Latin et grec en version allégée, suppression des classes bilangues, instauration d'enseignements interdisciplinaires, programme d'histoire rénové... la réforme du collège envisagée par le gouvernement et les projets de nouveaux programmes font polémique dans le camp socialiste, dans l'opposition mais aussi chez les premiers intéressés que sont les enseignants. Sept organisations syndicales, représentant 80% des professeurs du second degré, ont d'ailleurs appelé à la grève pour mardi. Dans ce contexte houleux, Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'Éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, était l'invitée du Grand Rendez-Vous dimanche.
Retour sur la polémique. La ministre défend son projet de réforme en avançant qu'il entrera bien en vigueur pour la rentrée 2016. Elle relève cependant "de la manipulation" de la part "de la droite" au sujet de cette réforme. La ministre a un seul regret : "la tournure des débats" avec "ses rumeurs", "ses contre-vérités". Elle reconnaît cependant s'être "échauffée" lorsqu'elle a employé l'expression de "pseudo-intellectuels" pour désigner ceux qui ont dit dans la presse que le "latin allait être remplacé par des cours d'improvisation". Elle regrette juste le traitement qui a été fait "dans la presse" de ses paroles.
Dans la présentation des mesures envisagées par le gouvernement, Najat Vallaud-Belkacem ne reconnaît pas de maladresse de sa part. Elle souhaite ainsi distinguer la réforme du collège, "dont le principe a été adopté au Parlement en 2013", d'une part et les futurs programmes qui ne sont qu'"une ébauche", rappelle la ministre, qui recevra l'avis des enseignants.
Les "défauts" des projets de programmes seront corrigés. Najat Vallaud-Belkacem reconnaît des "défauts" dans les projets actuel de programmes du Conseil supérieur des programmes (CSP), notamment ceux concernant l'histoire. Des enseignements "obligatoires" et d'autres "facultatifs" ont pu créer "des incompréhensions". Elles seront "levées", espère la ministre, après la période de consultation.
Les Lumières seront "obligatoires". La place des Lumières du 18e siècle, au fondement des droits de l'homme et de la Révolution française, est présentée comme optionnel dans la première mouture retenue par le CSP. Dans les programmes actuels, les Lumières sont obligatoires en classe de 4e. Mais la ministre dément quand même : "évidemment, les Lumières sont obligatoires". Elle rejette l'accusation d'avoir voulu supprimer cette partie du programme obligatoire.
Les Lumières seront "obligatoires" dans les...par Europe1fr
L'islam ? Présent dans les programmes "depuis 1957". Sur le caractère obligatoire de l'histoire de l'islam au Moyen-Âge qui a fait polémique, Najat Vallaud-Belkacem tient a préciser que la présence de cette religion dans les programmes n'est pas nouveau puisque cet enseignement est présent "depuis 1957" en France. "C'est pas vraiment une nouveauté", rappelle donc la ministre. Et puis, son emplacement en 5e s'explique pour "des raisons chronologiques" puisque le christianisme et le judaïsme sont, pour leur part, enseignés de manière obligatoire aussi en 6e.
Les trois monothéismes sont en effet présents dans les projets de programmes du CSP, tout comme ils le sont dans les programmes actuels. La véritable nouveauté que propose le CSP concerne le chapitre sur le "christianisme médiéval", qui se penche sur la puissance de l'Eglise au Moyen-Âgen aujourd'hui obligatoire, qui deviendrait optionnel.
Le calendrier de la consultation doit être "souple". Le Conseil supérieur des programmes (CSP) a lancé une consultation sur les futurs programmes pour la rentrée 2016 qui finira le 1er juin. Est-ce suffisant ? Le calendrier doit être "souple", admet la ministre. "800.000 enseignants" vont être consultés, ainsi que "les fédérations de parents d'élèves et des historiens" vont intervenir dans le débat. "Un forum fin mai sera organisé avec le CSP, des grands historiens, des professeurs d'histoire", annonce la ministre.
Le collège qui se dégrade ? "Les ministres responsables". Ne pas réformer, c'est, selon elle, continuer "à avoir chaque année 140.000 jeunes qui sortent chaque année du système scolaire sans qualification" et "à avoir un élève sur quatre en 3e qui ne maîtrise pas les fondamentaux de français". La situation "n'a cessé de se dégrader", estime-t-elle tout en reconnaissant que son ministère en est le premier responsable. Et "indéniablement", les ministres successifs de l'Education nationale le sont aussi car les cadres imposés au collège ont "été trop stricts".
Les classes bilangues, remplacées par "la LV2 en 5e". Sur la suppression des classes bilangues qui concernent 16% des élèves de 6e dans les collèges favorisés mais aussi dans ceux des zones prioritaires, la ministre socialiste assure que "personne n'est sacrifié". Elle avance que grâce à l'introduction de la LV2 dès la 5e, cet enseignement sera "proposé à tous les élèves". La classe bilangue, qui permet d'apprendre la LV2 dès la 6e, est "un dispositif dérogatoire" qui favorisait "quelques uns" des élèves et faisait oublier tous les autres, estime l'ancienne porte-parole du gouvernement.
Des établissements plus autonomes. Najat Vallaud-Belkacem défend son projet d'instaurer des enseignements interdisciplinaires. "Le collège 2016, c'est plus de travail en équipe, plus de partenariats avec les parents, j'y insiste", avance la ministre qui rappelle que les consultations sont quotidiennes avec les représentants des enseignants. Sur l'autonomie des établissements et les "20% du temps scolaire" laissés à discrétion de chaque collège, la ministre ne veut rien lâcher là aussi. Mais elle rappelle cependant que la définition de ce temps consacré à l'interdisciplinaire sera défini par les Conseils pédagogiques où siège le chef d'établissement mais aussi les professeurs.
Le projet de la droite ? La ministre dit "merci". À Bruno le Maire de l'UMP qui a fait samedi ses propositions pour réformer le collège, la ministre dit "merci" car ces déclarations permettent à la droite de "tomber le masque" avec un "contre-projet. Bruno Le Maire propose, selon Najat Vallaud-Belkacem, de "distinguer dès l'âge de 11 ans les enfants qui apprendront les humanités et ceux qui apprendront la mécanique". Le socle commun, que le député de l'UMP propose de conserver pour tous, est insuffisant selon la socialiste.
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