33.700 manifestants en France, dont 4.000 à Paris : revivez l'acte 20 des gilets jaunes

Les "gilets jaunes" sont de nouveau dans la rue samedi pour "l'acte 20". Ici devant la gare de l'Est, à Paris.
Les "gilets jaunes" sont de nouveau dans la rue samedi pour "l'acte 20". Ici devant la gare de l'Est, à Paris. © Nathalie Chevance / Europe 1
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Après un "acte 19" plus calme mais avec une mobilisation plus forte que la semaine précédente, l'"acte 20" des "gilets jaunes" est marqué par de nombreuses interdictions de manifester. C'est sans doute à Avignon que la tension est la plus forte.

Indifférents au débat national qui se poursuit, ils continuent à fouler le pavé. Les "gilets jaunes" se sont donnés rendez-vous un vingtième samedi de mobilisation. 33.700 manifestants ont été comptabilisés par le ministère de l'Intérieur sur toute la France, dont 4.000 à Paris, un chiffre en baisse par rapport aux 40.500 recensés la semaine dernière (5.000 à Paris), selon les chiffres du ministère de l'Intérieur.

Les "gilets jaunes", qui contestent depuis le début de leur mouvement le 17 novembre les chiffres officiels, ont quant à eux recensés 102.713 personnes descendues dans la rue samedi, selon un chiffre provisoire indiqué sur la page Facebook du "Nombre Jaune". Des défilés ont lieu à Marseille, Rennes, Caen, Rouen, Montbéliard, Strasbourg ou encore Avignon. Pour cet "acte 20", de nouvelles interdictions de manifester avaient été prononcées à Paris, sur les Champs-Élysées et dans de nombreuses villes de province.

Les infos à retenir :

  • Il était à nouveau interdit de manifester sur les Champs-Élysées, mais aussi à Avignon, Toulouse ou Rouen
  • 33.700 manifestants ont été comptabilisés dans toute la France, dont 4.000 à Paris
  • Des tensions entre police et manifestants ont éclaté dans plusieurs villes, notamment Avignon

De nombreuses interdictions de manifester

Le 18 mars, après des violences et pillages survenus à l'occasion du 18ème acte des "gilets jaunes" à Paris, le Premier ministre Édouard Philippe avait annoncé l'interdiction de manifester "chaque fois qu'il le faudra", dans les quartiers "les plus touchés". C'est à nouveau le cas sur les Champs-Élysées samedi.

En région, vingt-sept arrêtés d'interdiction établis par les préfectures ont été également recensés. C'est le cas à Saint-Étienne, Lille, Toulouse, Épinal et Rouen mais aussi à Avignon. La préfecture du Vaucluse, qui craint la présence de "groupes activistes violents", a interdit tout rassemblement ou manifestation de 9 heures à minuit, "intra-muros" et sur plusieurs axes périphériques. 

25 interpellations à Paris, de rares tensions

Le ministère de l'Intérieur a comptabilisé 4.000 manifestants au total dans la capitale. Certains se sont rassemblés devant la gare de l'Est à Paris, avant de prendre la direction du Trocadéro dans le calme. "On vient pour les mêmes raisons que le 17 novembre (le premier jour de mobilisation, NDLR). On n'a rien eu", explique Nadine, 51 ans, qui travaille dans les services à la personne à Drancy, en Seine-Saint-Denis. "C'est toujours le même objectif : la justice sociale, et le RIC (référendum d'initiative citoyenne), surtout quand il y a des choix économiques à faire", a renchéri Jean-Édouard, 43 ans, venu de Seine et Marne.

Si la manifestation se passe globalement dans le calme dans la capitale, quelques tensions ont été constatées en milieu de journée aux alentours de la rue de Rivoli, selon Le Parisien. "Les CRS ont lancé des tirs de gaz lacrymogène. Un Gilet jaune blessé a été évacué par les policiers", précise le site du quotidien

Par ailleurs, selon une source préfectorale, les forces de l'ordre ont procédé à 8.053 contrôles préventifs à Paris, ainsi qu'à 25 interpellations. 

Plusieurs foyers de tensions en région

À Avignon, où la préfecture du Vaucluse a interdit tout rassemblement ou manifestation, des "gilets jaunes" se sont tout de même donné rendez-vous au "Palais des Papes", arguant qu'"il n'est pas interdit de se promener". En début d'après-midi, des tensions avec les forces de l'ordre se sont fait sentir à l'intérieur des remparts. Pendant une heure, ils ont joué au chat et à la souris avec la police qui a fini par les repousser hors de l'enceinte historique. 

Au total, plusieurs centaines de personnes ont manifesté dans la cité des Papes selon la préfecture, 2.000 selon les organisateurs. Le cortège s'est ébranlé vers 14h aux portes de la ville historique entièrement barricadée par la police, précédé par une centaine de motards "gilets jaunes" qui faisaient le tour des remparts de la Cité des papes, par les boulevards périphériques. En milieu d'après-midi, les manifestants ont essuyé des tirs de grenades lacrymogènes. Les "streets medics", nombreux, ont porté secours à un jeune homme blessé à l'arcade sourcilière et à un quinquagénaire victime d'une chute.

21 personnes ont été placées en garde à vue samedi pour des destructions, des violences ou des ports d'arme, a indiqué la préfecture samedi soir. "Le bilan de cette journée à Avignon s'élève à 3 blessés légers, dont 1 policier de la DDSP 13, venu en renfort et 4 CRS contusionnés", a ajouté la préfecture dans un communiqué. 

Nathalie Chevance / Europe 1

 

Nathalie Chevance / Europe 1

À Caen, également, la manifestation a donné lieu à quelques tensions. "Vers midi, quelques dizaines de gilets jaunes ont fait face aux forces de l'ordre présentes devant le commissariat de police de Caen. Des manifestants ont ensuite essayé d'entrer dans le centre Leclerc rue Lanfranc. Une vitre a été dégradée. Les gilets jaunes devraient à nouveau défiler cet après-midi à Caen", indique France Bleue. 

À Saint-Etienne, des casseurs ont aussi infiltré les cortèges, toujours selon France Bleue. Des manifestants arborant "casques et masques à gaz" ont incendié un conteneur rue Paul Bert. Un autre incendie a été constatée le long "des voies SNCF qui mènent vers Firminy".

Deux policiers ont par ailleurs été légèrement blessés à Montpellier par des jets de projectiles, lors d'une manifestation de "gilets jaunes" qui a rassemblé 1.650 personnes, selon la préfecture, 2.500 selon les organisateurs. L'un des policiers a été blessé à la jambe et pris en charge par les pompiers, l'autre a été atteint au visage, a précisé la préfecture. Huit personnes "visant à créer des troubles à l'ordre public ont été interpellées", selon la préfecture. Trois ont été relâchées.

Plusieurs milliers de manifestants à Bordeaux. À Bordeaux, l'un des bastions du mouvement, le dispositif de sécurité et de secours a été drastiquement renforcés. Les commerçants du centre-ville ont été appelés à "prendre des mesures de précaution particulières", en retirant notamment de la voie publique tout ce qui peut "faire office de projectile". La préfecture a publié les arrêtés désormais habituels d'interdiction de manifester dans une longue liste de rues et places du centre ville, encore élargie. Le nouveau maire de Bordeaux, Nicolas Florian, a demandé aux habitants de "rester chez eux" et aux commerces de "baisser leur rideau" pour créer "une ville morte". 

En milieu de journée, plusieurs milliers de "gilets jaunes "ont commencé à se réunir place de la Bourse, en bord de Garonne. Parmi eux : Eric Drouet, l'une des figures médiatiques du mouvement, mais aussi le chanteur Francis Lalanne et l'ouvrier et syndicaliste Philippe Poutou. En milieu d'après-midi, plusieurs incidents avaient été constatés, dont des vitrines de banque dégradées et quelques incendies allumés. 

À Lille, entre 1.000 et 2.000 personnes ont défilé en empruntant un itinéraire "alternatif", après l'interdiction du centre-ville par la préfecture. Des accrochages ont éclaté à plusieurs reprises, les forces de l'ordre faisant parfois usage de gaz lacrymogène, notamment après qu'un groupe de "black blocs", vêtus de noir et cagoulés, a aspergé de peinture la devanture d'une banque. Quatre personnes ont elles été interpellées à la suite d'un "incident entre des 'gilets jaunes' et des supporters de football", selon la préfecture du Nord.

Une manifestation en soutien à Geneviève Legay à Nice

Attac a appelé les "gilets jaunes" à brandir des "drapeaux de la paix" arc-en ciel, comme celui que portait l'altermondialiste Geneviève Legay lorsqu'elle a été poussée par un policier samedi dernier en manifestant dans un périmètre interdit.

À Nice, où les faits s'étaient déroulés, plusieurs centaines de manifestants ont défié les forces de police samedi devant leur commissariat, après qu'une manifestante a été grièvement blessée la semaine dernière au cours d'un rassemblement interdit. Parti de la gare en début d'après-midi, le cortège était composé de gilets jaunes et de militants de gauche et d'associations. Après avoir marqué un arrêt à l'hôpital Pasteur où est hospitalisée Geneviève Legay, les manifestants se sont rendus à la caserne Auvare. Ils y ont demandé que le commissaire responsable des opérations la semaine dernière aille "en prison". La confrontation avec les forces de l'ordre a duré de longues minutes mais n'a donné lieu à aucun incident.

Dans un communiqué, le maire de Nice Christian Estrosi a tout de même réclamé "un état d'urgence pour les policiers et les gendarmes". "Je tire le signal d'alarme: les forces de l'ordre sont au bord de l'épuisement et risquent de faire jouer légitimement leur droit de retrait. Je demande au gouvernement et au ministre de l'Intérieur de décréter un état d'urgence pour les policiers et les gendarmes et de réunir, au plus vite, l'ensemble des syndicats et des interlocuteurs (...)", indique l'élu. La veille, le député des Alpes-Maritimes, Eric Ciotti, avait annoncé avoir écrit au ministre de l'Intérieur pour lui demander de "défendre les policiers niçois insultés sur les réseaux sociaux" et de "déposer plainte à l'encontre des responsables des menaces et des insultes nominatives".