Le tribunal correctionnel de Paris rendra le 20 décembre son jugement dans le procès de France Télécom et de ses ex-dirigeants, dont l'ancien PDG Didier Lombard, jugés pour "harcèlement moral" dix ans après les suicides de plusieurs salariés. Depuis l'ouverture le 6 mai de ce procès inédit, qui voit pour la première fois une entreprise du CAC 40 jugée pour un harcèlement moral institutionnel, les prévenus ont rejeté toute responsabilité.
Vendredi, le parquet a requis les peines maximales prévues par la loi pour "harcèlement moral": 75.000 euros d'amende contre France Télécom et un an de prison et 15.000 euros d'amende contre les ex-dirigeants, accusés d'avoir mené "une politique d'entreprise de déstabilisation des salariés", alors qu'ils voulaient supprimer des milliers d'emplois.
19 suicides de salariés
Didier Lombard, PDG de l'entreprise de 2005 à 2010, n'a pas souhaité s'exprimer une dernière fois. Les parties civiles lui ont vertement reproché tout au long du procès son "déni", ainsi que son absence de regrets. En octobre 2006, huit mois après avoir annoncé un plan de transformation de l'entreprise et 22.000 départs sur trois ans, Didier Lombard avait dit vouloir les faire "par la fenêtre ou par la porte". Son conseil Jean Veil a plaidé "une maladresse".
Quant à la phrase sur "la mode des suicides", prononcée par l'ex-PDG devant les médias en septembre 2009, elle était due au "stress, il était interrogé tous les jours", a assuré Me Veil. Didier Lombard "est comme il est, mais je ne crois pas que ce soit la sanction pénale qui puisse éventuellement adoucir la douleur des victimes", a estimé Me Veil, demandant sa relaxe. France Télécom était devenue le symbole de la souffrance au travail et faisait la Une des médias il y a dix ans, alors que plusieurs salariés se suicidaient. Les juges ont retenu 39 cas de salariés, dont 19 se sont suicidés. Environ 120 autres personnes se sont constituées partie civile depuis le début du procès.