Connaissez-vous Baby Ariel, Cameron Dallas ou encore Carson Lueders ? Si la réponse est non et que votre enfant a entre 10 et 17 ans, un conseil : faîtes comme si. Car ces jeunes américains sont devenus des immenses stars des réseaux sociaux, et particulièrement de l'un d'entre eux : l'application Musical.ly. Le principe ? Vous téléchargez l'application sur votre smartphone, vous choisissez une chanson, vous vous filmez, vous bougez vos lèvres et votre corps en suivant le rythme de la chanson, et cela génère une courte vidéo que vous pouvez ensuite partagez à vos amis ou vos "fans".
Votre voix n'est pas enregistrée : l'idée est de donner l'impression que vous êtes en train de chanter et de réaliser un clip, mais c'est la voix de l'artiste que l'on entend. En clair, c’est du "playback". C'est vous qui apparaissez à l'écran, qui dansez et bougez les lèvres, mais c'est la voix d'un(e) chanteur(se). Le mode "privé" vous permet de trier les personnes qui regarderont vos clips. Et si vous optez pour le mode "public", tout le monde pourra s'abonner à votre page et voir vos œuvres. C'est enfantin, mais ça cartonne.
Selon The Guardian, après moins de deux ans d'existence, l'application recensait en septembre 2016 pas moins de 95 millions de "Musers" dans le monde, nom que la société donne à ses abonnés. L’an dernier, elle s’est un temps hissée en tête du classement des "apps" les plus téléchargées dans plus de 30 pays, dont les États-Unis, le Canada, le Royaume-Uni, l'Allemagne, le Brésil, les Philippines et le Japon. En France, l'application est arrivée en juillet 2015. Selon le site Appannie.com, qui réalise des classements d'applications, Musical.ly se hissait à la 463e place des téléchargements sur iTunes en France au moment de son arrivée. Un an plus tard, elle est dans le top 30, devant Twitter et au coude à coude avec Shazam par exemple. Au mois d'avril dernier, elle s'est même hissée jusqu'au au 6e rang, devant Facebook, Instagram, Periscope ou YouTube ! Cœur de cible : les adolescents - et préadolescents - de 10 à 17 ans, voire même plus si affinité.
" Certains passent leur vie dessus ! "
"Avec mes amies, on ne parle que de ça", raconte Chiara, 10 ans, qui a découvert l'application avec sa cousine cet été. "Ça me plait beaucoup. Ma cousine était très douée, elle dansait bien. Du coup on a pu montrer de belles performances", se souvient-elle. "Certains passent leur vie dessus ! Personnellement, j'y vais une fois tous les deux jours. C'est drôle, cela permet de faire des chorégraphies avec des copines", poursuit Salomé, 14 ans.
L'application propose un mode "duo" : vous invitez un(e) ami(e) à distance et s'il ou elle accepte, l'application mélange vos deux vidéos et cela permet de faire un clip à deux. "Il y a un mode ralenti, un mode accéléré. Cela peut donner des vidéos très classes ou très drôles. Je passe en moyenne une heure par jour dessus", détaille Bianca, 10 ans. "Ce que je filme est complètement nul mais cela me plait, ça me fait rire de me voir danser comme un idiot avec de la musique à fond. J'aime surtout aller voir les autres, pour voir comment ils dansent", renchérit Tom, 12 ans.
Certains profils publics rassemblent des millions de fans, et endossent une sorte de leadership. En clair, les "stars" de Musical.ly. partagent leurs chorégraphies, et les autres essaient de les imiter. "On peut s'imprégner des danses des autres. Lorsqu'une vidéo d'un profil connu et public est mise en ligne, tout le monde suit", décrypte Salomé. Ce qui donne, parfois, des situations cocasses. "Je vois ma fille se mettre à danser d'un seul coup dès qu'elle entend une musique à la radio. Ça lui rappelle une chorégraphie qu'elle a vue sur l'application. Elle se met alors à bouger dans tous les sens et d'un coup, je culpabilise, j'ai l'impression de ne pas connaître ma fille !", s'amuse Eve, geste à l'appui. "J’ai tellement l’habitude de faire certaines chorégraphies que ça devient un automatisme", confirme sa fille Bianca.
" C'est un peu lassant à force "
L'application commence, également, à gagner en réputation dans la (vraie) planète musique. Le géant de l'édition du disque Warner Music Group a récemment signé un partenariat avec elle. "Warner a compris que le phénomène des vidéos musicales générées par l'utilisateur est un phénomène durable", note Tim Ingham, un spécialiste du secteur cité par The Guardian. "Vous pouvez expliquer ce que Musical.ly fait en une seule phrase. C'est une idée simple, bien exécutée, dans un marché qui va continuer de croître et de plus en plus. Ce n'est pas étonnant que cela fasse un peu de bruit ", poursuit Tim Ingham.
Mais l'application semble connaître une perte de vitesse. Depuis le mois d'avril, elle a perdu près de 25 places dans le classement des téléchargements en France. "Je ne l'utilise plus trop depuis la rentrée, c'est un peu lassant à force", confie ainsi Salomé. "Au bout d'un moment, c'est toujours la même chose, toujours les mêmes chansons. Cela a buzzé pendant un temps mais je n'ai pas l'impression que cela va durer longtemps", pronostique Tom.
L'application va, donc, devoir se réinventer. Des idées ? "Il faudrait pouvoir changer les couleurs du profil, il n'y a que du rose !", propose ainsi Bianca. "Il faudrait peut-être mettre des effets spéciaux autour des vidéos", renchérit Chiara. Et Tom de conclure : "il faudrait surtout plus de chansons". Le message est passé.