Ils étaient une centaine au départ de leur marche vendredi et ont terminé à plusieurs centaines près de Matignon samedi : les opposants au projet de mégacomplexe Europacity ont fait entendre leur voix, alors que le gouvernement se penche sur le sujet. "On est fatigués, on a mal aux pieds, mais on est contents", sourit Dominique Damour, administratrice du CPTG, un collectif d'opposants.
Les manifestants étaient partis à pieds vendredi matin du "triangle de Gonesse" (Val-d'Oise), terres agricoles où doit s'implanter d'ici 2027 ce grand centre de commerces et de loisirs. Ils ont achevé leur marche samedi en fin d'après-midi près des bureaux du Premier ministre. Une délégation a demandé à être reçue à Matignon, sans succès. "On nous a renvoyé vers la ministre de l'Environnement", Élisabeth Borne, explique aux manifestants, Bernard Loup, chef de file des opposants.
"Des rumeurs évoquent un abandon d'Europacity"
La ministre a mené ces dernières semaines une vaste consultation, en recevant tous les acteurs de ce projet controversé, dont les opposants. "Des rumeurs évoquent un abandon d'Europacity", poursuit Bernard Loup, "mais rien n'a été dit, ne crions pas victoire", ajoute-t-il. Outre l'abandon d'Europacity, les opposants réclament aussi le report du chantier de la gare de métro qui doit desservir la zone, l'arrêt de l'ensemble des projets d'urbanisation du site et demandent la "préservation des terres agricoles".
Parmi les manifestants, des élus, dont Julien Bayou, conseiller régional et porte-parole du parti EELV. Chrystelle, engagée dans un mouvement citoyen à Bagnolet, est venue de Seine-Saint-Denis, le département voisin. "On est tout béton chez nous aussi. Il faut qu'on arrête ces dérives", dit-elle. "Les terres, il y en a plus beaucoup", ajoutent Françoise et Jean, un couple de retraités du Val-d'Oise. Françoise, fille d'agriculteur, a vu les terres où travaillait son père être peu à peu "bétonnées". "Maintenant c'est une zone industrielle, une autoroute, des logements".
"Tout sera vérifier par les structures de l'Etat"
"On aimerait avoir une agriculture de proximité", poursuivent-ils, convaincus de la viabilité de Carma, le projet alternatif des opposants. Ces derniers ont balayé les mesures "écologiques" présentées vendredi par les promoteurs d'Europacity, qui se sont notamment engagés à recréer des espaces naturels en compensation de la construction du complexe.
"Du greenwashing", raille Bernard Loup. Une accusation qui fait bondir Europacity: "on ne va pas faire semblant de planter 4.000 arbres ou de recréer 80 hectares de nature en Ile-de-France. Tout sera vérifié par les structures de l'Etat", rappelle David Lebon, directeur du développement. Bernard Loup a aussi fustigé les arguments avancés par les élus locaux, qui ont fait bloc vendredi autour des promoteurs, en défendant un projet "essentiel" pour cette zone défavorisée. "Arrêtons d'utiliser les difficultés sociales du territoire pour un projet inutile", martèle l'opposant.