"Une explosion de cas" : le nombre de foyers de fièvre catarrhale ovine (FCO), qui touche essentiellement moutons et brebis, a plus que quadruplé en France en huit jours, avec 190 cas confirmés au 22 août dans des départements du nord du pays. "On fait face à une explosion des cas, mais toujours à proximité des premiers foyers (...) dans une zone qui s'élargit peu", a-t-on indiqué vendredi au ministère de l'Agriculture.
Dix départements du nord de la France sont désormais touchés : Aisne, Ardennes, Haute-Marne, Marne, Meurthe-et-Moselle, Meuse, Moselle, Nord, Oise, Pas-de-Calais. Un précédent bilan du gouvernement faisait état de 41 foyers le 14 août, dans six départements. La propagation de la FCO, dite aussi "maladie de la langue bleue", s'accélère également en Europe, l'Allemagne, les Pays-Bas et la Belgique étant aussi très touchés.
>> LIRE AUSSI - Faut-il s’inquiéter du virus de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo, repéré sur des tiques dans le sud de la France ?
La vaccination contre cette maladie, non transmissible à l'homme et dont un nouveau sérotype (3) est apparu le 5 août en France, a débuté, mais trop tardivement, selon la Fédération nationale ovine (FNO). "On est bien dans une phase d'explosion. On aurait pu vacciner un mois plus tôt pour avoir l'immunité acquise au pic de l'épidémie", a déclaré à l'AFP Emmanuel Fontaine, en charge des affaires sanitaires à la FNO.
Dans les Ardennes, l'éleveur Bruno Miser a dit sa colère à l'AFP : "On réclame des vaccins depuis le mois d'octobre !" Il vaccine depuis deux jours un troupeau déjà en partie malade et s'attend "à ramasser des cadavres à la pelle" dans les prochains jours.
"Maintenant, il faudrait élargir la zone de vaccination et commander environ 2 millions de doses supplémentaires" pour les ovins, estime Emmanuel Fontaine, alors que l'État a pour le moment prévu de distribuer 1,1 million de doses pour les ovins et 5,3 millions pour les bovins, en ciblant les régions les plus à risques, au nord de la Loire où les déplacements d'animaux sont soumis à restriction.
"Pris en étau"
Le nouveau sérotype 3 du virus été décelé pour la première fois en Europe en septembre 2023, aux Pays-Bas, avant d'être détecté en Belgique, en Allemagne et au Royaume-Uni dans les mois suivants. De premiers cas ont été confirmés début août en France, au Luxembourg et au Danemark. Face à l'accélération de la propagation, le gouvernement affirme être "à l'écoute de la détresse des éleveurs" et "n'exclut rien", sans s'engager à passer pour le moment de nouvelles commandes de vaccins.
Le ministère de l'Agriculture reconnaît des "lenteurs" dans la première phase de déploiement des vaccins, mais affirme que la campagne de vaccination a démarré "avant l'arrivée des premiers cas" en France. La fièvre catarrhale ovine se manifeste par de la fièvre, des troubles respiratoires, une langue pendante ou encore la perte des petits en gestation et parfois par la mort des animaux, dans des proportions variables d'un élevage à l'autre. Sa détection n'entraîne pas l'abattage des bêtes, contrairement à la grippe aviaire. Elle touche aussi les bovins, mais avec une mortalité très faible.
La FCO est présente depuis des années en France mais avec d'autres sérotypes, les numéros 4 et 8. Le sud du pays est actuellement confronté à une épizootie de FCO 8 qui a causé la mort de milliers de bêtes dans des élevages ces dernières semaines.
Jeudi, des éleveurs se sont rassemblés à Foix (Ariège) à l'appel de la Confédération paysanne (3e syndicat agricole) pour réclamer des indemnisations après la mort estimée de 4.000 brebis en Occitanie depuis juin. La vaccination contre la FCO 8 existe, mais n'est pas prise en charge par l'État.
"Cette année, nous faisons face à un nouveau variant du sérotype 8, plus virulent et qui progresse. Avant, le moucheron culicoïde (insecte vecteur) n'évoluait pas au-delà de 800 mètres d'altitude, maintenant, on a des élevages touchés à 1.000 mètres", explique Emmanuel Fontaine. "C'est pour cela que les éleveurs demandent une aide de l'État. Entre la FCO 8 qui remonte et la FCO 3 qui descend, les éleveurs du centre, où se concentrent les gros troupeaux, sont pris en étau", prévient-il, inquiet pour l'avenir du cheptel français, d'un peu moins de 6 millions de brebis.