Le braqueur récidiviste Redoine Faïd, 46 ans, s'est évadé par hélicoptère avec la complicité d'un "commando armé" dimanche matin de sa prison de Seine-et-Marne, cinq ans après une première évasion spectaculaire de la prison de Lille.
L'opération, qui s'est déroulée vers 11h30, a duré "quelques minutes" et n'a fait ni blessé ni otage, a indiqué l'administration pénitentiaire (AP). "Un commando armé s'est posé dans la cour d'honneur du centre pénitentiaire (...), alors que le détenu se trouvait au parloir", a ajouté l'AP. Dimanche soir, la ministre de la Justice Nicole Belloubet a annoncé que le commando avait "sans doute repéré les lieux par le biais de drones".
Les informations essentielles à retenir :
• Un commando armé, qui s'est posé en hélicoptère dans la cour d'honneur de Réau, a procédé à l'évasion de Faïd en dix minutes
• La ministre de la Justice Nicole Belloubet a indiqué que des drones avaient survolé la prison il y a quelques mois
• Quelque 2.900 policiers et gendarmes sont mobilisés et un signalement a été diffusé sur l'ensemble du territoire
Le pilote de l'hélicoptère pris en otage
L'évasion s'est faite "avec trois complices" et l'hélicoptère a ensuite été retrouvé à Gonesse, dans le Val-d'Oise, à une soixantaine de km de la prison, a précisé une source proche du dossier. Selon une source policière, le pilote de l'appareil a été pris en otage par les complices de Redoine Faïd. En état de choc, il a été transporté à l'hôpital quand il a été récupéré à Gonesse. L'hélicoptère serait parti de Fontenay-Trésigny, en Seine-et-Marne, selon une source proche de l'enquête. Une fois l'appareil posé dans la cour d'honneur de la prison, dépourvue de filets, "deux individus armés sont descendus munis de disqueuses" et ils ont "lâché des fumigènes dans la cour", a raconté Martial Delabroye, secrétaire FO du centre pénitentiaire.
Les deux hommes, "habillés de noir, portant des cagoules et des brassards de police" et équipés de "fusil d'assaut de type kalachnikov", ont découpé une porte menant via un chemin de service au parloir, a ajouté le représentant syndical. Faïd se trouvait au parloir avec un de ses frères. Ce dernier a été placé en garde à vue, a-t-on indiqué de source judiciaire. L'hélicoptère, de type Alouette II, de couleur beige, a fait l'objet d'une tentative de mise à feu qui n'aurait pas fonctionné, avec une vitre gondolée par la chaleur et un habitacle noirci.
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Venue dimanche soir à la prison de Réau, la ministre de la Justice Nicole Belloubet a indiqué qu'il y a quelques mois, les services pénitentiaires de la prison de Réau avaient repéré des drones qui survolaient l'établissement. Le commando avait "sans doute repéré les lieux par le biais de drones", a supposé la garde des Sceaux en se disant toutefois "pas en capacité" de faire un lien formel avec l'évasion. "L'enquête judiciaire qui est en cours le dira", a-t-elle ajouté.
Rédoine Faïd : "Des drones ont été repérés au-dessus de la prison il y a quelques mois" explique Nicole Belloubet pic.twitter.com/MFtL3F4HoQ
— BFMTV (@BFMTV) 1 juillet 2018
"Ça a duré dix minutes en tout"
En tout et pour tout, l'évasion aura duré "dix minutes en tout". "Vers 11h15, l'hélicoptère s'est posé dans la cour d'honneur de l'établissement", a raconté Martial Delabroye, secrétaire FO du centre pénitentiaire Sud-Francilien à Réau où le braqueur récidiviste de 46 ans était détenu. Les surveillants "se sont réfugiés à l'intérieur" du bâtiment, dans les postes protégés, pour donner l'alerte, a-t-il ajouté, expliquant que les personnels "ne sont pas armés à l'intérieur". "Il n'y a que les miradors qui sont armés" or ceux-ci n'ont aucune visibilité sur la cour d'honneur, selon le représentant syndical, qui n'était pas présent lui-même au moment de l'évasion. Cette cour est d'ailleurs "le seul endroit pas équipé de filet anti-aérien" car "les détenus n'y passent jamais, sauf pour sortir de la prison", a-t-il expliqué. Une fois l'hélicoptère posé, "deux individus armés sont descendus munis de disqueuses" et ils ont "lâché des fumigènes dans la cour", a indiqué Martial Delabroye.
Près de 3.000 gendarmes et policiers mobilisés
Faïd et ses complices auraient ensuite emprunté une voiture qui "a été retrouvée incendiée sur le parking P1 du centre commercial O'Parinor", à Aulnay-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis, "au milieu des autres voitures en stationnement", a-t-on indiqué de source policière. Dans l'après-midi, la police scientifique a inspecté le véhicule, une Mégane noire, a-t-on constaté.
Crédits photos : AFP
"Tous les moyens sont mobilisés pour localiser le fugitif", a indiqué le ministère de l'Intérieur, précisant que "des dispositifs coordonnées de contrôle et d'interception sont mis en place, qui tiennent compte de la dangerosité du fugitif et de ses possibles complices". Quelque "2.900 policiers et gendarmes sont mobilisés" (sécurité publique, police judiciaire, police aux frontières, gendarmes...) et "un signalement a été diffusé sur l'ensemble du territoire", a-t-on précisé de source policière en fin d'après-midi. Vers 18h la ministre de la Justice Nicole Belloubet s'est rendue au centre pénitentiaire de Réau.
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"Il n'a jamais perdu l'idée de s'évader"
Le parquet de Paris a ouvert une enquête en flagrance des chefs d'évasion en bande organisée et d'association de malfaiteurs confiée à la DCPJ, a-t-il indiqué. Redoine Faïd a été condamné en appel en avril à 25 ans de réclusion pour un braquage raté dans le Val-de-Marne, qui avait coûté la vie en 2010 à la policière municipale Aurélie Fouquet, mitraillée à l'issue d'une course folle sur l'autoroute. Il a été condamné deux fois aux assises en 2017 : à 10 ans de réclusion pour son évasion de la prison de Lille-Sequedin en 2013 et à 18 ans de prison pour l'attaque d'un fourgon blindé dans le Pas-de-Calais en 2011. Il a fait appel de ces deux condamnations.
Le 13 avril 2013, il s'était évadé en moins d'une demi-heure de la prison de Lille-Sequedin, prenant quatre surveillants en otages. Il avait fait exploser cinq portes au plastic, avant d'être récupéré en voiture par un complice. Sa cavale avait duré jusque fin mai 2013. "C'est quelqu'un qui n'est jamais en conflit avec le personnel, mais dont il faut toujours se méfier", a indiqué un surveillant de prison ayant côtoyé Redoine Faïd. "Dans un coin de sa tête, il n'a jamais perdu l'idée de s'évader. Derrière ses bonnes manières - c'est quelqu'un de très poli -, il cachait toujours son jeu".