Près de 38,5% des enseignants sont en grève dans les écoles jeudi, selon le ministère de l'Education, pour protester contre la "pagaille" provoquée par la multiplication des protocoles sanitaires, tandis que le SNUipp, premier syndicat du primaire, annonce 75% de grévistes. Une école primaire sur deux est fermée, selon le SNUipp-FSU. Dans les collèges et lycées, 23,7% des enseignants sont mobilisés, selon le ministère, tandis que le Snes-FSU, premier syndicat du second degré, annonce 62% de grévistes.
Ces différences sont dues aux méthodes de calcul des deux parties prenantes. Pour le primaire, le ministère prend en compte les enseignants qui font cours face à une classe, tandis que les syndicats tiennent également compte des directeurs d'école, qui sont très mobilisés jeudi. Pour le secondaire, les chiffres de l'Education nationale correspondent aux professeurs qui avaient cours jeudi matin, et non pas ceux de l'après-midi ou ceux qui n'ont tout simplement pas cours. Les chiffres vont donc évoluer dans le courant de la journée, mais déjà, la mobilisation est grande.
"Depuis janvier, on ne peut plus faire notre métier d'enseignant"
A Marseille par exemple, le mouvement de grève est très suivi. Au moins 2.200 personnes sont rassemblées dans un cortège de manifestation. "Halte aux délires protocolaires", signalent certaines pancartes. Des professeurs, qui commencent à avoir du mal à faire leur métier, sont en train de craquer. "Si on est sur une mobilisation historique, ce n'est pas pour rien. C'est pour montrer que l'école craque complètement", estime une secrétaire du syndicat SNUipp au micro d'Europe 1.
"En fait, depuis janvier, on ne fait pas notre métier. On n'est plus enseignant, on est vérificateur d'attestation. Messieurs (Jean) Castex et (Jean-Michel) Blanquer se contentent de l'affichage des écoles ouvertes. Mais on ne peut pas fonctionner comme ça, l'école n'est pas de la garderie."
La profession "au bord de l'implosion"
La profession se sent insultée par son ministre de tutelle, et appelle à la démission de Jean-Michel Blanquer. Le système est bord de l'implosion, de l'école jusqu'au lycée à en croire Nicolas Voisin, enseignant de lettres dans un établissement professionnel marseillais, qui déplore que les profs absents ne soient pas remplacés.
"1.150 emplois supprimés depuis quatre ans dans les lycées professionnels, on le paie. Nous sommes au bord de l'implosion, et ça tient le coup depuis deux ans grâce au zèle des fonctionnaires de l'Education nationale", affirme l'enseignant sur Europe 1. Ces professeurs rencontrés dans la cité phocéenne attendent un virage du gouvernement à 180 degrés, avec plus de personnel, plus de moyens et moins de protocoles.
La grande débrouille devant les établissements scolaires
Un mouvement de grève qui oblige des parents à s'organiser autrement avec leurs enfants, et qui demande aux enseignants qui ne suivent pas le mouvement de s'adapter. C'est le cas à l'école Jacques-Prévert d'Antibes, près de Nice, où Europe 1 s'est arrêtée jeudi matin. C'était la grande débrouille. Certains parents ont dû jongler entre les établissements totalement fermés et ceux qui accueillaient les enfants. "La maternelle est fermée, le primaire est ouvert", souligne un père d'une petite fille au micro d'Europe 1. "Cela m'arrange parce que je préfère être au calme, mais je pouvais la garder", assure-t-il.
Ce parent est partagé sur l'utilité de la grève. "Oui pour les effectifs, moins pour les protocoles. C'est plus facile du fait qu'il n'y ait plus de tests PCR. Les trois autotests, c'est à la maison, on fait une déclaration. Je ne pense pas que ce soit insurmontable pour les parents", explique le père de famille.
>> LIRE AUSSI - Comment les parents accueillent-ils la grève des enseignants ?
A Antibes, une majorité de parents soutient le mouvement de grève
La plupart des enfants ont pu être accueillis en classe dans cette école d'Antibes, mais beaucoup de parents rencontrés se disent solidaires des enseignants, comme cette mère de famille : "Si la maîtresse avait décidé de faire grève, je l'acceptais. Je comprends tout à fait les revendications. (Le protocole) change tout le temps, ce n'est pas normal. C'est déstabilisant pour les enfants et pour les parents, et encore plus pour les professeurs j'imagine".
Un autre parent se enchérit au micro d'Europe 1 : "On a eu un mail d'une des enseignantes en grève qui expliquait que cela perturbait énormément ses cours. Certains enfants veulent se faire tester, revenir plus tard... Cela interrompe le fonctionnement de sa classe". Une autre mère de famille avoue que "faire des tests PCR à un enfant tous les deux jours, c'est impossible". D'autres parents estiment ne pas être à l'aise avec les autotests. Beaucoup de signes donc qui amènent les familles à soutenir le mouvement de grève national.