La ministre de la Justice Nicole Belloubet a créé la surprise mercredi à l'Assemblée nationale en annonçant sa volonté de réformer par ordonnances la justice des mineurs, en passant par le projet de réforme en cours d'examen. "Le gouvernement sollicitera du Parlement, dans le cadre de la loi pour la réforme de la justice, une habilitation à réformer l'ordonnance de 1945 par la création d'un code de justice pénale des mineurs", a annoncé la garde des Sceaux dans l'hémicycle lors des questions au gouvernement, sous les applaudissements des députés LREM et MoDem.
De précédentes réformes avortées. "Ce travail sera mené en toute transparence avec vous au prochain semestre. Le gouvernement s'engage à ce que la loi de ratification (des ordonnances) soit l'occasion d'un débat parlementaire de fond. Cela est essentiel à nos yeux", a-t-elle précisé. Plusieurs textes ont précisé en France les principes de la justice des mineurs à partir du 20ème siècle, l'ordonnance du 2 février 1945 sur "l'enfance délinquante" étant la plus fréquemment citée. Tous posent comme grands principes l'atténuation de la responsabilité en fonction de l'âge, la recherche de réponses éducatives et le recours à des juridictions spécialisées. L'ordonnance de 1945, qui traite aussi de l'enfance en danger, a déjà connu une quarantaine de réformes devenant au fil du temps un mille-feuille difficilement lisible, et plusieurs ministres, dont Christiane Taubira et Jean-Jacques Urvoas, sous la présidence de François Hollande, s'étaient engagés à la réformer sans y parvenir.
Plusieurs mesures pour les mineurs déjà prévues. À la rentrée 2015, Christiane Taubira avait annoncé que le projet allait être examiné à la mi-octobre au Conseil d'État, puis au Parlement au premier semestre 2016. Mais le texte était ensuite tombé aux oubliettes, le Premier ministre Manuel Valls n'y étant "pas favorable", selon les syndicats de magistrats. Le projet de réforme de la justice, actuellement en débat à l'Assemblée, intègre déjà des mesures en direction des mineurs comme la création de vingt centres éducatifs fermés et l'expérimentation d'une nouvelle mesure d'accueil, mais rien ne concernait l'ordonnance de 1945 qui apparaît comme un totem délicat à réformer. La ministre doit déposer d'ici la fin de la semaine un nouvel amendement qui sera examiné par l'Assemblée.