"Non à la mafia." C’est le cri lancé mercredi par une trentaine de personnalités corses, dont le prix Goncourt Jérôme Ferrari, mais aussi un ex-dirigeant du FLNC, des chanteurs ou des entrepreneurs, pour dénoncer une "emprise mafieuse d'une intensité jamais atteinte" dans l'histoire de l'île, avec une dizaine de meurtres déjà commis depuis le début de l’année, ainsi que des explosions ou des incendies visant des résidences, des restaurants ou des grandes surfaces.
Europe 1 s'est rendu dans un garage à motos incendié fin juillet, un acte suivi un mois plus tard par une tentative d'incendie dans une concession automobile. Point commun de ces deux établissements : ils appartiennent tous les deux à Jean-André Miniconi, candidat aux élections municipales d’Ajaccio. Là-bas, les employés ne sont plus tranquilles et la plupart préfère ne pas parler au micro par peur des représailles. "Quand j’arrive le matin, je jette un coup d’œil, je fais gaffe", confie un employé.
Le patron visé refuse de jeter l'éponge+
José, un autre salarié, veut témoigner car il en a marre de la violence et des silences qui l’accompagnent. "C’est l’omerta, c’est la loi du silence. Ça existe depuis la nuit des temps et ça existera toujours", regrette-t-il, fataliste. "On est obligés de faire avec, en espérant que les choses changent dans les années à venir."
L'homme qui a essayé de mettre le feu a été retrouvé par la police. Il a assuré aux enquêteurs qu’il avait agi pour de l’argent tout en refusant de livrer le nom de ses commanditaires, mais le patron de la concession y voit un lien avec ses ambitions électorales à Ajaccio. "Cela fait 40 ans que ma famille gère des concessions automobiles, et il a fallu que je fasse une déclaration début juillet dans laquelle je me présentais pour commencer à avoir des incendies", affirme Jean-André Miniconi.
Un sujet au menu des discussions politiques
Malgré ces incendies, le patron de ces entreprises refuse de jeter l’éponge pour les municipales. Il voit d’un très bon œil la création de ce collectif anti-mafia, également saluée par le maire actuel de la ville, Laurent Marcangeli, au micro d'Europe 1 : "Il est bon que la société civile se mobilise. Les personnalités sont intéressantes pour mener ce combat", veut croire l'édile, alors que le collectif anti-mafia demande aux politiques insulaires de "s'engager sans ambiguïté" et à l'État "d'inclure dans le code pénal le délit d'association mafieuse". L'Assemblée de Corse, qui doit se réunir en session jeudi et vendredi, devrait s'emparer du sujet.