Sous le mot-dièse #Metoogay, des milliers d'homosexuels libèrent à leur tour leur parole sur les violences sexuelles, dans la lignée de #Metoo et #Metooinceste, et lancent leur propre débat sur le consentement, attendu depuis longtemps par les associations. Parmi les témoignages anonymes : "J'avais 20 ans, lui plus de 30, il m'a invité chez lui après avoir donné une master class dans mon cours de théâtre. J'étais tétanisé. Il a dit 'qui ne dit mot consent'. J'ai pleuré tout au long du rapport et il m'a dit 'J'avais pas vu. Tu as aimé quand même?'".
"A 16 ans, c'était l'un de mes meilleurs amis. A 21, c'était mon petit ami qui refusait mes 'non'. A 26, c'était un plan cul qui m'a fait le combo violence, contrainte et menace", raconte un autre homme.
Ces témoignages surviennent quelques jours après le mouvement #Metooinceste, qui a vu des milliers de personnes raconter les violences sexuelles subies au sein du cercle familial dans l'enfance ou l'adolescence, dans la foulée des accusations portées par Camille Kouchner contre Olivier Duhamel.
"Les violences sexistes et sexuelles sont un fléau que nous devons combattre collectivement. Les victimes doivent être crues, écoutées et accompagnées", a réagi sur Twitter Elisabeth Moreno, ministre déléguée à l'égalité.
Un élu de Paris et son conjoint accusés
Le mot-dièse #Metoogay a été également partagé après que l'élu PCF du Conseil de Paris Maxime Cochard et son conjoint ont été accusés de viol et d'agression sexuelle, ce qu'ils nient. Le Parti communiste leur a demandé de se mettre en retrait de leurs responsabilités au sein du PCF. Un jeune homme a affirmé sur Twitter avoir été violé par eux à l'âge de 18 ans, alors qu'il était dans une "situation particulièrement vulnérable".
L'élu EELV et adjoint à la Mairie de Paris Maxime Belliard a "salué cette décision". "Etant moi même gay, je vois très bien la réalité de ce milieu qui est aussi un milieu violent, marqué par des logiques de domination patriarcale, les mêmes mécanismes, une violence voilée", a t-il déclaré à l'AFP.
"Pas une affaire privée"
En voyant le hashtag émerger jeudi soir, Nicolas Martin, journaliste scientifique à France Culture, a décidé "que c'était le moment", pour lui, de témoigner publiquement des viols subis dès 11 ans et pendant six ans. Depuis ce tweet, "ça tangue", dit-il à l'AFP, en tentant d'analyser le mécanisme qui l'a poussé à prendre la parole publiquement.
"La parole ne doit plus être tue, le viol n'est pas une affaire privée ou de chambre à coucher, c'est une tendance structurelle et massive de la société et tant qu'on ne l'interroge pas, les hommes - puisque ce sont majoritairement eux qui violent, et en majorité des femmes il faut le rappeler - continueront à violer en toute impunité", plaide-t-il.
"Ce n'est pas forcément spécifique à la communauté gay. Le nœud du problème, c'est le patriarcat. Nous n'avons pas réglé la question de la domination?", abonde Sébastien Tüller, en charge des questions LGBTI pour Amnesty France.
Un tabou dans la communauté
Depuis 2017 et une première libération massive de la parole des femmes autour du mot-dièse #MeToo, les témoignages brisant le tabou des violences sexuelles se multiplient et se structurent, portés par des personnalités publiques ou des secteurs de la société comme le sport, la restauration, ou le monde de la culture.
Dans son enquête "A la recherche du MeToo gay" pour le magazine Vice, le journaliste Matthieu Foucher concluait en septembre dernier que ces agressions restaient "l'un des plus grands tabous et impensés de la communauté".
Pour David Malazoué, président de SOS Homophobie, il y a une urgence à créer une culture du consentement dans les relations et modes de rencontre LGBT. "Dans l'imaginaire de certains dans la communauté gay, à partir du moment où il y a un début de drague, c'est comme si ça justifiait tout ce qui se passe après". "Il est parfois difficile d'être entendu comme victime, de dire: 'Je suis allé au sauna mais les choses sont allées beaucoup plus loin que ce que je voulais'", explique-t-il.