Denis Safran est intervenu sans savoir où se trouvaient les terroristes et quel était le niveau de risque. 2:16
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Samuel Etienne, édité par C.L. , modifié à
Entré parmi les premiers dans le Bataclan avec la colonne d'urgence de la BRI, le médecin Denis Safran se souvient d'un chaos indescriptible et d'avoir immédiatement porté secours aux victimes désemparées.
INTERVIEW

Denis Safran, médecin-chef de la Brigade de Recherche et d'Intervention (BRI), est l'un des premiers à être entré au Bataclan après l'attaque terroriste meurtrière du 13 novembre 2015. Il entre dans la salle de spectacle sans savoir où sont les terroristes et quels sont les risques imminents. Surtout, il voit l'horreur sans filtre. Avant les cérémonies d'hommage un an après, Denis Safran s'est confié à Samuel Etienne, vendredi matin sur Europe 1 et affirme ne pas être traumatisé. "Je suis un vieux médecin avec un certain nombre d'années d'expérience de réanimation. Je suis entraîné avec les hommes de la BRI. Tout ce que j'ai vu le soir du 13 novembre ne m'a évidemment pas laissé indifférent mais je n'en garde pas de traumatisme persistant".

"Une scène de combat". Ce qui ne l'empêche pas de rester profondément marqué par la violence qui l'a assailli en arrivant au Bataclan. Denis Safran se souvient du moindre détail : "Nous arrivons avec la colonne d'urgence et nous passons devant les cafés où nous voyons déjà des victimes sur le trottoir et un désordre indescriptible. C'est une scène de combat". Vient alors le moment fatidique d'entrer dans la salle de concert, dans la plus totale inconnue. "En entrant dans le hall du Bataclan, nous voyons des victimes par terre, manifestement décédées. La colonne avance et débouche sur la fosse de la salle. Nous voyons alors des centaines de gens couchés les uns sur les autres et déjà de nombreuses victimes sur les côtés", se souvient-il.

"Le médecin prend le dessus". Sa mission, en tant que médecin-chef de la BRI, est de suivre la colonne d'urgence afin de pouvoir prendre en charge sans délai un fonctionnaire de la brigade qui serait blessé. Ce rôle, "je ne l'ai pas tenu ce soir-là. Quand nous sommes rentrés, beaucoup de spectateurs sont sortis de la salle, dont des blessés. Certains légers et d'autres plus graves, qui ne pouvaient pas marcher et étaient traînés dehors. A ce moment, le médecin que je suis prend le dessus et s'occupe uniquement des victimes".

Sortir les victimes de la salle. S'il avoue être à ce moment stupéfait par "l'ampleur du drame", Denis Safran ne ne sens pas dépassé ou impuissant. "Très vite, le professionnalisme reprend le dessus. On ne sait pas où sont les terroristes, si ça va exploser. Alors le premier réflexe c'est d'extraire le maximum de victimes pour les mettre à l'abri si les tirs reprennent". La tâche est compliquée puisque le médecin ne peut pas soigner les victimes dans un endroit aussi dangereux : "On ne peut pas faire de soins dans une zone avec un risque de tir permanent. On a donc sorti les victimes pour que le personnel médical puisse les prendre en charge".

Pas de lien avec les victimes. Un an après l'attentat qui a fait 130 morts dont 90 au Bataclan, Denis Safran estime que la BRI a tiré les leçons du drame : "Nous avons amélioré nos pratiques, notamment la coordination avec les services de secours en aval pour que ce soit plus efficace". Pour autant, il n'a pas demandé des moyens supplémentaires car "ce n'est pas le rôle premier de la BRI que de soigner les victimes sur place". Lui qui a soigné des dizaines de personnes le 13 novembre n'a pas souhaité revoir les personnes en question : "Il ne faut pas mélanger les choses. En tant que médecin, on a de la compassion, mais il ne faut créer de lien. J'ai rencontré les associations mais je n'irai pas plus loin".