Énième rebondissement dans l'affaire Jacqueline Sauvage, condamnée en appel en décembre 2015 à dix ans de prison pour le meurtre de son mari violent. Bénéficiant d'une "remise gracieuse du reliquat de sa peine d'emprisonnement", qui "met fin immédiatement à sa détention", selon un communiqué de l'Élysée, la sexagénaire est sortie de prison mercredi, aux alentours de 18h30.
Les informations à retenir :
- François Hollande a accordé une grâce totale à Jacqueline Sauvage, mercredi après-midi
- La sexagénaire est sortie de prison peu avant 18h30
- Selon l'une de ses avocates, elle aspire désormais à "la plus grande discrétion"
Sa place n'est "plus en prison". "Le président de la République a estimé que la place de Mme Sauvage n'était plus aujourd'hui en prison, mais auprès de sa famille", a estimé le palais présidentiel. En janvier 2016, François Hollande avait déjà accordé à la sexagénaire une "remise gracieuse" de peine, lui permettant de déposer une demande de libération conditionnelle. Mais sa demande avait été rejetée en première instance et en appel, la cour estimant notamment que la femme peinait à accéder à "un authentique sentiment de culpabilité". Depuis, le comité de soutien de Jacqueline Sauvage, devenue un symbole des victimes de violences conjugales, militait pour réclamer une grâce totale.
J'ai décidé d'accorder à Jacqueline Sauvage une remise gracieuse du reliquat de sa peine. Cette grâce met fin immédiatement à sa détention.
— François Hollande (@fhollande) December 28, 2016
Le ministre de la Justice consulté. L'Élysée a précisé que le chef de l'État avait accordé sa grâce "après avis du ministre de la Justice", saisi le 9 décembre, après le rejet de la demande de libération conditionnelle en appel. Dans une lettre adressée une semaine plus tôt au président de la République, les trois filles de Jacqueline Sauvage se disaient "désespérées" de ne pas avoir leur mère près d'elles, "inquiètes pour son état de santé" et "craignant pour sa vie". Elles disaient aussi ne "plus" savoir "comment intervenir face à toutes ces interminables procédures qui n'aboutissent pas". En première instance comme en appel, les trois femmes avaient témoigné à charge contre leur père, expliquant avoir été violées et battues, comme l'avait été leur mère.
"Le résultat d'un travail acharné". L'une des avocates de Jacqueline Sauvage, dont la fin de peine était jusqu'alors fixée au 2 juillet 2018, s'est dite "terrassée par la joie et l'émotion" à l'annonce de la décision de François Hollande. "C'est le résultat d'un an de travail acharné, on a porté ce dossier à bout de bras", a estimé Me Nathalie Tomasini, confiant qu'elle était au courant de la décision, mais "tenue à un devoir de réserve". "Ça arrive au moment où on s'y attendait le moins, parce qu'on s'était dit avant Noël, il (François Hollande, ndlr) prendra sûrement une décision, négative ou positive, ou alors en début d'année. Mais aujourd'hui, on ne s'y attendait pas forcément", a réagi de son côté Janine Bonaggiunta, une autre des conseils de la sexagénaire.
Des magistrats en colère. "On a un président de la République qui remet en cause plusieurs décisions de justice", a dénoncé de son côté la présidente de l'Union syndicale des magistrats (USM) au micro d'Europe 1. "On a deux cours d'assises différentes, avec des jurés populaires qui avaient connaissance de toute l'affaire, de toute la situation, qui ont décidé de prononcer une peine de dix ans d'emprisonnement et puis ensuite on a des magistrats professionnels, avec des avis de psychiatres, d'experts, qui ont décidé de ne pas prononcer de libération conditionnelle", a-t-elle poursuivi. "Là, le président de la République fait fi de toutes ces décisions. (...) Ce n'est pas un bon signal pour le fonctionnement de nos institutions."
Une sortie de prison en toute discrétion. Une heure après l'annonce de la grâce totale, le parquet de Melun avait indiqué que la libération de Jacqueline Sauvage, détenue à la prison du Réau, en Seine-et-Marne, devait intervenir "dans la soirée". Un peu avant 18h30, la sexagénaire a quitté la prison en voiture, derrière des vitres teintées, sans s'arrêter devant les nombreux journalistes présents. Selon Me Bonaggiunta, Jacqueline Sauvage aspire à "la plus grande discrétion" et souhaite passer les prochains jours entourée de sa famille.