de surprises, de déceptions, de polémiques, parfois. Selon le chiffre que révèle Europe 1 lundi, ce cru 2018 compte 621 étoilés. Cinq de plus que l'an dernier. Une cérémonie qui démarrera par un hommage à Paul Bocuse, mort le 20 janvier. Le Premier ministre Édouard Philippe sera présent et prononcera un discours à 19h pour célébrer l'excellence de la gastronomie française. Pour le reste il faudra attendre et la question se pose ce matin. Le Michelin est-il toujours une référence ? Comment tente t-il de se réinventer ?
Europe 1 a pu assister en exclusivité à plusieurs coups de fils passés à des chefs nouvellement étoilés. C'était vendredi au siège du Michelin à Paris. Lorsqu'ils apprennent la bonne nouvelle, les chefs laissent exploser leur joie car pour beaucoup d'entre eux, c'est une consécration. Ils vont ainsi avoir une visibilité en France et à l'international. Et puis il y a des retombées économiques : une étoile équivaudrait à entre 20% et 30% de chiffre d'affaires en plus.
"Il y a une vraie remise en cause du guide". Il n'en reste pas moins que le Michelin est critiqué. Tout récemment, Sébastien Bras, chef trois étoiles du restaurant Le Suquet, dans l'Aveyron, a demandé à ne plus figurer au Michelin. "Trop de pression", a-t-il justifié. Après avoir tergiversé, le Michelin a accepté sa demande, une première. Mais pour Franck Pinay-Rabaroust, du site spécialisé Atabula.com, le guide a pris un risque. "Ça veut dire que pour la première fois, le guide Michelin ne peut pas prétendre à l'exhaustivité des tables, puisque des chefs peuvent maintenant dire, 'ben non finalement, on ne veut pas être dans le guide donc désolé mais ça ne nous intéresse plus'". "Je pense que le guide Michelin vient de se tirer une balle dans le pied, il y a une vraie remise en cause du guide", ajoute-t-il.
"Il ne faut pas cracher dans la soupe du Michelin". Et puis d'autres chefs ont préféré changé de modèles, pour passer sous le radar du guide Michelin. C’est le cas de Flora Mikula, ex-chef étoilée à Paris, avec son restaurant L'Auberge, qui dit retrouver une certaine liberté. "C'est toujours cette peur d'être jugée, on est dans une espère de tiroir, de boîte", explique-t-elle. "Je me sens plus libre, plus détachée de tout ça, moins d'épée de Damoclès sur la tête. Mais il ne faut pas cracher dans la soupe du Michelin : ça reste une référence, le Graal des cuisiniers".
À 117 ans, le guide veut montrer qu'il évolue. Face aux critiques, le guide né en 1900 veut montrer qu'il évolue, et même qu'il est en phase avec son époque. Il vient ainsi de racheter 40 % des parts du Fooding qui fait, lui aussi, une sélection de restaurants mais avec autre regard. Et c'est justement ce qui intéresse le guide, explique sa directrice Claire Dorland-Clauzel. "Ils nous apportent une clientèle différente, plus 'bistronomie', plus urbaine aussi", analyse-t-elle. "Et nous on leur apporte l'assise d'une grande entreprise, d'une grande marque de l'international qu'ils ne sont pas du tout". Le Michelin qui est présent via trente-et-une éditions à travers le monde. Au rang des nouveautés cette année : Taipei et Canton. Et au pays de la gastronomie, figurer au Michelin reste pour les chefs français la meilleure publicité au monde. Pour ses trois étoiles, le chef Yannick Alleno avait ainsi recensé pas moins de 7.500 articles de presse !
Anne-Sophie Pic, seule femme à la tête d'un restaurant trois étoiles en France, marraine de l'édition 2018
Disponible à partir du 9 février, le guide Michelin France, dont la sélection est réalisée à partir des visites d'inspecteurs anonymes, inaugure par ailleurs un système de parrainage pour accompagner les nouveaux étoilés. La marraine cette année est la chef Anne-Sophie Pic, seule femme à la tête d'un restaurant trois étoiles en France. En 2017, Il comptait 616 restaurants étoilés, dont 27 trois étoiles (un nouveau), 86 deux étoiles (12 nouveaux) et 503 une étoile (57 nouveaux). Sa version papier s'est vendue à quelque 52.000 exemplaires, selon Edistat, mais les consultations du site de Michelin Restaurants se comptent par millions, souligne Michelin.