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Caroline Baudry avec AFP / Crédit photo : JEAN-PIERRE CLATOT / AFP , modifié à
Pas question de reculer : malgré l'interdiction, les opposants au chantier de ligne ferroviaire grande vitesse Lyon-Turin sont déterminés à manifester ce samedi en Maurienne, selon des modalités encore à établir et malgré une forte présence policière dans la vallée.

Des centaines de militants, jeunes pour la plupart, ont afflué vendredi après-midi et bâti en quelques heures un camp de bric et de broc dans les prés, sur un terrain prêté par la commune de La Chapelle, hors de la zone d'interdiction annoncée la veille par la préfecture de Savoie. Cette interdiction, contestée en justice par les organisateurs, a été confirmée par le tribunal administratif de Grenoble qui a rejeté vendredi soir une requête déposée par les Verts (EELV), ATTAC Savoie, et l'association Vivre et agir en Maurienne, arguant que la "configuration du parcours (…) ne garantit pas (…) la sécurité" du cortège.

Le tribunal a également mis en avant un "risque d'intrusion des sites particulièrement sensibles" et de l'éventuelle présence de "manifestants radicaux". La manifestation, annoncée de longue date par une dizaine d'organisations dont les Soulèvements de la Terre et les No-Tav italiens, entend dénoncer les impacts écologiques, notamment sur la ressource en eau, de ce chantier "ferroviaire titanesque, impliquant le forage de 260 km de galeries à travers les massifs alpins". Selon eux, les travaux ont déjà tari plusieurs sources et captages dans la vallée.

"J'y crois dur comme fer"

Soutenue par l'Union européenne, la nouvelle ligne doit à terme relier Lyon et Turin, avec 70% des voies en France et 30% en Italie, avec un tunnel de 57,5 km traversant les Alpes entre Saint-Jean-de-Maurienne et Suse. Coût évalué : plus de 26 milliards d'euros. Quelque 2.000 policiers et gendarmes ont été déployés dans cette vallée frontalière de l'Italie, célèbre pour ses grandes stations de ski. Une présence visible vendredi soir à de nombreux carrefours et près des infrastructures ferroviaires en construction, a constaté l'AFP.

Dans cette configuration, les opposants, qui espéraient initialement manifester à partir de Villarodin-Bourget, un village près de Modane, à plus de 50 km de leur campement, ont indiqué étudier "plusieurs options". Le lieu de manifestation pourrait n'être choisi que samedi matin après consultations entre les 11 organisations à l'origine du rassemblement, indiquent des militants. 

Pour Max Milliex, habitant de la vallée et membre d'un collectif local d'opposants, c'est presque secondaire : "C'est un succès, quoi qu'il arrive, même s'ils nous empêchent de manifester ça sera un succès parce que le message est passé. Ca fait 20 ans qu'on essaye de communiquer, qu'on n'y arrive pas", se réjouit ce grand costaud. "Juste de voir l'état d'excitation des pro Lyon-Turin, on se réjouit, on sent une certaine angoisse chez eux. Et puis on se dit qu'on va peut-être arriver à arrêter le Lyon-Turin. Moi, j'y crois dur comme fer", sourit l'homme, exproprié en 2019 de sa maison et de sa scierie dans le village de Villargondran, en raison du chantier.

"Contradiction absolue"

Pour le patron du Medef Geoffroy Roux de Bézieux, "on est face à la contradiction absolue des militants écologistes extrémistes : Ils veulent soi-disant sauver la planète mais ils ne veulent pas se donner les moyens : on ne sauvera pas la planète en faisant de la décroissance", a-t-il lancé vendredi matin sur BFM TV/RMC. Les autorités prévoient "un peu moins de 5.000 participants, dont de nombreux ressortissants italiens et suisses", avec "plus de 400 radicaux susceptible de provoquer de graves troubles à l'ordre public".

Quelque 107 interdictions administratives de territoire -destinées à bloquer l'accès d'un étranger en France lorsque "sa présence constitue un danger grave"- ont été prises, selon le ministère de l'Intérieur. Une centaine de véhicules ont été contrôlés vendredi dans la vallée, et 119 objets coupants et contondants confisqués, ainsi que deux artifices, a indiqué la gendarmerie.

Des décisions concernant d'autres recours contre les interdictions préfectorales -visant notamment un concert prévu samedi soir-, devraient être publiées samedi matin, selon le tribunal administratif. Les élus EELV ont fait savoir qu'une délégation participerait à un premier rassemblement prévu à 9h30 sur le site de La Chapelle, non concerné par l'interdiction préfectorale, mais pas à la manifestation prévue ensuite.