"Montrez que le mouvement n'est pas fini", voilà le mot d'ordre qui circule sur les réseaux sociaux. Car si la mobilisation a très nettement faibli lors du dernier rassemblement, le 29 décembre, "les gilets jaunes" entendent continuer à mettre la pression sur le gouvernement. D'autant que l'interpellation, mercredi, de l'un de leurs porte-voix, Éric Drouet, a tendu certains militants, prêts à hausser le ton.
Ce samedi, près de 50.000 personnes ont manifesté à travers la France pour "l'acte 8" de la mobilisation qui a parfois viré à l'affrontement avec les forces de l'ordre, suscitant l'indignation du chef de l'État.
Les principales informations à retenir
- "L'acte 8" du mouvement a rassemblée 50.000 personnes en France, selon le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner. À Paris, ils ont été 3.500 à défiler dans les rues de la capitale. 24 personnes ont été interpellées, selon la Préfecture de Police
- Le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux a été évacué après une intrusion dans la cour de son ministère situé rue de Grenelle
- Emmanuel Macron a dénoncé une "extrême violence"
Un regain de mobilisation
Sur le plan comptable, les "gilets jaunes" ont réussi leur pari en mobilisant bien plus que les 32.000 manifestants du 29 décembre, même si le ministre de l'Intérieur a assuré que ce mouvement n'était "pas représentatif de la France". Les "gilets jaunes" étaient 50.000 personnes samedi en France, a annoncé sur LCI Christophe Castaner, tout en minimisant la portée de ce chiffre. "50.000, ça fait un peu de plus de une personne par commune de France. C'est cela la réalité du mouvement des 'gilets jaunes' aujourd'hui. Donc on voit bien que ce mouvement n'est pas représentatif de la France", a déclaré Christophe Castaner, qui a également condamné les heurts qui ont éclaté en marge des manifestations. Christophe Castaner a également insisté sur la "détermination" du gouvernement face à cette contestation qui fait vaciller l'exécutif depuis un mois et demi.
À Paris, 3.500 manifestants ont défilé dans les rues de la capitale et 24 personnes ont été interpellées, selon la Préfecture de Police. Emmanuel Macron a dénoncé une "extrême violence" venue "attaquer la République". "Une fois encore, une extrême violence est venue attaquer la République - ses gardiens, ses représentants, ses symboles. Ceux qui commettent ces actes oublient le cœur de notre pacte civique. Justice sera faite. Chacun doit se ressaisir pour faire advenir le débat et le dialogue", a écrit le chef de l'État sur Twitter.
Une fois encore, une extrême violence est venue attaquer la République - ses gardiens, ses représentants, ses symboles. Ceux qui commettent ces actes oublient le cœur de notre pacte civique. Justice sera faite. Chacun doit se ressaisir pour faire advenir le débat et le dialogue.
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) 5 janvier 2019
À Paris, un ministère attaqué et plusieurs incidents
Parmi les incidents ayant émaillé la journée, le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, a dû être évacué de ses bureaux rue de Grenelle après une intrusion de "gilets jaunes" qui ont défoncé la porte du ministère avec un engin de chantier. Une enquête est ouverte, selon le parquet de Paris.
Les images du ministère chargé des relations avec le parlement de @BGriveaux avec des dégâts sur la porte d’entrée. Des individus ont « défoncé la porte » avec un engin de chantier selon @LCI.
— Remy Buisine (@RemyBuisine) 5 janvier 2019
Benjamin Griveaux a dû être évacué du ministère, incident vers 16H15. pic.twitter.com/4iYbUUjio4
Parti des Champs-Élysées, le défilé parisien s'était pourtant déroulé sans heurts dans la matinée, mais la situation s'est progressivement tendue dans la capitale où la préfecture de police a recensé 3.500 manifestants. Selon la préfecture, 24 personnes ont été interpellées.
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Des premiers projectiles ont été lancés aux alentours de 14h sur les forces de l'ordre qui ont répliqué par des tirs de lacrymogènes sur les quais de Seine, près de l'Hôtel de Ville, puis des incidents ont éclaté sur une passerelle reliant les deux rives de la Seine au niveau du Jardin des Tuileries. Un peu plus loin, un début de feu a été signalé sur une péniche amarrée le long de la Seine. Les pompiers sont intervenus sur les lieux.
PARIS #5janvier - Tensions entre #GiletsJaunes et gendarme sur un pont proche de l’Assemblée Nationale #Acte8pic.twitter.com/WtbWolw4Mr
— Clément Lanot (@ClementLanot) 5 janvier 2019
Plusieurs scooters et une voiture ont été incendiés sur le boulevard Saint-Germain où des barricades de fortune ont été érigées. En début de soirée, les manifestants sont retournés sur les Champs-Elysées, point névralgique de la mobilisation, avant d'en être chassés par les CRS.
De nombreuses actions en régions, des violences un peu partout
À Rouen, où 2.000 personnes défilaient, un manifestant a été touché à la tête par des tirs de lanceurs de balles de défense. À Montpellier, quatre CRS et trois "gilets jaunes" ont été légèrement blessés à la suite de jets de pierres et de bouteilles dans le secteur de la gare Saint-Roch, et cinq personnes interpellées, selon les autorités. Six interpellations ont eu lieu à Saint-Étienne pour des jets de projectiles sur les forces de l'ordre, outrage et violences envers personnes dépositaires de l'autorité publique. À Rennes, un groupe de manifestants a cassé une porte d'accès à la mairie avant de s'engouffrer à l'intérieur du bâtiment.
Des #giletsjaunes forcent la porte de l’hôtel de ville a #rennespic.twitter.com/6hApvHFBh0
— Ouest-France 35 (@ouestfrance35) 5 janvier 2019
Un peu partout en France, les cortèges de "gilets jaunes", insensibles aux concessions de l'exécutif et au futur grand débat national, avaient là aussi débuté dans un calme relatif pour cette première mobilisation de l'année 2019 qui faisait figure de test. À Toulouse, la mobilisation était en hausse par rapport au 29 décembre, avec au moins 2.000 "gilets jaunes" contre 1.350 samedi dernier. Mais en fin de journée, des jets de projectiles, des feux de poubelles et diverses dégradations ont donné lieu à 22 interpellations. À Bordeaux, ils étaient environ 4.600 à manifester, retrouvant leur niveau de mobilisation d'avant les fêtes de fin d'année et consacrant la capitale de Nouvelle-Aquitaine comme l'un des bastions du mouvement.
À Marseille, une cinquantaine de "gilets jaunes" se sont retrouvés à 10 heures samedi matin dans les locaux du journal La Provence, à l'invitation de son propriétaire Bernard Tapie, qui ne cache pas son soutien au mouvement. Il a proposé de mettre le hangar à papier du journal à disposition des manifestants, afin qu'ils puissent lancer le "mouvement gilet jaune", une association à vocation politique qui compte déjà 14.000 pré-inscriptions.
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L'initiative de l'homme d'affaires ne plait en revanche pas du tout aux journalistes de La Provence, qui dénoncent une confusion des genres. "Les accueillir donne l'impression que l'on roule pour eux. On reçoit un mouvement qui porte des revendications politiques et sociales. C'est un peu jouer les apprentis sorciers. Demain, n'importe quel mouvement peut revendiquer de se réunir au sein du journal", s'indigne Éric Breton, délégué du Syndicat national des journalistes (SNJ) au micro d'Europe 1.
Un dispositif de sécurité revu à la baisse
Misant sur une journée plus calme, les autorités ont ajusté le dispositif de sécurité. Selon les informations d'Europe 1, celui-ci devrait être au moins deux fois moins important que lors des mobilisations de fin novembre, et encore davantage par rapport aux samedis les plus tendus de décembre. Avec moins de forces de sécurité mobilisées, mais aussi moins de moyens spéciaux - comme les canons à eau ou les véhicules blindés de la gendarmerie -, la préfecture de police de Paris évoque un dispositif "adapté et adaptable".
Selon les informations d'Europe 1, aucune menace spécifique émanant de l'ultra gauche ou l'ultra-droite n'a par ailleurs été identifiée en amont de cette journée de mobilisation.
Et ensuite… un "acte 9" ?
Le groupe "La France en colère" a lancé un événement sur Facebook pour organiser un rassemblement dans la ville de Bourges, qualifiée de "centre de la France", le 12 janvier prochain. "Pas de lutte des classes, tous chez les Bourgeois!" (sic), assène-t-on dans le descriptif de l'événement. "Tous les détails seront communiqués sous peu (…). Un rassemblement de tous au centre pour confirmer notre unité et permettre à tous d'être à distance égale en partance des grandes villes".
Une autre page Facebook, "La France énervée", évoque quant à elle un rassemblement sur le parvis de la Défense, près de Paris.