Paris, Marseille, Bordeaux, Nice... Les auto-écoles ont perturbé le trafic dans plusieurs villes de France lundi pour protester contre une "ubérisation" du permis de conduire, menacé selon elles par un rapport parlementaire. En Île-de-France, les opérations escargots ont débuté dès le petit matin, ralentissant le trafic sur les autoroutes A6, A1 et A3 en direction de Paris. Des centaines de voitures-écoles se sont également rassemblées sur plusieurs portes de la capitale, avant de rouler au pas sur le périphérique parisien.
Un rapport contesté remis au Premier ministre vendredi. A Marseille, une centaine de voitures ont perturbé l'entrée de la ville par l'autoroute A7. Environ 150 véhicules ont également perturbé le trafic à Nice et des dizaines de voitures étaient mobilisées à Bordeaux. Les trois organisations de la profession (CNPA, Unidec, Unic) sont vent debout contre le rapport de la députée du Gard (LREM) Françoise Dumas, remis au Premier ministre vendredi et pas encore rendu public. Elles s'étaient déjà alarmées en novembre des déclarations d'Emmanuel Macron annonçant une "baisse drastique" du coût du permis.
"Ubérisation". Les syndicats redoutent une "ubérisation" de leur métier avec l'abandon de l'obligation d'avoir un local. De quoi favoriser les plateformes en ligne, qui emploient des moniteurs auto-entrepreneurs.
"On veut nous imposer un système hors-sol", a expliqué Patrice Bessone, président du CNPA-Éducation routière, syndicat majoritaire parmi les 10.000 auto-écoles (40.000 salariés). Il craint "une baisse de la qualité du permis et un plus grand nombre d'accidentés et de morts sur la route". Avec cette réforme, "il y aura aussi moins de proximité avec les moniteurs et moins de maillage territorial", a-t-il ajouté. "Pour les jeunes dans les villages dont le permis est le passeport vers l'emploi, ça va devenir compliqué." Les auto-écoles craignent également une généralisation des inscriptions à l'examen par l'élève lui-même, en candidat libre.
Affecter la recette des radars au permis. "Ce ne sera pas forcément moins cher", selon Patrice Bessone. "Si l'élève s'inscrit quand il le souhaite avec une plateforme en ligne et qu'il rate son examen, il va devoir reprendre des heures." Pour financer un "permis à zéro euro", il propose "d'affecter la recette des radars au permis de conduire".
Selon la profession, d'autres pistes existent pour baisser le prix - 1.800 euros en moyenne selon l'UFC-Que Choisir en 2016 - du papier rose. Parmi elles, le développement de cours collectifs et de simulateurs de conduite, une meilleure orientation vers les dispositifs d'aide (compte personnel de formation, permis à un euro...), et surtout baisse de la TVA. "Si le permis coûte trop cher, pourquoi pas enlever la TVA ?", a demandé Jean-Yves Fernandez, au milieu des klaxons dans la manifestation parisienne. Dans le cortège, une affiche interrogeait : "70% de taxes et de charges sur un permis, c'est qui le voleur?"
"Contre le low-cost". Avec les plateformes, "vous allez confier vos enfants à des personnes dont vous ne saurez pas si c'est des vrais moniteurs ou pas", s'est indigné Serge Mouserou, propriétaire d'auto-écoles venus depuis Toulouse. "On est contre le low-cost", a résumé Thierry Hemmen à Nice, délégué du syndicat Unic. "Chez nous, il y a du suivi, de la pédagogie, et c'est comme tout, ça a un prix". La ministre des Transports Élisabeth Borne a tenté de rassurer. "Il ne s'agit pas de faire un permis de conduire au rabais, il y a des enjeux de sécurité routière", a-t-elle expliqué sur LCI.