Depuis le début du quinquennat, Marisol Touraine a montré sa volonté de faire augmenter le prix du paquet de cigarettes. Invitée de l'émission "Le Grand Jury" sur RTL/Le Figaro/LCI, la ministre de la Santé a appelé une nouvelle fois de ses vœux "une augmentation forte et significative" du paquet avant la fin du quinquennat. Consciente que la barre des 10 euros ne serait probablement atteinte "à l'horizon de ce quinquennat", elle l'espère "le plus vite possible". Au-delà du symbole, ce seuil garantit-il une réelle baisse de la consommation ?
"La situation absolument catastrophique en France". Marisol Touraine ne s'attaque pas au tabagisme par hasard. "La situation est absolument catastrophique en France", déplore Michèle Delaunay, députée PS de la Gironde et présidente d'Alliance contre le tabac, interrogée par Europe1.fr. Avec 13 millions de fumeurs (soit 32% de la population), la France est le 4e plus gros consommateur de tabac en Europe derrière la Grèce, la Bulgarie et la Croatie. A titre de comparaison, la France se situe bien au-dessus de la moyenne dans l'Union européenne (26%).
Une efficacité de la mesure prouvée ailleurs. Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), qui a réalisé une analyse globale dans plusieurs pays, les mesures pour lutter contre le tabagisme (paquet neutre, interdiction de fumer dans les lieux publics, …) ne marchent réellement "que si elle sont accompagnées par une hausse significative du prix du paquet". L'OMS a d'ailleurs lancé une campagne axée sur cet argument : "Raise tobacoo tax, lower death and disease" ("Augmentez les taxes sur le tabac, baissez la mortalité et le nombre de maladies).
Quelle diminution peut-on espérer ? "Il faut réduire la consommation de tabac de moitié avant 10 ans", prône Michèle Delaunay (en photo ci-dessous). Selon la députée socialiste mobilisée, pour la lutte anti-tabac depuis des années, "la consommation peut chuter à 15% (de la population globale française, ndlr) en peu de temps si le paquet passe à 10 euros".
"La cible n°1 de cette mesure, les jeunes". "La cible n°1, ce sont bien évidemment les jeunes", estime Michèle Delaunay. "Une fois qu'ils sont piégés par le tabac, ils mettront toute leur vie à s'en sortir". Si le prix est essentiel, la députée socialiste rappelle aussi l'importance de baisser l'influence des lobbys. Selon une autre étude de l'OMS, "80% des films français comportent des scène de tabagisme".
"Alors que la publicité pour le tabac est de plus en plus strictement réglementée, le cinéma est l’un des derniers canaux par lesquels des millions d’adolescents sont exposés sans restriction à des images de consommation de tabac", déplore le Dr Douglas Bettcher, directeur du Département OMS Prévention des maladies non transmissibles. Et Michèle Delaunay de proposer une solution supplémentaire et radicale pour lutter contre ce lobbying : "il faut couper les aides publiques accordées au films qui intègrent des scènes avec du tabac".