Récompenser la "performance collective" plutôt que le mérite individuel : c'est la proposition adressée mardi par le centre de réflexion de hauts fonctionnaires Le Sens du service public au gouvernement, qui se dit prêt à accentuer la rémunération au mérite dans la fonction publique. "La rémunération au mérite individuel est accordée à l'agent sur la base de la supposée performance individuelle", écrit le think tank fondé en 2021 dans une "contribution" publiée en amont de la présentation à l'automne d'un projet de réforme de la fonction publique, dont doivent justement discuter mardi les syndicats et le gouvernement.
Favoriser les plans d'intéressement
Mais "comment isoler l'apport de chacun dans une chaîne d'acteurs qui concourt au bien-être" de la population en délivrant des services publics, s'interroge-t-il. "La progression du salaire par les primes alimente une concurrence malsaine entre employeurs publics", à l'heure où nombre d'entre eux peinent déjà à recruter, ajoute Le Sens du Service public. Les primes, dont celles liées au mérite, ne sont par ailleurs pas prises en compte pour calculer le montant des retraites des fonctionnaires, rappelle-t-il.
>> LIRE AUSSI - Fonction publique : Guerini souhaite «lever le tabou du licenciement» et provoque la colère des syndicats
Enfin, selon un sondage mené par le think tank sur LinkedIn auprès de 476 agents fin février, 88% des répondants estiment qu'ils devraient être éligibles à une éventuelle rémunération du mérite individuel. Or "le principe même de la rémunération au mérite repose sur la différenciation des performances moyennes (la majorité des agents) des autres performances", relève le groupe de réflexion.
Par conséquent, Le Sens du service public plaide plutôt pour récompenser le mérite collectif, en particulier via des plans d'intéressement. "Si le gouvernement veut promouvoir la rémunération au mérite, alors la véritable audace réformatrice serait d'instaurer un dispositif public d'intéressement collectif", juge-t-il.
"Des règles transparentes et négociées"
Ce dispositif devra reposer sur "des règles transparentes et négociées" avec les syndicats, qui se sont jusqu'ici montrés hostiles à l'accentuation de la rémunération au mérite prônée par le ministre de la Fonction publique Stanislas Guerini. Il devra aussi se fonder "sur des indicateurs simples, alignés avec les priorités de l’employeur, par exemple en matière d’accueil des usagers ou de transition écologique", estime le think tank.
Dans un sondage Odoxa pour Le Figaro, publié début avril, 72% des 1.005 répondants se disaient favorables à accentuer la rémunération au mérite des fonctionnaires. Le même pourcentage soutenait l'idée de pouvoir licencier plus facilement les fonctionnaires pour insuffisance professionnelle, une proposition défendue par Stanislas Guerini et dénoncée par les syndicats.